Nasrallah, principal ennemi au Nord et pire problème du Liban, affirme Gantz
Évoquant l'explosion à Beyrouth, le ministre de la Défense avance que le stockage d'armes en zones civiles complique la lutte contre le Hezbollah et la présence iranienne en Syrie
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.

Lundi, le ministre de la Défense Benny Gantz a averti que la prochaine guerre d’Israël contre le Hezbollah serait plus difficile, compte tenu du fait que le groupe terroriste entrepose des armes dans des zones civiles.
« Nous avons assisté à la catastrophe survenue au Liban [la semaine dernière]. Imaginez-vous si elle avait été démultipliée par les caches d’armes du Hezbollah, qui se trouvent dans chaque ville et village libanais », a déclaré Gantz à l’influente Commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset.
L’explosion massive de mercredi dernier au port de Beyrouth a causé plus de 160 morts et fait des milliers de blessés.
Bien que l’enquête approfondie sur l’incident soit en cours, les premiers rapports libanais indiquent que l’explosion principale a été déclenchée par un incendie et une déflagration mineurs qui ont provoqué l’explosion de quelque 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium, soit plus de 1 000 fois la quantité utilisée en 1995 lors de l’attentat à la bombe d’Oklahoma City.

Le ministre de la Défense a déclaré que le procédé du Hezbollah de conserver des armes dans des foyers civils présentait un risque pour les citoyens libanais et un défi pour l’armée israélienne, qui considère le groupe terroriste comme son principal ennemi militaire dans la région.

« [Le chef du Hezbollah Hassan] Nasrallah est sans doute notre plus grand ennemi au nord, mais il est surtout le plus gros problème du Liban au Liban », a déclaré Gantz.
« Au Liban, dans les maisons, il y a une chambre d’amis et une salle de missiles – dans la même maison ! Si ce missile explose, la chambre d’amis ne sera pas épargnée et la société civile libanaise le paiera très cher. En tant que réseau de sécurité, nous combattons des ennemis qui accumulent des armes et opèrent dans un environnement civil. Si nous n’avons pas d’autre choix que de combattre, les conséquences seront dramatiques », a déclaré le ministre.
Gantz a prononcé ces remarques à l’ouverture de la réunion de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense sur le traçage controversé des mouvements des citoyens israéliens par le service de sécurité du Shin Bet via la localisation de leur téléphone portable et autres données numériques, dans le cadre de la lutte du gouvernement contre la pandémie de coronavirus. Cette discussion sur l’extension de ce programme de surveillance n’a pas été ouverte au public.

Dans son discours, le ministre de la Défense a également évoqué la possibilité de permettre aux Palestiniens de la bande de Gaza de venir travailler en Israël, sur fond d’escalade des tensions entre Israël et le groupe terroriste du Hamas au pouvoir à Gaza. Ces derniers jours, une recrudescence des violences depuis l’enclave a été constatée, dont une attaque à la roquette la semaine dernière, des lancements quotidiens de ballons incendiaires et explosifs, et des tirs de roquettes ce lundi vers la Méditerranée.
« Nous n’avons d’autre intérêt à Gaza que le calme absolu et le retour des garçons », a déclaré Gantz, faisant référence aux corps de deux soldats israéliens et à deux civils israéliens vivants détenus par le Hamas à Gaza.
« Nous serions heureux de voir Gaza s’épanouir, je serais ravi que des travailleurs viennent de la bande de Gaza. Cela peut arriver, mais à une condition – que les garçons soient renvoyés chez eux. Quand cela se produira, nous pourrons ouvrir la bande de Gaza », a-t-il déclaré.
Dans le passé, l’opposition du Shin Bet a restreint les projets d’autoriser les Gazaouis à travailler en Israël, par crainte que ces déplacements ne soient utilisés par des groupes terroristes de Gaza pour mener des attaques en Israël, transférer des armes, et transmettre des messages entre terroristes de Gaza, d’Israël et de Cisjordanie.

