Israël en guerre - Jour 539

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Au milieu des tensions au mont du Temple, on vous explique ce qu’est le Waqf

La Jordanie a perdu le contrôle de Jérusalem en 1967, mais elle est maintenant au cœur d’une crise qui menace de plonger la ville dans la violence

Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël

Azzam al Khatib, directeur du Waqf, à gauche, et Abu Snaineh, imam et prêcheur de la mosquée Al-Aqsa,à la porte des Lions de la Vieille Ville de Jérusalem, près du mont du Temple, le 19 juillet 2017. (Crédit : Dov Lieber/Times of Israël)
Azzam al Khatib, directeur du Waqf, à gauche, et Abu Snaineh, imam et prêcheur de la mosquée Al-Aqsa,à la porte des Lions de la Vieille Ville de Jérusalem, près du mont du Temple, le 19 juillet 2017. (Crédit : Dov Lieber/Times of Israël)

Alors que les tensions augmentent dans la Vieille Ville de Jérusalem après l’installation par Israël de détecteurs de métaux aux portes du mont du Temple en réponse à l’attaque terroriste perpétrée la semaine dernière, l’attention s’est focalisée sur les garants byzantins de l’autorité qui contrôlent et gèrent le lieu saint ultra-sensible.

Alors qu’Israël contrôle l’accès de l’enceinte, à l’intérieur de ses neufs portes, le Département Awqaf de Jérusalem – parfois appelé Autorité de Dotations Religieuses Islamiques, ou simplement Waqf – exerce un contrôle quasi total.

Le Waqf est entièrement contrôlé et financé par le gouvernement jordanien. Il administre la vie quotidienne sur le mont du Temple, ce qui comprend la mosquée Al-Aqsa, le Dôme du Rocher, les sites archéologiques, les musées et les écoles.

Depuis qu’Israël a pris le site en 1967, une relation difficile entre les autorités et le Waqf s’est instaurée, les deux parties déclarant qu’elles sont engagées à maintenir le statu quo délicat qui permet aux non-musulmans de visiter le mont du Temple sans pouvoir pour autant y prier.

Pour beaucoup de non-musulmans, le Waqf et le statu quo restent un mystère, et les questions sont nombreuses quant à savoir comment ce corps détient autant de pouvoir dans une ville qui est entièrement sous souveraineté israélienne.

Montrer les muscles

Le mont du Temple est le lieu le plus saint du judaïsme, l’endroit où les deux anciens temples juifs se dressaient. Il est considéré comme le troisième lieu le plus saint en islam, le lieu d’où le prophète Mahomet est monté au paradis.

Les tensions toujours présentes entre les officiels israéliens et le Waqf ont atteint un paroxysme le 14 juillet dernier, lorsque trois arabes israéliens ont ouvert le feu sur des officiers de police en faction juste en dehors du lieu saint, les tuant tous les deux.

L'adjudant Kamil Shnaan, à gauche, et l'adjudant   Haiel Sitawe, à droite, les deux policiers morts dans l'attentat terroriste perpétré sur le mont du Temple à Jérusalem, le 14 juillet 2017. (Crédit : Police israélienne)
L’adjudant Kamil Shnaan, à gauche, et l’adjudant Haiel Sitawe, à droite, les deux policiers morts dans l’attentat terroriste perpétré sur le mont du Temple à Jérusalem, le 14 juillet 2017. (Crédit : Police israélienne)

Selon les autorités israéliennes, le trio avait caché leurs armes sur le mont du Temple et Israël a rapidement fermé l’accès au site – vendredi, c’était la première fois qu’il était fermé depuis des décennies – provoquant une pluie de critiques des musulmans et de certains pays dans le monde.

Jeudi, la police a publié des images de vidéo surveillance montrant comment les armes ont été introduites sur le lieu saint.

Quand il a réouvert dimanche, la police avait installé des détecteurs de métaux aux deux portes, et avait fermé les autres portes. Des officiels arabes ont critiqué la mesure qui ne respecterait pas le statu quo – et qui ferait partie d’un processus de lente prise de contrôle du site par Israël – et le Waqf a refusé d’entrer dans le site, encourageant d’autres musulmans à le boycotter également, ce qui a donné lieu à des prières de protestations devant les portes qui se sont transformées en affrontements quasi quotidiens.

Israël affirme que les mesures sécuritaires sont nécessaires en raison de la « profanation » du site vendredi faite par les assassins. Israël veut s’assurer que de telles attaques ne se reproduisent plus à l’avenir sur le lieu saint.

Mais qu’est-ce donc le Waqf ?

Afin de comprendre l’objectif de l’institution connue comme le Waqf de Jérusalem, il est utile de savoir ce qu’est le waqf.

Dans la loi islamique, une personne peut décider de donner une propriété et ses revenus pour remplir des objectifs de charité ou religieux. Cette propriété devient ensuite un waqf, ou holding, à perpétuité. Des exemples de waqfs (awqaf est le pluriel arabe) peuvent être des maisons, des champs, des réservoirs d’eau, des écoles, des orphelinats ou encore des mosquées.

