Netanyahu ment dans le cadre de l’assassinat de Rabin, disent d’ex-chefs du Shin Bet
De nombreux anciens agents et autres responsables des services de sécurité déplorent la promotion de théories du complot sur le sujet dans l'autobiographie du Premier ministre
Ce sont des centaines d’anciens agents du Shin Bet, avec parmi eux des responsables à la retraite de cette institution sécuritaire de premier plan, qui ont envoyé une lettre au Premier ministre Benjamin Netanyahu dans laquelle ils l’accusent de promouvoir des théories du complot concernant l’assassinat, en 1995, de son prédécesseur Yitzhak Rabin.
Dans le courrier, rédigé le mois dernier, les anciens agents critiquent Netanyahu qui, de son côté, met en cause le Shin Bet dans son autobiographie en affirmant qu’il avait pris part aux incitations au meurtre et à la violence contre Rabin avant son assassinat dramatique en 1995, ont indiqué dimanche les médias israéliens. Ils demandent au Premier ministre de retirer ses écrits à ce sujet, des écrits qui apparaissent dans son récent ouvrage.
Le livre de Netanyahu, « Bibi: My Story, » sorti en librairie à l’automne, entre dans le détail de la carrière militaire et politique du Premier ministre. Netanyahu y affirme notamment qu’Avishai Raviv, agent provocateur de l’extrême-droite, avait été chargé de faire monter la colère du public israélien de droite contre Rabin à l’aide d’affiches publiées par le Shin Bet.
Dans son ouvrage, Netanyahu fait spécifiquement référence à une manifestation qui avait eu lieu à Jérusalem un mois avant le meurtre du Premier ministre de l’époque – une manifestation lors de laquelle il avait pris la parole devant des manifestants brandissant des affiches montrant feu Rabin vêtu de l’uniforme nazi.
Cette manifestation avait été considérée comme un tournant dans les incitations au meurtre et à la violence qui avaient précédé l’assassinat du leader d’Avoda et Netanyahu avait été accusé d’avoir tenu un rôle majeur dans ces incitations.
La lettre écrite par les responsables du Shin Bet affirme que l’ouvrage écrit par Netanyahu contient « des distorsions et des mensonges » et que ses accusations « nuisent à la légitimité des services secrets, portant préjudice à la sécurité nationale ».
« Nous avons gardé le silence pendant 28 ans. Netanyahu doit se rétracter. Il doit dire : ‘J’ai fait une erreur’, » dit la lettre.
Parmi les signataires, cinq anciens chefs du Shin Bet et notamment Nadav Argaman, qui vient de prendre sa retraite.
Rabin avait été assassiné en date du 4 novembre 1995 par Yigal Amir, un extrémiste juif qui était opposé aux Accords d’Oslo et à la perspective de confier aux Palestiniens le contrôle de certains pans de la Cisjordanie dans le cadre de cet accord de paix historique.
Amir avait mortellement touché Rabin à la fin d’un rassemblement massif pour la paix à Tel Aviv, qui avait été organisé pour souligner l’opposition à la violence et pour démontrer le soutien apporté par le public israélien à ses efforts de négociations avec les Palestiniens.
Raviv, l’agent du Shin Bet, avait été en contact avec Amir avant le meurtre. Au début de l’année, au cours d’un rare entretien, il avait accusé Netanyahu de mentir dans son autobiographie. Le Premier ministre avait affirmé avoir vu Raviv brandir l’affiche de triste mémoire où Rabin apparaissait en nazi parmi des centaines de manifestants.
Un homme ultra-orthodoxe qui était un adolescent à l’époque avait avoué avoir créé l’affiche et il avait été ultérieurement condamné. Dans une interview accordée sous couvert d’anonymat, l’année dernière, il avait reconnu avoir imprimé quelques copies du poster en petite taille, qu’il était impossible que Netanyahu ait pu apercevoir depuis le balcon où il se tenait.