Israël en guerre - Jour 537

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Avec l’alliance Herzog-Livni, une véritable opposition émerge

Les travaillistes, qui ont perdu les cinq dernières élections à cause du vote centriste, tentent un nouveau scénario

Haviv Rettig Gur est l'analyste du Times of Israël

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Cela n’a pas de sens. Les sondages prédisent que le leader du parti travailliste, Isaac Herzog, et son parti gagneraient 15 sièges à la Knesset. Le parti Hatnua de Tzipi Livni s’accroche à ses quatre sièges, nécessaires pour passer le seuil électoral de la Knesset.

De ce fait lorsqu’on essaie de comprendre ce nouvel accord de mercredi entre les deux politiciens, la question fondamentale n’est pas pourquoi Livni pensait que c’était une bonne idée d’accepter une telle alliance, mais pourquoi Herzog en est persuadé. Pourquoi le chef du parti travailliste concéderait-il autant – la moitié de son mandat [en cas de victoire, Herzog serait Premier ministre pendant deux ans, avant de céder sa place à Livni] – à une partenaire politique qui a très peu à lui offrir.

C’est une question qui nous plonge au cœur de la stratégie de Herzog pour pouvoir enfin détrôner « Le trois fois » Premier ministre Benjamin Netanyahu.

La gauche a perdu cinq élections nationales consécutives. Mais elle ne les a pas perdues à cause des électeurs de droite. Depuis le début de la deuxième Intifada en 2000, de nombreux Israéliens de gauche ont tendance à voter au centre et même au centre-droit pour montrer leur méfiance à l’égard des intentions palestiniennes – et des politiciens israéliens qui les poussent à miser sur ces intentions.

Netanyahu, qui entrera dans sa septième année consécutive au pouvoir le jour de l’élection (le 17 mars), a gagné les deux dernières élections grâce au vote des centristes. Un sondage mené en septembre par la chaîne parlementaire israélienne souligne que seul un quart des Israéliens est persuadé que les vues de Netanyahu sont des positions de droite. La plupart des Israéliens pensent qu’il est centriste.

A la Knesset, c’est grâce aux 25 sièges du parti Hatnua de Livni et de Yesh Atid de Yair Lapid que Netanyahu a pu obtenir la majorité au sein de la coalition actuelle.

Les centristes comme Moshe Kahlon et les ultra-orthodoxes de Shas sont ceux qui, si tout se passe comme Netanyahu l’a prévu, lui permettraient d’avoir les sièges nécessaires pour former la prochaine coalition. (Le Shas a déjà participé à un gouvernement travailliste dans le passé ; Kahlon, un ancien ministre Likud, a clairement déclaré qu’il n’était pas profondément attaché à une coalition dirigée par le Likud.)

Pourtant le centre politique d’Israël est en réalité bien plus important que les deux partis qui se déclarent « centriste ». Au sujet de la question clé qui définit l’axe gauche-droite de la politique israélienne, la question de l’Etat palestinien, les sondages révèlent que beaucoup de personnes qui votent pour les partis de droite comme le Likud, Yisrael Beytenu et même HaBayit HaYehudi soutiennent en réalité la création d’un Etat palestinien.

De nombreux sondages suggèrent que les centristes israéliens – en général définis par les experts comme ceux qui sont en faveur de l’indépendance palestinienne tout en doutant de la réciprocité des Palestiniens – votent à droite parce qu’ils retrouvent un écho de leur incrédulité dans les discours des dirigeants de droite.

Pendant 20 ans, les prédécesseurs d’Herzog – les travaillistes ont vu passé 11 dirigeants en 22 ans – menaient des batailles perdues d’avance.

Mais mercredi soir, Herzog a lancé la tentative la plus spectaculaire depuis les années 1990 pour gagner la confiance du centre.

Herzog a passé des mois à travailler sur une nouvelle stratégie électorale pour le parti travailliste qui vise à prendre le centre à Netanyahu.

Le leader travailliste a largement abandonné la rhétorique de gauche sur la réconciliation et sur la paix, et plaide aujourd’hui pour l’idée plus simple et plus largement soutenue de la séparation. Sans la solution à deux Etats, explique-t-il aux Israéliens et aux médias, Israël restera empêtré dans les affaires palestiniennes – y compris dans le dysfonctionnement politique palestinien et l’extrémisme.

