Un pont inachevé de la Route 1 pose un danger, alors que les travaux ne peuvent être effectués durant Shabbat
Un constructeur explique que, face aux pressions religieuses, les automobilistes devront passer sous un chantier dangereux durant plusieurs jours au lieu d'un seul samedi
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël

Une entreprise de construction a accusé la Société de chemin de fer israélienne d’avoir mis le grand public en danger en reportant un projet de pont sur une autoroute majeure, qui devait être réalisé en semaine et non pendant Shabbat, afin de satisfaire les exigences des partis politiques ultra-orthodoxes – ou haredim.
Cette accusation a été formulée dans le cadre d’une vive polémique entre la société de construction Solel Boneh et Israel Railways au sujet des travaux d’installation d’un pont au-dessus la Route 1, l’autoroute principale reliant Jérusalem à Tel Aviv et à la région du Gush Dan, au centre du pays.
Solel Boneh affirme que l’exécution des travaux au coup par coup pendant les jours de semaine nécessite de laisser des chantiers dangereux en place pendant la journée alors que les automobilistes passent en dessous, alors que l’exécution des travaux en une seule fois en un Shabbat permettrait d’éviter un tel danger.
Solel Boneh a déclaré être bloqué depuis deux jours : d’une part, le constructeur ne peut faire avancer le projet parce qu’un ingénieur essentiel a été mobilisé par l’armée israélienne ; et de l’autre, Israel Railways a menacé d’encaisser quelque 40 millions de shekels de garanties si les travaux n’étaient pas effectués dans les plus brefs délais.
Après que les médias israéliens ont fait état de cette querelle, un groupe de défense des droits a demandé qu’une enquête soit menée pour déterminer si la compagnie de chemins de fer n’était pas influencée de manière inappropriée par des éléments politiques.
Le projet d’installation d’un pont ferroviaire au-dessus de l’échangeur d’Anava a été retardé pendant des mois après que les plans initiaux, qui prévoyaient d’effectuer les travaux au cours d’un week-end en août dernier, ont été abandonnés sous la pression des partis haredim qui s’opposent à ce que des travaux publics soient effectués durant Shabbat.

À la place, les travaux ont été répartis sur sept nuits en semaine, cinq cette semaine et deux prévues à une date ultérieure. Mais, selon le média Calcalist, Soleh Boneh veut manifestement être payé plus pour les travaux parce qu’ils prendront plus de temps en raison de l’appel sous les drapeaux de son ingénieur.
Le vice-président d’Israel Railways, Ilya Volkov, dans une lettre adressée au PDG de Solel Boneh, Assaf Inbar, a estimé que l’entreprise de construction avait « des dizaines, voire des centaines d’ingénieurs et que, par conséquent, votre message est inacceptable et constitue une violation fondamentale de l’accord », ont rapporté les médias israéliens.
Dans le cadre de ce différend, Inbar a fait remarquer qu’en transformant le projet d’une session unique pendant un week-end en sept petits travaux nocturnes, « il reste une partie de la construction qui n’est pas démantelée et la circulation se poursuit sur la route en contrebas ».
« Ce changement a rendu le démantèlement beaucoup plus complexe et dangereux, et a inévitablement créé un risque pour les automobilistes circulant sur la Route 1. »

Alors que la querelle prenait de l’ampleur, le directeur-général du ministère des Transports, Moshe Ben-Zaken, a convoqué des représentants d’Israel Railways et de Soleh Boneh pour obtenir des éclaircissements, a rapporté Calcalist.
Pendant ce temps, le groupe d’activistes Hofshei BeArtzenu [Libre dans notre pays] a demandé au procureur général, au chef de la police et au contrôleur de l’État d’ouvrir une enquête sur Israel Railways et les éléments politiques impliqués dans le scandale.
« Il est très préoccupant de constater que des décisions professionnelles cruciales de la compagnie ferroviaire ont été soumises à des pressions inappropriées. Cela porte gravement atteinte à la sécurité des citoyens et à l’État de droit », a déclaré le groupe à Calcalist.
Ces événements surviennent après que, la semaine dernière, la route la plus fréquentée du pays, l’autoroute Ayalon, a été fermée sur un tronçon proche de Tel Aviv dans la nuit de jeudi à vendredi pour permettre la réalisation de travaux sur un autre pont en semaine plutôt qu’à Shabbat.
Selon le quotidien Haaretz, le député Moshe Gafni (Yahadout HaTorah), chef de la commission des Finances de la Knesset, aurait été le fer de lance de cette initiative.
Selon l’article, un plan précédent, qui prévoyait d’effectuer le travail au cours d’un week-end de mars, a été interrompu, vraisemblablement en raison de la pression exercée par les Haredim.
Il y a déjà eu des cas où les partis ultra-orthodoxes ont exercé des pressions pour empêcher la réalisation de travaux d’infrastructure durant Shabbat, notamment en 2018 lorsque les travaux ont été interrompus sur un autre pont au-dessus de l’autoroute Ayalon.