Macron : « Les Juifs sont chez eux en France… pas les antisémites »
A l'occasion d'une réception avec la communauté française en Israël, le ministre de l'Économie souligne les valeurs communes à Jérusalem et Paris
Le ministre français de l’Economie Emmanuel Macron a entamé dimanche une visite de deux jours en Israël et dans les Territoires palestiniens, sur fond de polémiques sur le boycott d’Israël et sur les produits fabriqués en Cisjordanie.
Bien que la France étiquette les produits fabriqués en Cisjordanie, suivant la législation européenne, elle s’oppose néanmoins à tout boycott.
Le BDS a été condamné à de nombreuses reprises par le gouvernement français. Le boycott d’Israël est illégal en France a ainsi rappelé le ministre de l’Économie français à l’occasion de son voyage en Israël. Il a d’autre part encouragé les entreprises françaises à investir en Israël et à travailler avec des entreprises israéliennes.
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Macron, également ministre de l’Industrie et du Numérique, doit s’exprimer mardi à Tel Aviv au « festival de l’innovation et du numérique », point de convergence annuel des start-ups israéliennes et des investisseurs mondiaux auquel 150 entreprises françaises doivent participer.
Une cinquantaine de dirigeants d’entreprises, d’institutions ou de grandes écoles accompagnent M. Macron lors de cette visite qui vise en partie à dynamiser les partenariats avec la « start-up nation », surnom d’Israël, deuxième pôle d’innovation au monde derrière la Silicon Valley américaine.
Macron a rencontré les ministres israéliens de l’Economie Aryeh Deri et de l’Energie Yuval Steinitz, et visité des incubateurs et des entreprises.
Les ministres de l’Économie français et israélien ont évoqué ensemble la volonté de développer différents partenariats dans le domaine économique entre les deux pays notamment dans les domaines de l’innovation et de la recherche.
En Cisjordanie, il sera reçu lundi à Ramallah par le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et inaugurera la zone industrielle de Bethléem. Cette visite dans les Territoires intervient avant la tenue le 10 septembre à Paris du séminaire intergouvernemental franco-palestinien.
Une réception avec la communauté française en Israël a eu lieu en fin de journée le dimanche au Collège-Lycée Franco-israélien Raymond Leven (Mikvé Israel, Holon).
A l’occasion de cette rencontre avec la communauté franco-israélienne, le ministre a tenu à rappeler l’attachement indispensable de ces Français qui ont fait le choix de vivre en Israël.
Son intervention a commencé par une anecdote à propos du Général Caffarelli du Falga. Ce dernier tombé à Saint-Jean d’Acre, sera enterré sur place avec l’approbation de l’empereur Napoléon : « on peut l’enterrer à Saint-Jean d’Acre parce qu’il a gardé un pied en France ». Le général Caffarelli du Falga avait en effet perdu sa jambe dans la bataille de la Sambre.
Selon les propos du ministre, cette anecdote illustre cette relation complexe des Franco-israéliens.
Vivre en Israël ne signifie par couper les ponts avec le pays d’origine. Bien au contraire, les Franco-israéliens ont une double culture qu’il faut entretenir, chérir et qui constitue un véritable défi. Le lien avec la France doit rester vivace par-delà la distance, explique-t-il.
Pour Emmanuel Macron ce lien est d’autant plus simple à perpétuer du fait du partage de valeurs communes entre Israël et la France. Ces valeurs sont l’universalité et la dignité.
Cette universalité s’observe dans les rues de Jérusalem, souligne le ministre de l’économie, toutes les cultures habitent cette ville millénaire. Il précise qu’aussi bien la France qu’Israël aspirent à représenter beaucoup plus grâce à leurs valeurs universelles.
Quant à la dignité, elle s’observe par le respect de l’être humain.
En visite, plus tôt dans la journée au mémorial de la Shoah à Yad Vashem, le ministre tient à mesurer ce qui a touché le peuple juif pendant la Seconde Guerre mondiale : « quand l’homme oublie la dignité, il peut faire les pires choses ».
Selon ses propos, à la lumière de la Shoah, il faut tirer les conséquences des événements récents, dans lesquels des dizaines de réfugiés ont perdu la vie dans des conditions inhumaines.
Malgré les problèmes logistiques que l’accueil massif des réfugiés engendre, c’est cette valeur de dignité qu’il est important de garder en tête. Pour M. Macron, c’est ce nouveau défi qu’il faut prendre en compte à la lumière de la Shoah.
Dans son allocution, le ministre a également mis en lumière l’implication de la France vis-à-vis des différents enjeux diplomatiques auxquels Israël doit faire face. Le ministre parle de « destins liés » entre les deux pays.
La France se préoccupe de cette région, ainsi la politique française n’a de cesse de prendre en considération l’avenir des citoyens israéliens.
Cette préoccupation française s’est notamment manifestée à l’occasion de l’accord sur le nucléaire iranien ou Laurent Fabius a joué un rôle « d’équilibriste », tout en adoptant une position tranchée pendant les négociations.
Bien que le ministre approuve cette volonté de normalisation avec l’Iran, il n’en oublie pas pour autant l’exigence de sécurité qu’un tel accord doit prendre en considération.
