Nevo Katz : La loi sur le service militaire haredi sera adoptée « avec ou sans » Edelstein
Des propos qui laissent penser que le Premier ministre pourrait envisager de contourner ou de renvoyer le chef de la commission des Affaires étrangères et de la Défense qui annonce, de son côté, que la rédaction de la version finale de la loi va commencer

Un proche collaborateur du Premier ministre Benjamin Netanyahu a indiqué à des représentants de la communauté ultra-orthodoxe que le gouvernement avait l’intention d’adopter un projet de loi très controversé sur l’exemption de service militaire des jeunes hommes haredim « avec ou sans » le président de la commission des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset, Yuli Edelstein, d’après des enregistrements qui ont été rendus publics dans la journée de mercredi.
Des propos qui ont été tenus par Nevo Katz, un conseiller du Premier ministre, devant des représentants ultra-orthodoxes dont l’identité n’a pas été révélée, et qui semblent laisser entendre que Netanyahu pourrait envisager de démettre le député du Likud de ses fonctions, ou de contourner sa puissante commission.
Malgré les assurances qui ont été données par le chef de gouvernement à ses alliés haredim, la législation consacrée à l’exemption de service militaire des jeunes ultra-orthodoxes, qui est qualifiée par ses critiques de « loi de désertion », est depuis longtemps bloquée en commission, Edelstein s’étant engagé à « ne présenter qu’une véritable loi » sur le sujet « qui augmentera de manière significative la base de conscription de Tsahal ».
Les partenaires ultra-orthodoxes de la coalition de Netanyahu exercent des pressions en faveur de l’adoption d’une loi qui réglementerait les exemptions militaires qui sont accordées aux étudiants de yeshiva et à d’autres membres de la communauté haredi. La Haute Cour avait statué, au mois de juin de l’année dernière, que ce système d’exemption, qui est en place depuis des décennies, était illégal dans la mesure où il n’était pas inscrit dans la loi.
Dans l’enregistrement, qui a été diffusé par le site d’information Behadrei Haredim, Katz accuse Edelstein de ne pas coopérer avec le gouvernement sur la législation, et il semble rejeter les pressions exercées par le public en faveur d’un projet de loi qui comprendrait l’enrôlement, au sein de l’armée, des hommes Haredim.
« Le public national-religieux exerce une forte pression sur lui. Les nationaux-religieux disent quoi ?… Ils disent que les Haredim doivent s’enrôler, yada, yada, yada », dit Katz, ajoutant que le projet de loi « passera – avec ou sans lui ».

Interrogé au sujet de cet enregistrement, un porte-parole du bureau du Premier ministre a déclaré qu’il « ne ferait pas de commentaire sur le projet de loi ».
Dans un post qui a été écrit sur X, le porte-parole d’Edelstein, Maayan Samun, a fait savoir que « la seule pression que nous ressentons est celle des réservistes, des familles des combattants et des soldats de la réserve ».
« La seule loi sur la conscription qui sera défendue par la commission des Affaires étrangères et de la Défense sera une loi adaptée au réel, une loi correcte et efficace. Une loi qui recrutera des Haredim dans l’armée et qui allègera le fardeau de ceux qui font leur service », a-t-il poursuivi.
Une source de dissensions internes
Cela fait longtemps qu’Edelstein représente un obstacle dans le parcours menant à l’adoption de cette loi controversée. Il avait personnellement signé une déclaration de principe qui appelait à une mobilisation massive des hommes ultra-orthodoxes ainsi qu’à l’imposition de « sanctions personnelles et financières » à ceux qui se soustrayaient aux ordres d’incorporation.
Il a également explicitement indiqué qu’il ne ressentait pas l’obligation de se rallier au positionnement gouvernemental sur la question de l’enrôlement des jeunes hommes haredim, rejetant un plan qui avait été proposé par le ministre de la Défense, Israel Katz, qui prévoyait d’augmenter progressivement le nombre de recrues ultra-orthodoxes, d’année en année, jusqu’à ce qu’il atteigne 50 % de la cohorte d’enrôlement des membres de la communauté éligibles au service militaire, en 2032.
Selon les médias israéliens, Netanyahu avait rencontré Edelstein, au mois de janvier, pour le pousser à faire avancer la loi – et les proches du Premier ministre avaient informé Edelstein qu’il pourrait être remplacé à sa fonction de président de la commission s’il devait refuser de jouer le jeu.
A ce moment-là, un porte-parole d’Edelstein avait démenti toute menace proférée à l’encontre du député du Likud. Le mois suivant, il avait de nouveau rejeté, selon ses propres termes », les « théories du complot » qui laissaient entendre que la coalition pourrait transférer le dossier à une autre commission.
S’exprimant mercredi auprès du Times of Israel, une source issue de la coalition a déclaré que si l’option de créer une commission spéciale qui serait chargée de la problématique de l’enrôlement était bien « sur la table », Netanyahu « tentera, si possible, de l’éviter ».

