Netanyahu promet de faire avancer cette semaine des éléments de sa refonte judiciaire
Lors d'une réunion de son cabinet, le Premier ministre a accusé Lapid et Gantz de "jouer" et de chercher à "perdre du temps" en gelant les négociations
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé, dimanche matin, que son gouvernement commencerait à faire avancer cette semaine certains éléments du plan de réforme du système judiciaire gouvernemental de manière unilatérale – une annonce faite quelques jours après que l’opposition a déclaré qu’elle suspendait sa participation aux négociations visant à trouver un compromis.
« La semaine dernière, il a été prouvé que [Benny] Gantz et [Yair] Lapid jouent avec nous », a dit Netanyahu, des propos tenus lors du début de la réunion du cabinet à Jérusalem. « Cette présentation de soi-disant ‘négociations’ n’était pas bonne ».
Netanyahu a indiqué que le gouvernement « leur a donné au mois, puis un mois de plus, et encore un mois de plus – et leurs représentants n’ont jamais convenu d’un accord, aussi minimaliste soit-il. Leur intention était de gagner du temps et de perdre du temps ».
Le Premier ministre a ajouté que « dans la mesure où la vaste majorité du public a compris, aujourd’hui, que nous devons procéder à des changements dans le système judiciaire, nous allons nous rencontrer cette semaine et nous entreprendrons des initiatives pratiques de façon mesurée et responsable – mais conformément au mandat qui nous a été donné » par les électeurs.
Lapid a riposté que « si Netanyahu fait avancer de manière unilatérale son plan de coup d’État, comme il a dit vouloir le faire, il va rapidement découvrir qu’il est le Premier ministre de moins de la moitié de la population israélienne, avec moins de la moitié des acteurs économiques, avec moins de la moitié de l’establishment chargé de la sécurité et avec moins de la moitié des membres de la Knesset ».
La cheffe du parti Avoda, Merav Michaeli – dont la faction s’était retirée des discussions de compromis quelques semaines après leur coup d’envoi – a estimé que les paroles prononcées par Netanyahu étaient la preuve que continuer les négociations était inutile : « Il est temps d’intensifier la lutte – les manifestations seulement arrêteront le coup d’État ».
Au mois de mars, après l’avancée rapide d’un projet de loi déterminant dans le cadre du plan de refonte judiciaire à la Knesset, au début de l’année, Netanyahu avait fait savoir qu’il allait mettre en pause le projet de réforme afin de permettre le lancement de négociations placées sous les auspices du président Isaac Herzog, des pourparlers qui visaient à trouver un large compromis.
La semaine dernière, Gantz et Lapid ont annoncé qu’ils se retiraient temporairement des pourparlers après la tentative vaine de Netanyahu de torpiller un vote au Parlement qui visait à désigner deux députés au sein de la Commission de sélection judiciaire qui est chargée de nommer les juges dans le pays – empêchant le panel de se réunir pendant encore au moins un mois. Si Netanyahu avait cherché à ce que les membres de la coalition ne votent pour aucun des deux candidats alors en lice dans ce scrutin, certains législateurs s’étaient révoltés et ils avaient accordé leur suffrage à la candidate de l’opposition, qui a finalement été élue au sein de la Commission. Mais le vote désignant le deuxième représentant a été repoussé en conséquence, ce qui empêche toute convocation du panel.
Le ministre de la Justice Yariv Levin, l’artisan du plan de refonte du système israélien de la justice, a par ailleurs indiqué qu’il ne permettrait pas à la Commission de se réunir avant que sa composition n’ait été changée, malgré les 80 postes de magistrats qui restent vacants dans un contexte de surchauffe du système judiciaire.
Le projet de loi concernant la constitution du panel est prêt à être adopté et prêt à être présenté pour ses deux dernières lectures consécutives à la Knesset, presque sans préavis. Toutefois, un tel passage à l’acte entraînerait presque certainement une reprise du mouvement massif des opposants aux réformes.
Levin a fait savoir, vendredi, qu’il était « plus déterminé que jamais à faire tout ce qui est mon pouvoir pour adopter la réforme qui est nécessaire pour corriger les failles du système de la justice ».
Les responsables du Likud ont indiqué, ces derniers jours, que la coalition pourrait faire avancer des éléments moins clivants du plan – comme la limitation de la notion juridique de « raisonnabilité » lors du réexamen, par les juges, des lois et des décisions gouvernementales.
Les observateurs déclarent que Netanyahu subit des pressions en interne, de la part de Levin et d’autres, sur le manque de progrès du plan de réforme dans un contexte de négociations dans l’impasse. Et pourtant, le Premier ministre s’inquiéterait à l’idée de remettre sur le devant de la scène des législations très controversées qui lui attireront les condamnations du président américain Joe Biden, dont il espère une invitation à la Maison Blanche.
Certains, au Likud, commencent à perdre patience. Miki Zohar, ministre de la Culture et des Sports et proche de Netanyahu, a estimé vendredi qu’il était temps que la coalition fasse approuver au moins certaines parties de la réforme.
S’exprimant devant les caméras de la Douzième chaîne, Zohar a indiqué croire que « Netanyahu désire – il comprend d’ailleurs que c’est possible – pouvoir commencer à faire avancer de manière unilatérale certains pans de la réforme. Pas tout d’un seul coup à ce moment précis… Une chose après l’autre. Nous avons un long mandat. Les éléments qui font l’objet d’un consensus doivent être immédiatement adoptés. Ceux qui sont plus controversés – nous devons continuer à tenter d’en discuter ».
Zohar a averti que si la coalition devait avoir le sentiment que le plan de refonte du système judiciaire israélien était mis de côté, « il n’y aura pas que la démission de Yariv Levin. Il y aura des démissions en masse au sein du cabinet ».
« Tous ceux qui pensent que ce mandat pourra se dérouler sans qu’il y ait des amendements et des changements effectués dans le système judiciaire se trompent », a-t-il continué.
Certains députés du Likud sont clairement frustrés face au projet de réforme du système de la justice et de sa gestion par le gouvernement – avec pour preuve le vote à bulletin secret qui a visé à nommer les représentants du parlement au sein de la Commission de sélection judiciaire.
Elharrar avait été élue avec 58 voix « Pour » et 56 voix « Contre », ce qui avait signifié qu’au moins quatre membres de la coalition au pouvoir avaient voté pour elle.
De hauts-responsables du Likud ont fait part de leur opposition au projet de réforme radicale du système judiciaire israélien ces derniers jours, affirmant que l’initiative faisait perdre au parti le soutien du public et qu’elle avait écarté d’autres problématiques déterminantes de l’ordre du jour, a indiqué mercredi soir le quotidien Haaretz.
« De plus en plus de ministres et de députés de la coalition demandent à Netanyahu de s’éloigner à la fois des réformes et de Yariv Levin », avait confié un parlementaire issu de la coalition à Haaretz.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.