Il rappelle également la sévérité dont a su faire preuve François Hollande envers la Syrie dès le début de son mandat. Macron parle de responsabilité diplomatique vis-à-vis du Proche-Orient : « toute la région est au coeur de la diplomatie française ».
Le ministre a déclaré que si la France a bien un rôle important au-delà de ses frontières, elle n’en oublie pas pour autant sa responsabilité envers ses propres citoyens.
Ainsi le ministre a tenu à rappeler le rôle de la France envers la communauté juive de France. Il a fait référence à toutes les victimes juives qui sont tombées depuis 2012 à cause du terrorisme.
Il se veut aussi ferme que le président de la République, François Hollande, et que le Premier ministre, Manuel Valls, en insistant : « Les Juifs sont chez eux en France, ceux qui ne sont pas chez eux, ce sont les antisémites. La France ne serait pas ce qu’elle est sans les Juifs de France ».
Ainsi, cet hiver 10 000 militaires ont été déployés sur le territoires français pour protéger les lieux de cultes juifs, les écoles et autres bâtiments communautaires. Cette politique vise à rassurer la communauté juive afin qu’elle se sente en sécurité – et prise en compte – par la politique française.
Cette protection a vocation à durer tant que la menace persiste. Emmanuel Macron a mentionné qu’en avril dernier, un plan d’action avait été présenté par Manuel Valls pour renforcer la présence policière.
Enfin, le ministre rend hommage à tous ces hommes et femmes qui ont fait le choix de l’alyah.
Cette immigration des juifs français est respectée et reconnue par les institutions françaises comme une décision libre, approuve-t-il. « La seule mauvaise décision, ce serait celle dictée par la peur, parce que cela voudrait dire que nous n’avons pas été à la hauteur » a rappelé le plus jeune ministre du gouvernement français.
En s’adressant aux olims français, il explique que finalement : « Vous avez fait le choix d’avoir deux territoires. La France est encore votre maison. »
C’est pour rendre ce lien dynamique qu’il faut développer les partenariats entre les deux pays notamment en encourageant le secteur privé à travailler avec le secteur public pour créer de la vitalité économique, argumente-t-il.
Selon lui, il reste des relations à développer notamment dans l’innovation, dans la création d’entreprises et de start-ups.
Pour illustrer cette volonté de créer un pont entre les deux pays, un accord important a été signé, dimanche, entre le Technion de Haïfa et l’école Polytechnique de Paris afin de mutualiser le transfert de technologies entre les deux structures dévoile le ministre avec enthousiasme.
Créer plus de projets en partenariat pour construire des liens concrets et une vitalité économique constituent les objectifs du ministre de l’économie. Il souhaite créer des liens entre les peuples via les échanges économiques.
Il salue toutes les initiatives de collaboration dans le domaine, notamment le partenariat entre la ville de Tel Aviv et la ville de Paris qui avait pourtant fait l’objet de polémiques « ridicules » selon ses termes. Il fait ainsi référence au projet de #TelAvivSurSeine organisé par la ville de Paris.
Il tient également à saluer les efforts de la France qui continue à accompagner les Français qui viennent vivre en Israël : notamment avec la reconnaissance des diplômes et les aides proposées pour trouver des emplois.
En conclusion, Emmanuel Macron rapporte des « nouvelles du pays ». La France mène des réformes importantes pour moderniser le pays. Il revient sur les avantages sociaux de la France tout en évoquant sa « rigidité » et une forme de « conservatisme » à la française. L’idée est d’inventer une nouvelle forme de réussite par de nouvelles réformes.
Cette stratégie économique passe par des mesures simples mais qui peuvent être difficiles à mettre en place reconnaît Emmanuel Macron. Selon le ministre, la France doit :
– réduire la dépense publique
– accroître la compétitivité des entreprises
– moderniser son économie
La France a besoin d’un nouveau dynamisme, inspiré notamment par Israël car Israël a une capacité extraordinaire à prendre des risques. Ce qui est aujourd’hui nécessaire pour la France.
Le ministre ironise en expliquant que la France rencontre deux problèmes paradoxaux : en France il n’y a pas de droit à l’erreur mais en contrepartie il ne faut pas trop réussir car la réussite est mal vue.
Cette réussite est tellement source de polémique que la France est devenue maître dans l’art de la taxation : « Nous sommes à la frontière technologique de la taxation en France. Nous avons inventé toutes les taxes possibles. »
Mais l’envie française est comparable à celle israélienne, conclut-il.
Samedi dernier Emmanuel Macron a rencontré Shimon Peres à Milan. A l’occasion de cette rencontre l’ancien président d’israël lui a demandé son âge avant d’ajouter : « il faut toujours regarder le nombre de choses qu’on a réalisé, puis il faut regarder le nombre de rêves qu’on a. Si le nombre de rêves qu’on a reste plus important que le nombre de choses qu’on a réalisé, c’est qu’on est jeune »
Ainsi le ministre de l’Économie conclut : « En France comme en Israël, ensemble on est jeune. »
AFP a contribué à cet article
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