Gantz a ajouté qu’Israël continuait de lutter contre les efforts de l’Iran d’établir une présence militaire permanente en Syrie et s’efforçait de contrer son programme nucléaire.
« L’Iran continue ses recherches pour obtenir des [armes] nucléaires, l’Iran continue de déstabliser la région. L’Iran a des milliers de vassaux en Syrie, au Yémen, dans les pays africains. Il a des cellules en Europe et dans d’autres pays du monde. Nous ne pouvons et ne devons pas l’ignorer. Nous ne devons pas ignorer ses efforts nucléaires et son impact négatif sur le Moyen-Orient », a-t-il déclaré.
« Cette pression continuelle sur l’Iran et le maintien de l’embargo [sur les armes] contre l’Iran sont essentiels. L’Iran souhaite ouvrir une zone franche terroriste en Syrie, et nous devons à tout prix empêcher l’ouverture de cette zone franche. Nous opérons en Syrie et dans d’autres endroits de la région en permanence et avec toutes sortes de méthodes, et nous continuerons à le faire », a déclaré Gantz.
Évoquant son différend politique en cours avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu au sujet du budget du pays, Gantz a affirmé que le gouvernement devait approuver le financement de la défense afin de permettre à l’armée de mettre en œuvre son plan « Momentum » pluriannuel qui doit orienter l’action militaire des cinq prochaines années.

Gantz exige que le gouvernement adopte un budget de deux ans – comme convenu dans l’accord de coalition entre son parti et le Likud de Netanyahu – tandis que le Premier ministre réclame un budget d’un an – officiellement en raison de l’incertitude provoquée par la pandémie de coronavirus, mais la majorité des analystes en Israël y voient un stratagème politique pour éviter de devoir transmettre à Gantz le mandat de Premier ministre l’année prochaine.
« Nous devons permettre la réalisation du plan pluriannuel Momentum. Ne pas approuver le plan pluriannuel de l’armée serait une terrible incompétence », affirme Gantz.
Gantz a également critiqué l’absence d’un véritable service militaire universel en Israël. Ces dernières années, le taux de conscription du pays a oscillé autour de 50 %. En effet, les Arabes israéliens, les Israéliens ultra-orthodoxes et – généralement – les femmes religieuses israéliennes ne sont pas enrôlés dans l’armée, ainsi qu’un nombre d’hommes, petit certes mais pas négligeable, exemptés pour raisons médicales et socio-économiques.
« En pratique, environ la moitié de la population israélienne sert dans l’armée. Ce n’est plus acceptable, et nous devons procéder à une vaste réforme en trois volets – nous devons considérer le problème du raccourcissement du service qui risque de provoquer un manque [de main-d’œuvre] de l’armée ; aborder la question de la loi sur la conscription, comme l’exige la Haute cour de Justice ; et – surtout – réformer le service militaire pour en faire un service national et d’État », a-t-il déclaré.
Gantz faisait référence au passage du service militaire obligatoire de 36 mois pour les hommes, comme c’était le cas jusqu’en 2015, à 32 mois de 2015 au mois dernier, et dorénavant à 30 mois – ce qui, selon l’armée israélienne, aura un impact négatif profond sur ses ressources humaines.

Le ministre de la Défense a déclaré que, bien qu’il considère le service militaire comme de la plus haute importance, il pensait néanmoins que les Israéliens pouvaient servir leur pays en tant que pompiers, policiers et autres institutions de service à la communauté.
La loi sur la conscription israélienne est un sujet conflictuel entre les politiciens israéliens depuis près d’une décennie, depuis que la Haute cour de Justice a statué qu’une loi antérieure qui accorde à tous les hommes ultra-orthodoxes une exemption générale était injuste et contraire aux lois fondamentales. Depuis lors, plusieurs coalitions gouvernementales ont essayé de créer une nouvelle législation qui répondrait aux exigences d’égalité de la cour tout en maintenant le statu quo des exemptions pour la population ultra-orthodoxe du pays.
« J’espère que nous parviendrons à adopter une loi sur la conscription, comme nous en avons convenu avec nos partenaires de la coalition », a déclaré Gantz, faisant allusion à son différend actuel avec Netanyahu. « S’il n’y a pas de Knesset et pas de gouvernement, il n’y aura pas de loi sur la conscription. Ce serait vraiment dommage de rater l’occasion qui s’offre à nous. »