André Devambez, maître de la figuration tardive, exposé à Paris
Si l'exposition est intitulée "Vertiges de l'imagination", l'œuvre de ce diplômé des Beaux-Arts, prix de Rome 1890, offre plutôt un panorama de la société de la IIIe République
André Devambez, artiste qui tâcha de renouveler et prolonger l’aura de la peinture figurative au moment de l’explosion des avant-gardes du XXe siècle, est l’objet d’une rare rétrospective au Petit Palais à Paris.
Si l’exposition (visible jusqu’au 31 décembre) est intitulée « Vertiges de l’imagination », l’œuvre de ce diplômé des Beaux-Arts, prix de Rome 1890, offre plutôt un panorama de la société de la IIIe République, dans toutes ses contradictions : tradition et progrès technique, douceur de vivre et tensions sociales.
En pleine Première Guerre mondiale, Devambez (1867-1944) représente aussi bien son bonheur domestique bourgeois, avec des portraits minutieux de ses enfants, que les horreurs du conflit, avec une eau-forte d’un dément entre les ruines, « Le Fou », ou un triptyque sur le deuil des veuves (« La Pensée aux absents »).
Il fait aussi le pont entre les derniers temps de l’académisme, étant retenu par le très officiel Salon, et le tournant commercial de l’art, puisqu’il réalisera des publicités.
« Devambez n’est jamais là où on l’attend. Par exemple quand il représente le métro parisien, antisujet en peinture puisque c’est souterrain, sans lumière naturelle ni perspectives », dit à l’AFP Annick Lemoine, commissaire de l’exposition.
Les affiches pour l’alcool Dubonnet ou la TSF, reproduites sur ses toiles à la technique parfaitement classique, donnent une impression légèrement anachronique.
Il se montre rétif à tous les mouvements qui révolutionnent la peinture de son vivant (cubisme, surréalisme, expressionnisme, futurisme, etc…). Mais « il affectionne les sujets modernes : l’avion, l’automobile, le téléphone », selon Annick Lemoine.
C’est aussi un adepte du travail à partir de photographies, qui lui permettent des points de vue élevés jamais expérimentés avant lui, et très peu après.
Il peint ainsi des vues aériennes avant la Grande Guerre. Et dans son tableau le plus saisissant, « La Charge » (1902-1903), qui montre une riposte de la police contre des ouvriers manifestant sur les Grands Boulevards depuis un balcon, la perspective audacieuse fait penser au photojournalisme.
Sa cote ne sera jamais très élevée, au point qu’il n’avait eu droit jusqu’ici qu’à une exposition à Beauvais en 1988. Mais la IIIe République le soigne, faisant de lui l’artiste de l’armée de l’Air ou le décorateur de l’ambassade de France à Vienne.
Dans son ultime commande officielle, il représente avec des couleurs pastel et une Seine turquoise l’Exposition universelle de 1937, depuis le deuxième étage de la tour Eiffel.
Semblant vouloir prolonger indéfiniment la Belle Époque (1889~1914), il a atténué ce qu’avait de menaçante la confrontation des deux totalitarismes, nazi et soviétique, lors de l’Exposition universelle de Paris en 1937, alors que l’évènement a servi d’affrontement entre ces deux idéologies, les deux bâtiments, soviétique et nazi, très imposants, se faisant face des deux côtés du Trocédéro.