Au camp des Milles, la mémoire de « l’horreur » se transmet 80 ans après
"Je ne pensais pas qu'il y avait eu des camps en France", s'est étonné Tony Cranga, collégien en visite au mémorial du camp des Milles
« Je ne pensais pas qu’il y avait eu des camps en France », s’est étonné Tony Cranga, collégien en visite au mémorial du camp des Milles qui a commémoré cette semaine les 80 ans de la déportation de 2 000 Juifs d’Aix-en-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, en 1942.
Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, les noms des 1 933 personnes déportées du camp des Milles dans des wagons à bestiaux par le régime français de Vichy ont résonné au pied des hauts murs de brique rouge de l’ancienne tuilerie où ils avaient été entassés à l’été 1942.
« Je ne pensais pas qu’il y avait des camps en France et encore moins juste à côté de Marseille », a raconté à l’AFP Tony Cranga, élève de 3e venu avec sa classe pour une visite guidée, mais aussi pour participer à la lecture des noms des hommes, femmes et enfants assassinés par les nazis dans les camps de la mort, tout près d’un wagon en bois où défilent leurs visages.
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« Il y avait des Français qui aidaient à cette déportation et ça, ça m’a marqué », a souligné l’adolescent. « Si plus personne ne s’en souvient, le genre d’atrocités qu’il y a eu pourra se reproduire dans le futur », a-t-il ajouté.
Entre la défaite de la France face à l’Allemagne en 1940 et la Libération en 1944, plus de 75 000 Juifs ont été déportés vers les camps d’extermination de l’Allemagne nazie, situés en Pologne, avec la collaboration active des autorités françaises.
Cette semaine, des enfants, des cheminots de la SNCF et des dizaines d’autres personnes ont participé aux commémorations dans ce lieu de mémoire aménagé il y a 10 ans et visité chaque année par près de 70 000 jeunes.
« Cela fait 80 ans que les rafles de la zone sud (sous le contrôle de l’État français du régime de Vichy) ont été mises en œuvre », a rappelé Nicolas Sadoul, directeur de la Fondation du camp des Milles, d’où sont partis cinq convois vers les camps d’extermination, en premier lieu Auschwitz-Birkenau.
Le but de cette commémoration est « de se rappeler pourquoi et comment ces 2 000 personnes juives ont été assassinées » ainsi que le pourquoi et le comment « de l’extrémisme barbare qui a abouti à ces assassinats qui éclairent aussi le risque que les extrémismes d’aujourd’hui font peser sur notre pays et nos sociétés démocratiques », a ajouté Sadoul.
« Transmission générationnelle »
Des expositions et des espaces pédagogiques ont été conçus pour montrer les mécanismes qui font basculer une société vers le totalitarisme et les crimes de masse.
D’autres salles de l’ancienne tuilerie abandonnée dans les années 1980 ont été laissées en l’état pour montrer l’extrême précarité et la rudesse de la détention des personnes raflées, à l’image du dortoir sous les combles réservé aux femmes et aux enfants d’où étaient visibles les quais d’embarquement pour les camps d’extermination.
« Il est du devoir de chacun de ne pas laisser germer les pensées et idéologies infectes que sont l’antisémitisme, la xénophobie, la haine de l’autre », a déclaré jeudi soir Herbert Traube, déporté des Milles qui a survécu en s’évadant d’un convoi avant de rejoindre la Résistance.
Cet homme de 98 ans est venu témoigner devant un wagon en bois d’époque, devant lequel ont été lus les témoignages de rescapés ou de Justes, celles et ceux qui ont sauvé des Juifs pendant la guerre.
Invoquant un « devoir de mémoire », Traube a rappelé l’importance de « sensibiliser les jeunes et les moins jeunes à ce qui s’est passé à cette époque pour éviter que cela recommence ».
Ce « lieu d’horreur brute » où des humains « ont été traqués, humiliés, affamés, battus, jetés dans des wagons à bestiaux, entassés vers la mort et déshumanisés » est devenu aussi un « lieu de mémoire vivant par et pour les jeunes d’aujourd’hui et de demain », a revendiqué le directeur de recherches émérite au CNRS et président de la Fondation du Camp des Milles, Alain Chouraqui.
Pour Nicolas Sadoul, cette « transmission générationnelle ne doit pas s’arrêter aujourd’hui, a fortiori au moment où les grands témoins disparaissent ».
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