Ruines des Croisades : Dans les traces des moines et pèlerins combattants
Les vestiges du Royaume de Jérusalem au Moyen-Age, notamment des forteresses, des citadelles et autres sites de batailles, sont ouverts aux visiteurs
Lorsque le Pape Urbain II avait appelé en l’an 1095 des volontaires pour sauver la ville sainte de Jérusalem des mains de ses gouvernants musulmans, la réponse avait été fanatique – pour le moins.
En réalité, sa sainteté avait promis des récompenses fantastiques : de l’argent, des biens ainsi que des « indulgences »- une réduction des punitions des péchés dans l’au-delà. Mais c’était également la chance de sauver des lieux saints chrétiens des infidèles musulmans qui avait enflammé les imaginations des futurs combattants. Avec une conviction religieuse profonde et une ferveur immense, paysans et rois avaient pris le chemin de la terre sainte.
Arrivés dans la ville sainte de Jérusalem, ils s’attendaient à ce que les murs s’effondrent. En en faisant sept fois le tour, comme Josué de Jéricho, ils avaient constaté que les murs étaient encore bien en place. Et enfin, les croisés avaient donné l’assaut – et tué, sans miséricorde aucune, tous les Juifs et les musulmans qu’ils avaient rencontrés à l’intérieur.
Jérusalem était dorénavant devenue capitale du royaume des croisés et Godefroy de Bouillon — homme cruel et impitoyable – avait été élu comme son dirigeant.
La majorité de ceux qui avaient pris part à ces croisades avaient pris le chemin du retour.
Ceux qui étaient restés avaient commencé à former des fraternités pour défendre le nouveau royaume de Jérusalem (qui, finalement, s’était avéré être plus large que l’Etat d’Israël moderne) et pour assurer la sécurité sur les routes pour les pèlerins affluant dans la ville.
La première de ces sociétés avait été l’ordre de Saint-Jean à Jérusalem, un groupe de moines qui avait établi un hôpital en terre sainte avant les croisades. En 1099, en plus de leurs vœux religieux, ils avaient juré de défendre le royaume et de soigner les malades et les blessés (sans surprise, ils devaient devenir connus sous le nom d’ordre des hospitaliers).
Ensuite, ce sont neuf croisés qui s’étaient rassemblés pour fonder un second groupe de moines combattants. Ils s’étaient appelés les Templiers et ils avaient été invités par le gouvernant du royaume à établir leur siège au sein de la mosquée Al-Aqsa, sur le mont du Temple. L’ordre Teutonique, un troisième groupe de moines-soldats originaire d’Allemagne, n’avait fait son apparition qu’aux environs de 1190.
Les trois groupes devaient amasser des richesses extraordinaires mais les Templiers, à Akko, avaient créé le premier système bancaire moderne dans le monde.
Ces combattants pieux avaient dressé des douzaines de petites citadelles au-dessus des routes principales qui étaient empruntées par les pèlerins européens qui se rendaient à Jérusalem. Avec le temps, ces forteresses ont été incorporées dans de vastes châteaux.
Montfort
L’un des plus beaux était Montfort, qui avait commencé sous la forme d’une ferme fortifiée. Elle se situait sur une colline escarpée, au-dessus d’une vallée profonde, et elle était entourée d’arbres riches et verts toute l’année.
En l’an 1228, l’ordre teutonique avait acheté la ferme/forteresse et y avait installé son siège, y installant sa trésorerie et ses registres d’archives. Mais les lieux étaient encore exigus au vu des besoins de l’ordre et, avec l’aide de contributions venues d’Europe, les moines avaient complètement remodelé la structure, lui donnant un aspect européen. Le château qui avait résulté de cet ouvrage avait fini par inclure des tours massives, une immense salle à manger avec des fenêtres en vitraux, et une chapelle élégante. Montfort avait été transformé en l’un des plus beaux châteaux fortifiés du royaume des croisés.
Les envahisseurs Mamelukes avaient assiégé Montfort en 1226 mais ils s’étaient trouvés dans l’incapacité de pénétrer ses défenses. Lorsqu’ils étaient revenus, cinq ans plus tard, les soldats avaient creusé un tunnel sous le mur, au sud. Ils s’étaient introduits à l’intérieur et ils avaient pris le contrôle de la cour. Les croisés avaient d’abord résisté dans la forteresse mais ils s’étaient rapidement rendus à l’ennemi. Les Mamelukes avaient laissé la vie sauve aux croisés et leur avaient permis d’emmener leurs archives et leurs trésors à leur départ.
Latroun
Quand on évoque la forteresse de Latroun, on ne parle généralement pas du château qui avait été construit vers l’an 1130 par un comte espagnol et qui avait été confié aux Templiers.
On se souvient plutôt du commissariat fortifié qui avait été édifié par les Britanniques au début de leur mandat en Palestine. Connu par les Israéliens sous le nom de forteresse de Latroun, il devait jouer un rôle déterminant dans la guerre de l’Indépendance israélienne en 1948.
