Mort d’un éminent expert juif en psychologie à l’âge de 86 ans
Reuben Baron, co-auteur de l'article le plus cité de toute l'Histoire de la psychologie, laisse également le souvenir d'un critique d'art et d'un homme profondément spirituel
JTA — Reuben Baron était un homme tenace.
Expert en psychologie sociale au sein de l’université du Connecticut, lui et son collègue David Kennu avaient soumis leur article sur les méthodes statistiques en sciences sociales aux deux journaux les plus lus de leur domaine. Tous deux l’avaient refusé. Ils s’étaient alors tournés vers le Journal of Personality and Social Psychology qui avait finalement accepté – quoique avec réticence – de publier l’article en 1986.
Trente-sept ans plus tard, cet article, « la distinction entre variable modératrice et variable médiatrice dans la recherche psycho-sociale, » reste le plus cité dans toute l’histoire de la psychologie. D’autres ouvrages y font référence pas moins de 120 000 fois, soit plus de 3 000 fois par an depuis sa publication.
Même ses critiques ont noté son influence, un analyste qualifiant l’article de « si connu qu’il a été utilisé par les auteurs et réclamé presque par réflexe par les évaluateurs. »
Baron, professeur émérite à l’UConn et qui, après sa retraite, s’était installé à Cliffside Park, dans le New Jersey, s’est éteint dimanche des suites de la maladie d’Alzheimer. Il était âgé de 86 ans.
En plus de son travail réalisé dans la perception sociale et dans la cognition sociale, il était aussi critique d’art et collectionneur et il avait écrit des dizaines d’articles pour le journal en ligne artcritical.com avec son épouse et co-autrice, Joan Boykoff Baron. Le couple organisait également une conférence annuelle consacrée à l’art au sein de la Congrégation Beth Sholom, une synagogue de Teaneck, dans le New Jersey – ce qui avait été l’occasion de présenter des personnalités majeures comme Eva Heiss, peintre et sculptrice, comme l’artiste environnementale Mierle Laderman Ukeleset Steve Reich, compositeur et lauréat du prix Pulitzer.
La procédure Baron-Kenny cherchait à apporter une nouvelle rigueur statistique dans l’établissement des causes et des effets (par exemple, en déterminant clairement pourquoi l’exercice améliore le bien-être ou pourquoi le statut socioéconomique affecte les capacités de lecture chez l’enfant). Mais Baron était aussi un homme profondément spirituel, actif au sein de sa synagogue et dévoué à ce que son fils, Jonathan Baron, qualifie de « service du cœur ».
« Ce serait une énorme erreur de dire que mon père n’était pas religieux », a déclaré Jonathan lors des funérailles de son père dans le New Jersey, lundi. « Mon père et ma mère ont toujours été et ils restent les personnes les plus frummest [religieuses] que j’ai pu rencontrer s’agissant de la nécessité d’être… scrupuleusement honnête dans les affaires, de toujours donner plus à la tzedakah [charité] et d’aider les gens dans le besoin de si nombreuses façons qu’il est pas impossible de les compter. »
Joan, le veuve de Reuben, a déclaré que pour un scientifique spécialiste des sciences sociales dont les travaux étaient ancrés dans les statistiques, feu son époux avait également la sensibilité d’un poète. Lorsque le couple s’était rencontré à l’université du Michigan, en 1963, dans le cadre d’un rendez-vous arrangé, ses premiers cadeaux avaient notamment compris des volumes de poésie écrits par Allen Ginsberg et par Charles Baudelaire.
Il laisse derrière lui son épouse, ses fils Michael, Jonathan et leurs épouses ainsi que sept petits-enfants.
Baron était né le 1er août 1936 à Brooklyn et il avait grandi à Crown Heights. Il avait fréquenté la P.S. 161 et la Samuel J. Tilden High School. Il avait organisé sa bar mitzvah au Temple Petach Tikvah, uns synagogue aujourd’hui disparue de Crown Heights. Après des études au Brooklyn College, il avait obtenu son doctorat en psychologie à l’université de New York. il avait publié plus de cent artistes dans des domaines et sous-domaines variés de la psychologie.
Malgré la renommée extrême de sa méthode, son fils Michael a déclaré que son père aurait voulu laisser le souvenir d’un mentor ayant eu « un palmarès remarquable en matière de soutien des étudiants pendant la rédaction de leur thèse ».
« C’est si rare dans le milieu universitaire », a ajouté Michael. « Voir des étudiants passer des heures dans le bureau d’un professeur, simplement pour partager des idées et pour s’encourager ».