Yair Lapid fustige la proposition de budget de l’État dans une conférence de presse
Le chef de l'opposition a notamment proposé d'utiliser les 13,7 milliards de fonds discrétionnaires de la coalition pour abaisser la TVA et pour la formation professionnelle
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.
Répétant sa désapprobation concernant le budget de l’État à hauteur de trilliards de shekels qui courra sur deux ans, le chef de l’opposition, Yair Lapid, a présenté mardi un plan financier alternatif, disant que si le montant induit par les promesses politiques disparaissaient de l’enveloppe proposée par le gouvernement, le taux de TVA actuellement élevé au sein de l’État juif pourrait être amputé de deux points de pourcentage.
Au sujet des 13,7 milliards de shekels de fonds discrétionnaires qui ont été approuvés par le cabinet aux côtés du budget, Lapid a expliqué que réduire de 8 milliards la proposition permettrait de faire passer la TVA de 17 % à 15 %. Il a proposé d’utiliser ce qui reste dans les fonds discrétionnaires pour investir dans le développement du capital humain dans le secteur des hautes-technologies, qui apporte une contribution disproportionnée en termes de base fiscale.
Si les principes du « budget alternatif » qui a été proposé par Lapid ne devraient probablement pas influencer la coalition de la ligne dure du Premier ministre Benjamin Netanyahu – qui doit impérativement approuver le budget d’ici la fin du mois – la conférence de presse qui était organisée mardi matin à Tel Aviv a été l’occasion, pour le chef de l’opposition, de critiquer plus largement le budget, qui comprend des sommes importantes qui seront consacrées à servir les intérêts des partis de la coalition.
« Ce que nous présentons ce matin, c’est ce que le gouvernement n’a pas présenté : c’est un budget qui est bon pour l’économie, qui est bon pour la classe moyenne, qui est bon pour les citoyens productifs qui travaillent et qui renforcent l’économie », a dit Lapid. « C’est un budget qui permet de relancer ce qui est le plus important dans un budget : Les moteurs de la croissance économique et la lutte contre le coût élevé de la vie ».
Le ministre des Finances Bezalel Smotrich a reconnu que répondre aux demandes de ses partenaires de coalition avait alourdi le budget, mais il a rejeté les critiques qui laissent entendre que son plan n’attaquerait pas à la racine les causes du coût croissant de la vie. Lundi, Smotrich a indiqué encore une fois qu’il s’engageait à combattre la concentration et les monopoles sur le marché – qui sont structurellement à l’origine de la hausse des prix – mais le budget en lui-même ne contient pas de dispositions permettant d’aller dans ce sens.
En plus de manquer de protection face au coût de la vie, a noté Lapid, le budget a « zéro vision » dans la mesure où il finance des politiciens extrémistes et des intérêts sectoriels alors même qu’il semble rejeter les intérêts économiques plus larges du pays.
Parmi les 13,7 milliards de shekels de fonds discrétionnaires, des centaines de millions de shekels seront versés « aux entreprises messianiques d’Avi Maoz et d’Orit Strock », deux politiciens d’extrême-droite qui veulent pouvoir influencer le caractère national juif d’Israël, a déploré Lapid.
De plus, « les 13,7 milliards de shekels vont encourager les étudiants de yeshiva à ne pas aller travailler et à ne pas apprendre un métier », a-t-il ajouté, faisant référence aux financements supplémentaires qui viendront soutenir l’étude religieuse à plein-temps.
Les subventions apportées par l’État font l’objet d’un débat amer entre les communautés ultra-orthodoxes, dont de nombreuses familles vivent en-deçà du seuil de pauvreté et qui ne s’appuient que sur les subventions versées par l’État pour répondre à leurs besoins, et le reste du pays.
« Nous sommes le seul pays au monde qui dépense des milliards pour convaincre des gens qu’ils ne doivent pas travailler et qu’ils ne doivent pas répondre aux besoins de leurs enfants », a dit Lapid, qui dénonce cette pratique depuis longtemps.
« Ce que le gouvernement présente aujourd’hui, c’est un budget qui n’augure rien de bon pour les citoyens – il n’est bon que pour les politiciens qui se dorlotent les uns des autres grâce à l’argent de la classe moyenne », a-t-il ajouté.
Lapid a insisté sur le fait que « un budget de l’État dont l’objectif est la croissance de l’économie doit comprendre des formations pour le secteur high-tech, des encouragements en direction de la périphérie » – les zones qui ne se trouvent pas dans le centre économique d’Israël – « l’enseignement des disciplines du tronc commun dans la communauté ultra-orthodoxe, de manière à ce qu’ils aient les outils nécessaires pour intégrer le marché du travail, et des accords commerciaux internationaux qui ouvrent les portes de marchés à l’exportation ».
« Rien de cela ne figure dans le budget. Il n’y a pas de tronc commun ou d’incitations à l’emploi dans l’enseignement ultra-orthodoxe ou dans la société arabe, il n’y a aucune incitation, bien entendu, en faveur de la périphérie », a-t-il affirmé.
Lapid s’en est également pris à la décision prise par la coalition d’inclure dans le budget le « Fonds Arnona » qui a été approuvé, lundi soir, par la Commission des finances au sein du parlement et qui figurera, par conséquence, dans la Loi sur les Arrangements, malgré les protestations des municipalités qui ont lancé des mouvements de grève pour dénoncer cette initiative. Le Fonds viendrait prélever un pourcentage des taxes municipales versées par les entreprises – l’arnona en Israël – et il redistribuerait l’argent ainsi prélevé auprès de ces villes du centre du pays, à l’activité commerciale forte, à des localités plus faibles au niveau économique et plus excentrées.
Plusieurs grandes municipalités, notamment Tel Aviv et Haïfa, sont en grève depuis hier pour dénoncer ce projet.
« Quand nous reviendrons au gouvernement, nous abandonnerons le Fonds Arnona », a promis Lapid, qui a évoqué un « vol ».
Le Fonds Arnona vise à offrir des incitations à la construction pour les municipalités obtenant un décaissement, avec notamment des paiements versés pour l’approbation des constructions. Il est toutefois critiqué parce qu’il favoriserait de manière discriminatoire les villes liées aux partis d’extrême-droite et ultra-orthodoxes de la coalition, et notamment les implantations et les villes ultra-orthodoxes, qui construisent en règle générale de nombreux logements mais qui investissent peu dans les centres commerciaux.
Imaginée par les officiels du ministère des Finances, l’idée du Fonds Arnona avait été soulevée dans les gouvernements antérieurs – notamment dans le dernier, où Lapid avait tenu les rôles de Premier ministre d’alternance et de Premier ministre – et en 2014, lorsque Lapid était lui-même ministre des Finances.
La proposition avait été écartée jusqu’à aujourd’hui.