Alors que les partis ultra-orthodoxes de la coalition ont lancé plusieurs ultimatums à Netanyahu concernant le projet de loi, aucun d’entre eux n’a vraiment été considéré comme sérieux – de sorte que le Premier ministre ne contournera Edelstein que « s’il y a un véritable ultimatum » qui serait susceptible d’entraîner l’effondrement de la coalition, a estimé la source. Elle a expliqué que le chef de gouvernement préférerait mettre Edelstein sur la touche, hésitant à le limoger de la présidence de la commission.
Si les partis haredim de la coalition ont reculé face aux ultimatums précédents, ils auraient discuté de la possibilité de lancer d’autres ultimatums à l’avenir.
Edelstein n’est pas le seul député du Likud à s’attirer les foudres de son parti en raison de son opposition à une législation avancée par la coalition. Le ministre des Communications, Shlomo Karhi, a demandé à plusieurs reprises la création d’une nouvelle « commission des médias » pour contourner la commission des Affaires économiques de la Knesset, dont le président, le député David Bitan, a bloqué une législation visant à fermer le service de radiodiffusion public Kan – un élément déterminant figurant dans le programme de réforme des médias prôné par Karhi.
Faire avancer le projet de loi
Prenant la parole devant les membres de sa commission dans la journée de mercredi – après les propos qui ont été tenus par Nevo Katz – Edelstein a annoncé qu’il continuera à écouter des témoignages et à examiner les données de base au cours de plusieurs sessions supplémentaires, avant de rédiger la version finale du projet de loi qui règlementera la conscription ultra-orthodoxe.
« Nous allons continuer à avoir des débats supplémentaires qui permettront de couvrir tous les éléments pertinents et d’entendre toutes les parties concernées, puis nous passerons à la rédaction du projet de loi », a-t-il annoncé, alors que les données du Bureau central des statistiques (CBS) – des données montrant que les juifs ultra-orthodoxes constituent actuellement près d’un quart de la cohorte annuelle d’hommes juifs de 18 ans en Israël qui sont enrôlés – étaient présentées aux députés.
Elles ont révélé que 24,4 % des 57 424 jeunes de 18 ans (un pourcentage qui correspond à 14 035 personnes) qui pourront être enrôlés cette année sont ultra-orthodoxes – un chiffre qui devrait passer à 27,2 % à l’horizon 2030.

Les objectifs ne sont pas atteints
L’armée a fait savoir qu’elle connaissait une pénurie de personnel et qu’elle avait actuellement besoin d’environ 12 000 nouveaux soldats, dont 7 000 seraient affectés dans les unités de combat.
Actuellement, environ 70 000 hommes haredim, âgés de 18 à 24 ans, répondent aux conditions requises pour effectuer leur service militaire – mais ils ne se sont pas enrôlés. L’armée israélienne a envoyé 18 915 ordres d’incorporation aux membres de la communauté ultra-orthodoxes, en plusieurs vagues, depuis le mois de juillet 2024. Mais, selon le lieutenant-colonel Avigdor Dickstein qui est le chef de la branche haredi de l’Administration du personnel de l’armée israélienne, seuls 232 de ceux qui ont reçu un ordre se sont enrôlés, dont 57 dans des rôles de combat.
Prenant la parole devant la commission d’Edelstein, mercredi, Dickstein a déclaré que malgré l’objectif visant à enrôler 4 800 hommes ultra-orthodoxes au cours du cycle de recrutement 2024-2025, seuls 1 721 d’entre eux avaient intégré l’armée jusqu’à présent.
« Nous nous sommes fixé un objectif de 4 800 et nous ne l’atteindrons pas. Il y a une tendance à la hausse, mais elle n’est pas suffisante et ne correspond pas aux besoins opérationnels très importants », a-t-il dit.