8 naissances et 4 séparations poignantes à la première maternité COVID-19
Chaque naissance dans ces circonstances "est une joie et un soulagement", indique Orit Horovitz, infirmière à l'hôpital Sheba ; malheureusement, le lien maternel est mis à mal
Dans la toute nouvelle maternité israélienne, les mères sont contraintes à des adieux déchirants avec leur bébé quelques instants après l’accouchement, sachant qu’elles ne le tiendront ni ne le toucheront pas pendant des jours.
Huit bébés sont déjà nés dans le premier service d’obstétrique et de gynécologie COVID-19 du pays, au centre médical Sheba à Ramat Gan, depuis son ouverture début avril. Toutes les mères sont porteuses du virus, mais les bébés sont tous nés en bonne santé et sans être porteurs du virus.
« C’est une situation très dramatique », rapporte Eldad Katorza, le médecin en chef qui supervise le service. « Ce n’est pas dans la nature des êtres humains de séparer les bébés de leur mère. Tous les liens sont censés se créer à ce stade – c’est contraire à l’instinct humain et médical. »
« Mais malheureusement, avec le coronavirus, les choses ont complètement changé. »

La moitié des femmes ont jusqu’à présent décidé d’aller contre les recommandations des médecins et de rester avec leurs nouveaux-nés, rapporte Eyal Sivan, responsable des opérations de la maternité de Sheba. Selon lui, il est trop tôt pour savoir si l’un des bébés a été infecté.
Face aux difficultés du service, l’infirmière en chef Orit Horovitz indique que chaque naissance apporte un sentiment de bonheur. « C’est une grande joie et un grand soulagement chaque fois qu’il y a une naissance dans ces circonstances », commente-t-elle.
Pour les femmes qui optent pour la séparation, elles ne peuvent approcher leur bébé, tant qu’elles sont infectées, que derrière une fenêtre en verre, à travers laquelle elles le regardent avec peine.
Théoriquement, ces mères pourraient voir leur bébé pendant une courte période pour l’allaiter, mais les aspects pratiques sont trop risqués, explique le Dr Katorza. « Jusqu’à présent, nous pensons que le virus n’est pas transmis par le lait, mais la mère ne peut pas porter de gants et de masques pour allaiter », indique-t-il.
À la naissance, aucun membre de la famille n’est autorisé. Cette règle est aujourd’hui en vigueur dans de nombreuses maternités ordinaires, mais la différence au sein de l’unité coronavirus est que les seules personnes qui y assistent sont les soignants en combinaison de protection, ce qui rend difficile de parler clairement et de communiquer au travers des expressions du visage.

« C’est difficile, et c’est très, très étrange, à la fois pour les mères et pour le personnel », confie le médecin. « L’accouchement est un moment très intime et plein d’émotions en temps normal, et là, c’est très différent. Il y a moins d’intimité et plus de distance. »
Eyal Sivan explique que le personnel essaye de diverses manières de créer des liens avec les patients malgré les tenues de protection. « La façon dont nous nous habillons semble surréaliste », confirme-t-il. « Pour essayer de créer un lien personnel, nous portons de grands autocollants sur nos blouses avec une photo de nous, quand nous ne portons pas ces costumes spéciaux. »
Avant, pendant et après l’accouchement, les infirmières vont au-delà de leur rôle normal et essaient d’agir comme des compagnons pour les femmes, révèle Orit Horovitz. « Dans ces circonstances, nous sommes le soutien et les amis des femmes ainsi que leur personnel médical », ajoute-t-elle.
Le service comprend de nombreux aspects obstétriques et gynécologiques réservés aux seules femmes contaminées par le coronavirus, notamment des salles d’opération, des lits post-partum, des lits gynécologiques et une unité spéciale pour les nouveaux-nés.
L’idée derrière la gamme croissante d’installations séparées de Sheba pour les patients atteints du coronavirus est de les servir et de s’assurer que les non-porteurs ne craignent pas de se rendre à l’hôpital, explique le Dr Katorza.
« Nous voulons encourager les patients atteints de maladies chroniques, de cancer et d’autres affections à ne pas négliger leur situation médicale. »
« Les personnes qui ont besoin de se rendre à l’hôpital ne doivent pas avoir peur », souligne-t-il. On tente pour cela de leur faire prendre conscience que « nous nous assurons que l’hôpital soit aussi exempt du coronavirus que possible ».