Zubin Mehta regrette de ne pas avoir amené l’orchestre dans des pays arabes
Quittant son poste de directeur d'orchestre après presque six décennies, l'homme, né en Inde, dit avoir été dirigé par la 'koykhes' et que "mon agenda est plein jusqu'en 2022"
Zubin Mehta, directeur musical légendaire de l’Orchestre philarmonique israélien qui a quitté son poste, cette semaine, avec un concert final, a indiqué à la Douzième chaîne au cours d’un entretien qui a été diffusé vendredi que l’un de ses principaux regrets avait été de « ne pas avoir amené l’orchestre dans un pays arabe ».
Mehta, 83 ans -qui dirige l’orchestre philarmonique israélien depuis 1961 et qui est son directeur musical depuis 1977 – est né en Inde d’un père violoniste. Il a expliqué être entré dans le monde musical très jeune.
Son père, Mehli Mehta, avait formé l’orchestre symphonique de Bombay, dont la section de cordes avait été principalement formée de musiciens Juifs ayant fui la Shoah en Europe.
Il a indiqué avoir commencé à diriger des musiciens « quand j’avais 16 ans et que mon père préparait l’orchestre qui devait accompagner [le violoniste juif] Yehudi Menuhin ».
« Ainsi, mon père – qui était violoniste – connaissait ces concertos. Il jouait et je conduisais les musiciens pour que l’orchestre apprenne la partie en solo. En fait, je n’avais aucune idée de ce que je faisais. Mais je connaissais très bien la musique, je le suivais, il jouait et il me criait dessus quand je faisais quelque chose de mal », a-t-il raconté, éclatant de rire.
Même s’il est resté pendant presque six décennies au sein de l’orchestre philarmonique israélien, Mehta a déclaré au public venu assister à son concert final, à l’auditorium Charles Bronfman de Tel Aviv, que l’un des rêves qu’il n’avait pas réussi à accomplir avait été d’apprendre l’hébreu : « Slicha, beemet slicha! », s’est il exclamé (« Désolé, réellement désolé !)
« Toutefois, il semble avoir assimilé quelques mots – et du Yiddishkeit (Judaïsme) – sur la route. Lors d’un gala organisé en son honneur à l’hôtel Hilton de Tel Aviv, cette semaine, il a dit à l’assistance : « Je vais dire un mot sur toute cette publicité et sur tous ces remerciements qui m’ont été faits : Maspik [ça suffit !]! »
Et à la question posée par le journaliste de la Douzième chaîne qui lui demandait comment, à 83 ans, il se montrait toujours aussi actif professionnellement, il a répondu : la « Koykhes » (la « force » en yiddish), ajoutant : « J’en ai beaucoup ».
Le maestro charismatique s’est illustré dans des conditions poignantes, notamment lorsqu’il a dirigé un groupe de musiciens israéliens et allemands à proximité du camp de concentration nazi de Buchenwald, en 1999, où il a également fait jouer la symphonie de la Résurrection de Mahler.
Il était également venu – une initiative restée célèbre – jouer en soutien au pays pendant la Guerre des six jours, même s’il devait faire part ultérieurement de son opposition aux constructions d’implantations qui avaient suivi en Cisjordanie.
Mehta a déclaré que l’un des moments les plus particuliers de sa carrière de chef d’orchestre avait été « lorsque je suis monté sur la scène à Bombay [devenu Mumbai] avec l’orchestre. L’Inde avait rompu ses relations avec Israël après la Guerre des six jours et le pays les a rétablies, et je me suis senti très heureux. Et, en 1993 ou en 1994, nous sommes allés en Inde et quand je suis monté sur la scène, j’ai ressenti une grande fierté. »
Lors du concert de dimanche, à Tel Aviv, Mehta, qui a été soigné pour une tumeur cancéreuse l’année dernière et qui se déplace dorénavant avec une canne, a été longuement acclamé par une salle comble lorsqu’il a dit « adieu à ma famille ».
Sa biographie officielle note que durant sa carrière à l’orchestre philharmonique israélien, « Mehta a dirigé plus de 3 000 concerts avec cet ensemble extraordinaire avec notamment des tournées organisées sur les cinq continents ».
Au programme de ce concert final qui a eu lieu à l’auditorium Charles Bronfman de la ville méditerranéenne, le Concerto No. 2 pour piano de Liszt et la symphonie No. 2 de Mahler, connue sous le nom de Résurrection.
« Du fond du cœur, ce que cet orchestre m’a apporté… pas seulement celui-là, mais toutes les générations précédentes. Je ne peux pas seulement essayer de trouver les mots pour décrire ce que j’ai appris de ces musiciens », a-t-il dit au public pendant l’entracte.
Même s’il s’est retiré de son poste de directeur musical de l’orchestre philharmonique d’Israël, Mehta ne prévoit apparemment pas d’arrêter de travailler.
« Mon agenda est plein jusqu’en 2022 », a-t-il dit à la Douzième chaîne, expliquant que l’amour qu’il porte à son travail l’aidait à continuer.
Il a ajouté qu’il espérait seulement « davantage d’années encore de belle musique. C’est ce que je suis et c’est ce que je veux ».
L’AFP a contribué à cet article.