L’Irak fustige une « agression » après des tirs iraniens meurtriers, rappelle son envoyé
Masrour Barzani a fustigé auprès d'Antony Blinken "des attaques injustifiées et illégales", appelant la communauté internationale "à ne pas rester silencieuse"
L’Irak a condamné mardi une « agression » contre sa souveraineté après des tirs iraniens meurtriers sur le Kurdistan autonome, Téhéran défendant une opération « ciblée » visant selon lui un site des renseignements israéliens, dans un contexte régional explosif.
Ces frappes nocturnes ont tué « quatre civils » et fait six blessés dans le nord de l’Irak. Elles interviennent sur fond de guerre dans la bande de Gaza entre Israël et les terroristes palestiniens du Hamas depuis le 7 octobre, jour des massacres barbares que la branche palestinienne des Frères musulmans a perpétrée aux côtés de civils complices sur le sol israélien et qui ont fait près de 1 200 morts dont la plus jeune avait 10 mois et 240 personnes kidnappées dont le plus jeune, toujours détenu, avait alors 9 mois.
Mardi soir à Davos (Suisse) où se tient la réunion annuelle du Forum économique mondial, le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani a déploré « un développement dangereux qui sape la relation solide entre l’Irak et l’Iran », dans des propos rapportés par l’agence de presse officielle Ina.
Tard lundi, les Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique, ont mené une attaque dans la périphérie d’Erbil, capitale de la région du Kurdistan irakien.
Selon l’agence iranienne Irna, des missiles balistiques ont détruit « un quartier général » d’où opéreraient, selon Téhéran, les services de renseignement d’Israël.
A Bagdad, le ministère des Affaires étrangères a dénoncé « une agression visant la souveraineté de l’Irak et la sécurité de son peuple ».
Il a convoqué le chargé d’affaires iranien pour lui remettre une « missive de protestation » et rappelé son ambassadeur à Téhéran « pour consultations ».
L’Irak est déjà aspiré par les tensions provoquées par la guerre à Gaza et qui font craindre un embrasement régional.
Bagdad, grand allié de Téhéran mais également partenaire des Etats-Unis, doit se livrer à un exercice d’équilibriste : des groupes armés pro-Iran enchaînent les attaques contre les soldats américains déployés en Irak et en Syrie.
Parmi les morts des frappes à Erbil figurent un magnat de l’immobilier, également à la tête d’une compagnie active dans le secteur des hydrocarbures et de la sécurité privée, Peshraw Dizayee, et d’autres membres de sa famille : leur domicile a été directement frappé.
Dans la nuit, les Gardiens de la Révolution avaient dit avoir détruit un des principaux quartiers généraux « des espions du régime sioniste (Mossad) », selon Irna.
Le conseiller irakien à la sécurité nationale, Qassem al-Aaraji, a dénoncé des « allégations fausses » concernant « la présence d’un QG du Mossad (service de renseignement extérieur, ndlr) israélien » à Erbil. « Nous avons inspecté le lieu, visité chaque recoin de la maison. Tout indique qu’il s’agit de la maison d’un homme d’affaires ».
La diplomatie iranienne a elle assuré avoir mené une « opération précise et ciblée », jurant d’avoir « identifié » et « visé » les quartiers généraux des « criminels (…) en utilisant des armes de précision ».
Selon Irna, cette attaque répond aux récentes opérations d’élimination de commandants iraniens ou alliés, et les représailles des Gardiens de la Révolution « se poursuivront jusqu’à ce que soit vengée la dernière goutte du sang des martyrs ».
Le 2 janvier au Liban, une frappe avait tué le numéro deux du Hamas, Saleh al-Arouri, et six autres responsables et cadres du mouvement terroriste financé et soutenu par l’Iran. Quelques jours plus tard, Wissam Tawil, un haut responsable militaire du Hezbollah libanais, était tué. Le Hezbollah est aussi soutenu par l’Iran.
L’Iran, qui ne reconnaît pas l’existence d’Israël, se considère avec le pouvoir en Syrie, le Hezbollah libanais, le mouvement palestinien Hamas, des groupes irakiens et les rebelles yéménites Houthis comme faisant partie de « l’axe de la résistance » face à Israël au Moyen-Orient.
Fin décembre, Téhéran avait aussi accusé Israël d’avoir éliminé en Syrie le général de brigade Razi Moussavi, un important commandant de la Force Qods, unité d’élite des Gardiens chargée des opérations à l’étranger.
Si l’Irak criminalise tout contact avec Israël, des politiciens et hommes d’affaires à Erbil ont déjà été accusés d’entretenir des contacts avec ce pays. Mais la ligne officielle du Kurdistan dément tout rapport avec Israël.
Le Premier ministre du Kurdistan, Masrour Barzani, a rencontré mardi à Davos le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.
Le responsable irakien a fustigé « des attaques injustifiées et illégales », appelant la communauté internationale « à ne pas rester silencieuse », selon ses services.