En Israël, le waqf le plus connu est le mont du Temple, connu chez les Musulmans comme le Haram al-Sharif. Pour les Musulmans, l’ensemble de l’esplanade est considéré comme une mosquée.

Une photo prise le 17 juillet 2017 montre le complexe du mont du Temple dans la Vieille ville de Jérusalem (Crédit :  AFP Photo/Thomas Coex)
Une photo prise le 17 juillet 2017 montre le complexe du mont du Temple dans la Vieille ville de Jérusalem (Crédit : AFP Photo/Thomas Coex)

Alors que l’état moderne s’est développé au Moyen-Orient à travers les 19e et 20e siècles, ces propriétés sont passées sous l’autorité des différents gouvernements successifs – au sens large du terme.

Jusqu’en 1917, les propriétés du waqf à Jérusalem étaient contrôlées par l’Empire Ottoman.

Sous le Mandat britannique, la responsabilité du awqaf a été placée sous le contrôle du Conseil Suprême Musulman, le corps des Musulmans palestiniens nommé par le gouvernement britannique colonial pour administrer le tribunal de la Charia et l’awqaf.

En 1948, lorsque le royaume hachémite de Jordanie a pris le contrôle de la Cisjordanie et de Jérusalem Est, il a transféré la responsabilité pour l’awqaf de la ville, y compris l’enceinte du mont du Temple, à son propre ministère d’awqaf.

Quand Israël a pris le contrôle de Jérusalem Est en 1967, le ministre de la Défense Moshe Dayan a décidé qu’il serait mieux si le ministère jordanien Awqaf continuait à administrer le site, afin d’éviter une confrontation plus grande avec le monde musulman. Les Juifs auraient le droit de visiter, mais pas de prier, avait-il décidé, suivant le consensus rabbinique dans la loi religieuse juive que les Juifs ne devraient pas poser le pied au sommet du mont de peur qu’ils ne profanent l’espace le plus sacré des temples, le Saint des Saints.

Depuis ce moment-là, il a été admis qu’Israël serait responsable pour la sécurité autour du périmètre du site, tandis que le Waqf de Jérusalem contrôlé par la Jordanie serait responsable de ce qui se passe dans l’enceinte.
Cette situation a continué de manière informelle jusqu’en 1994, quand Israël et la Jordanie ont signé un traité de paix.

L’article 9 du traité stipule : « Israël respecte le rôle spécial présent du royaume hachémite de Jordanie dans le saint sanctuaire musulman à Jérusalem. Quand les négociations sur le statut permanent auront lieu, Israël donnera la priorité au rôle jordanien historique dans ce sanctuaire ».

La Jordanie s’est officiellement séparée de la Cisjordanie en 1988, afin de permettre aux dirigeants palestiniens de reprendre la main, mais pas à Jérusalem Est.

La Jordanie affirme qu’elle ne permettrait pas un « vide de protection » des lieux saints islamiques à Jérusalem alors que l’OLP et Israël négocient le futur de la ville.

Jusqu’en 1994, les grands muftis de Jérusalem – qui sont considérés comme les autorités religieuses pour les Palestiniens – étaient nommés par la Jordanie. Mais dans un accord passé avec l’OLP, le rôle a été transféré aux dirigeants palestiniens, cette année-là.

Muhammad Ahmad Hussein, mufti de Jérusalem (Crédit : Arbeitsbesuch Israel/Creative Commons)
Muhammad Ahmad Hussein, mufti de Jérusalem (Crédit : Arbeitsbesuch Israel/Creative Commons)

L’actuel Grand Mufti de Jérusalem Muhammad Ahmad Hussein, qui a joué un rôle central dans l’opposition aux mesures israéliennes mises en place après l’attaque de vendredi, a été nommé par le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas en 2006, et son salaire est payé par l’AP.

La Jordanie considère également avoir une relation historique spéciale avec Jérusalem, tout spécialement la mosquée Al-Aqsa, depuis la période du mandat britannique.

Tandis que le Conseil Suprême Musulman (CSM) était en charge de l’administration du site, le dirigeant de la Mecque à l’époque et le chef de la révolte contre l’Empire Ottoman Hussein ibn Ali al-Hashimi, dont le fils est devenu le premier roi de Jordanie, a été accepté pour être son gardien par les dirigeants du CSM. Cette fonction a été transmise ensuite aux rois de Jordanie.

De 1921 à 2010, la famille royale hachémite de Jordanie a dépensé plus d’un milliard de dollars pour maintenir l’administration d’Awqaf, selon un rapport rédigé par le Centre des Etudes Stratégies Islamiques Royales, organisme indépendant situé à Amman.

Un officiel du Waqf de Jérusalem a déclaré au Times of Israel que l’institution emploie actuellement 900 personnes.

Aujourd’hui, le Waqf de Jérusalem contrôle non seulement le mont du Temple, mais aussi des écoles, des orphelinats, des bibliothèques islamiques, des musées, des mosquées, des tribunaux de la charia et de nombreuses propriétés résidentielles et commerciales à travers la ville de Jérusalem.

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