Situé stratégiquement au-dessus de la seule route qui, à l’époque, reliait la Jérusalem juive aux cités côtières, la forteresse de Latroun moderne avait été donnée aux Arabes lorsque les Britanniques avaient quitté le pays. Et malgré les attaques répétées et désespérées des troupes de la toute jeune armée israélienne, le site sera resté entre les mains des Arabes jusqu’à la guerre des Six jours de 1967.
Seules quelques ruines subsistent de la forteresse des croisés, appelée La Tour des Chevaliers – même si elle était restée pleinement opérationnelle jusqu’en l’an 1187. Mais, cette année-là, Saladin — chef militaire qui devait ultérieurement devenir empereur de la Syrie et d’Egypte – avait éreinté, constat sans appel, les forces croisés durant la bataille de Karney Hitin. Suite à cette réussite, Saladin avait conquis la plus grande partie du pays, notamment Latroun et Jérusalem. Au cours de la troisième croisade, qui avait eu lieu de l’an 1189 à l’an 1192, Saladin avait détruit la forteresse de Latroun.
Chastellet
Pendant plus de cent ans, on pensait qu’une deuxième citadelle des Templiers avait été tellement dévastée par les forces musulmanes que pas une seule pierre n’avait été épargnée. Et en effet, quand Saladin avait capturé la forteresse, il aurait, selon la croyance populaire, supervisé son anéantissement total. Toutefois, les archéologues ont découvert en 1993 des parties entières du mur extérieur qui entourait Chastellet, ainsi que des portions de la forteresse à l’intérieur.
Chastellet n’est que l’un des noms de la citadelle. En hébreu, elle s’appelle metzad (forteresse) Ateret ; et les Arabes locaux ont nommé le site a-atara. Les musulmans l’appelaient dans le passé Bayt al-Ahzan, ou maison du chagrin. Parce que, selon certaines traditions islamiques, c’est là que Jacob aurait appris que Joseph, son fils, avait été vendu à des marchands ambulants.
Avec le Château Neuf (également appelé Hunin et situé en Haute-Galilée), Chastellet devait garder les principales routes nord-orientales menant dans le pays pendant la période des croisades. Mais quelques mois seulement après la fin de son édification, en l’an 1177, les forces musulmanes de Saladin avaient pris d’assaut la citadelle.
Dans l’incapacité de la conquérir au cours d’une bataille frontale, les soldats avaient assiégé Chastellet et, en même temps, ils avaient creusé un tunnel sous sa tour principale, le remplissant de bois sec avant d’y mettre le feu. La tour s’était effondrée et les troupes musulmanes avaient pénétré dans le château. Avant de détruire Chastellet, les soldats avaient massacré ses 1 000 habitants et placé leurs dépouilles dans son réservoir d’eau.
La citadelle de Safed
Située au centre de la ville de Safed, en Galilée, il reste les vestiges bien conservés du plus grand château croisé de tout le Moyen-Orient. Il avait été construit sur des ruines juives, byzantines et musulmanes – des populations qui s’étaient affrontés à travers l’histoire pour prendre le contrôle de cette colline, qui permet de surveiller tout le nord de la Galilée.
Les croisés s’étaient emparés de la Galilée des mains des musulmans en l’an 1101 et les Templiers avaient dressé un fort sur le site, avant de l’abandonner lorsque Saladin avait fait le siège de Safed, en 1188. A leur retour, en 1240, les Templiers avaient construit une citadelle massive entourée de trois murs concentriques de défense.
Le général Mameluke Baibars avait assiégé Safed en 1266 mais il n’était pas parvenu à prendre la forteresse. Il avait offert à tous ceux qui se trouvaient dans le château la vie sauve en l’échange de leur reddition. Lorsque ces derniers s’étaient rendus, il les avait massacrés les uns après les autres.
Le château n’avait pas été détruit par les musulmans qui l’avaient utilisé pour eux-mêmes, mais il a été en partie démoli au cours d’un séisme, en 1837.
Ses fondations ont toutefois été préservées par les Britanniques, qui ont transformé ses larges salles en réservoir d’eau urbain.
Les vestiges qui restent font partie du Parc de la citadelle, une visite incontournable pour les touristes qui se rendent dans le secteur. En effet, la vue depuis le haut de la montagne est spectaculaire et elle permet d’apercevoir le lac de Tibériade.
Avant que l’Etat d’Israël ne soit fondé, les services juifs de renseignement avaient appris que le mufti de Jérusalem, un religieux très puissant qui se trouvait au Liban à ce moment-là, avait prévu d’établir un quartier-général temporaire à Safed pour se préparer à attaquer Jérusalem. Les responsables juifs du pré-Etat avaient décidé d’envoyer des forces pour attaquer la forteresse et gagner le contrôle de ce site stratégique. Cet assaut avait été une réussite et le commandement juif, dans la ville, avait été assuré.
Alors, en plus d’explorer les vastes ruines en laissant les enfants courir à leur aise et de pique-niquer dans le parc de la Citadelle, les visiteurs peuvent faire un arrêt à un mémorial émouvant en hommage aux soldats qui ont perdu la vie durant l’attaque nocturne qui avait pris pour cible le château.
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