Aujourd’hui, Herzog consolide cette stratégie et a fait un show spectaculaire mercredi en sacrifiant ses ambitions personnelles au profit de la cause. Un vote pour lui, explique-t-il, est aussi littéralement un vote pour la centriste Livni.

Et alors qu’il détourne la stratégie centriste au profit de son propre parti, une manœuvre qui selon les premiers sondages trouverait la faveur des électeurs, il est devenu une menace importante pour le dirigeant du centre-gauche : Yair Lapid. Herzog, et non plus Lapid, se trouve maintenant au sommet de ce qui est de loin le plus grand bloc anti-Netanyahu.

En un seul mouvement habile, Herzog est passé en tête du peloton et a transformé une position politique terne pour devenir la plus grande menace pour Netanyahu.

Depuis cette position de force, Herzog espère attirer les centristes qui en sont venus à détester Netanyahu, les personnes de gauche qui ont voté pour d’autres partis ou d’autres causes parce qu’ils ne pensaient pas qu’un vote travailliste amènerait une victoire travailliste, et peut-être même les Arabes libéraux qui pourraient voir leur voix politique mises en veilleuse au sein d’une nouvelle liste arabe unifiée.

Et comme peu de gouvernements israéliens survivent rarement au-delà de la troisième année – le prochain gouvernement sera le 34è d’Israël (en 67 ans) – en choisissant simplement les deux premières années de la rotation, le leader travailliste s’assure en réalité de ne pas abandonner autant que les termes de l’accord de rotation pourrait le suggérer.

Le premier signal de la menace potentielle que cette manœuvre habile d’Herzog pourrait représenter pour le Premier ministre en exercice est venu dans la réponse officielle du Likud à l’annonce de mercredi soir :

« Maintenant Boujie [Herzog] et Tzipi peuvent rivaliser pour savoir qui va abandonner [le plus de prérogatives] et faire le plus de
concessions », ironise le Likud. « Pour les citoyens d’Israël, il est clair que ces élections se jouent entre la gauche dirigée par Herzog et Livni et le Premier ministre Benjamin Netanyahu qui dirige le camp national. »

Cette affirmation que la nouvelle alliance entraînera un abandon de prérogatives et des concessions et la qualification du partenariat de
« camp de gauche », pourraient nous permettre d’entrevoir la contre-campagne du Likud pour répondre à la nouvelle stratégie de d’Herzog et démontre que les deux parties comprennent l’importance du centre.

Bien sûr, le fait que l’on puisse maintenant parler des « deux parties » est aussi révélateur. Pour la première fois depuis un certain temps, les sondages suggèrent qu’il y a maintenant deux parties dans une élection israélienne.

Il est difficile d’exagérer le danger que cela représente pour Netanyahu. Le Premier ministre a une course aux primaires à gagner dans les trois prochaines semaines, et ses électeurs aux primaires, dans l’ensemble, ne sont pas des centristes. Mais après s’il gagne les primaires, il aura à faire face à un défi compliqué.

HaBayit HaYehudi attire des centaines de milliers d’électeurs de son flanc droit ; il y a Kahlon et Lapid à sa gauche, qui peuvent compter sur à peu près dix sièges chacun, qu’ils gagneraient uniquement grâce à leur charisme ; et maintenant une puissance électorale grandissante a émergé de l’autre côté de l’axe qui pourrait former un ancrage crédible pour une coalition alternative à la sienne.

Tiré simultanément vers la droite et vers la gauche, Netanyahu doit trouver un moyen de plaire à tout le monde ou risque de tout perdre.

Jusqu’à mercredi, aussi bien à gauche qu’à droite, les élections étaient considérées comme un référendum sur Netanyahu. Même si cette course n’est pas encore perdue par Netanyahu – son chemin électoral vers une coalition reste quand même moins long que celui d’Herzog – la manœuvre spectaculaire des travaillistes de cibler le centre a enfreint les vieilles règles en place et a amené un certain degré d’incertitude à ces élections.

Et Herzog, considéré par la plupart des Israéliens comme un fonctionnaire gris et sans charisme, a révélé une nouvelle partie de sa personnalité. Il a montré un trait de ruse politique et d’habileté stratégique que l’on associe plus souvent à l’homme qu’il tente de détrôner.

Cette course, que l’on attendait depuis si longtemps, a enfin débuté.

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