Avec le cessez-le-feu, Netanyahu face à 6 semaines critiques pour le pays comme pour la coalition
Alors que l'accord commençait, le Premier ministre a fait des affirmations qui semblent contredire certaines dispositions de ce dernier - des affirmations qui pourraient être un obstacle lors du prochain cycle de négociations

Dans 41 jours, il est probable que le Premier ministre devra faire face à un choix – avancer d’un pas ferme vers la prochaine phase de l’accord de cessez-le-feu à Gaza qui a ouvert la porte à la remise en liberté des otages, ou assister à l’effondrement de sa coalition, avec des élections qui pourraient potentiellement mettre un terme anticipé à son mandat.
Et le Premier ministre, dans le passé, a démontré son expertise s’agissant d’attendre la dernière minute pour prendre des décisions majeures.
L’accord qui a été signé la semaine dernière au Qatar cherche ostensiblement à mettre un terme à quinze mois d’une guerre épuisante à Gaza. Et les négociations concernant la deuxième phase du cessez-le-feu conclu entre les deux parties devraient commencer au 16e jour de la trêve.
L’ancien président américain, Joe Biden, a indiqué que la deuxième phase de l’accord permettrait « de mettre un terme permanent à la guerre ». Le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abdulrahman al-Thani, a de son côté expliqué que l’accord sera l’occasion d’écrire « la dernière page de la guerre » et le président Donald Trump – dont l’investiture a eu lieu lundi aux États-Unis et qui commence son second mandat – a estimé qu’elle serait « un premier pas en direction d’une paix durable au Moyen-Orient ».
Dans ses propos publics – ou privés – Netanyahu a exprimé un sentiment assez différent.
Depuis le premier jour du conflit, Netanyahu a juré que les combats ne se termineraient pas avant que le Hamas soit évincé du pouvoir dans la bande. S’il devait y avoir des doutes sur les capacités du groupe terroriste à se maintenir à la barre de l’enclave côtière, les images qui ont été filmées dimanche dans les rues de Gaza – avec des hommes armés et masqués qui ont fait une démonstration de force en direction des Gazaouis, exténués par la guerre – ont dissipé les éventuelles incertitudes.

Le chef de gouvernement a également promis de ramener tous les otages sur le sol israélien, les vivants et ceux qui ne le sont plus – quelque chose que les responsables de la Défense considèrent comme impossible en l’absence d’une forme ou d’une autre d’accord.
Dans ses premiers propos publics au sujet de l’accord, le Premier ministre a évoqué, samedi soir, « un cessez-le-feu temporaire », affirmant que Biden et Trump « ont apporté tout leur soutien au droit d’Israël à reprendre les combats » si les négociations devaient ne pas aller de l’avant.
« Si nous devons retourner nous battre », a indiqué Netanyahu, « nous le ferons en utilisant de nouveaux moyens et en déployant une grande force ».
Netanyahu a nié l’idée que le nombre de soldats stationnés dans le couloir Philadelphi diminuerait pendant le cessez-le-feu de six semaines, même si le texte de l’accord proprement dit prévoit que Tsahal « réduira graduellement le nombre de troupes dans le secteur du couloir pendant la phase 1″.
L’accord précise également que l’armée israélienne devra avoir terminé son retrait du couloir au cinquantième jour du cessez-le-feu – indépendamment des phases à venir ». Toutefois, « un responsable de premier plan de la diplomatie » – une expression qui correspond généralement au code employé pour désigner un représentant du Bureau du Premier ministre – a affirmé que « si le Hamas n’accepte pas les demandes israéliennes en ce qui concerne l’arrêt de la guerre, alors Israël restera dans le couloir Philadelphi, que ce soit au 42e jour ou au 50e jour », ce qui aurait pour conséquence, dans les faits, de maintenir une présence israélienne dans le secteur « jusqu’à une date indéterminée ».
Le 42e jour – ce jour où les 14 derniers otages d’une série de 33 captifs devraient être libérés – pourrait s’avérer être particulièrement critique pour l’accord. Si les militaires israéliens ne devaient montrer aucun signe d’un possible retrait du couloir Philadelphi, alors le Hamas pourrait facilement évoquer une violation de l’accord et mettre un terme à la remise en liberté des captifs.

Netanyahu a aussi déclaré avec fougue, samedi soir, que « les terroristes qui se sont rendus coupables de meurtre » ne seraient pas relâchés en Cisjordanie ou à Jérusalem, mais qu’ils seraient envoyés à Gaza ou à l’étranger. C’est vrai pour les Palestiniens condamnés pour meurtre, même si un certain nombre de prisonniers purgeant de lourdes peines pour des activités terroristes – mais qui n’ont pas été condamnés pour meurtre – seront libérés en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.
Entre le marteau et l’enclume
La coalition est dorénavant à la tête d’une majorité serrée de 62 députés à la Knesset, forte de 120 sièges, après le départ d’Itamar Ben Gvir et de son parti Otzma Yehudit. Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a juré qu’il quitterait le gouvernement si Israël devait ne pas reprendre les combats à Gaza, ce qui mettrait un terme au cessez-le-feu et ce qui rendrait fortement improbable la remise en liberté des 64 otages restants.
Ben Gvir et le leader de l’opposition, Yair Lapid, se sont tous les deux engagés à apporter leur soutien au gouvernement de Netanyahu – avec des motivations très différentes. Lapid – à court-terme – pour permettre à un accord ouvrant la porte à la libération des otages d’aboutir et Ben Gvir pour empêcher l’effondrement d’un gouvernement de droite, un effondrement qui entraînerait de nouvelles élections.
Netanyahu n’a que des options limitées. Il peut, bien sûr, espérer que pendant les prochaines négociations, le Hamas acceptera de mettre fin à sa gouvernance politique et militaire au sein de l’enclave côtière. Ce qui semble néanmoins être une chimère. Et Netanyahu a refusé de manière répétée de seulement envisager l’idée d’une Autorité palestinienne qui prendrait le contrôle de la bande – une idée qui est considérée par certains comme l’alternative la plus probable et la plus stable.
Le Premier ministre pourrait également torpiller la deuxième phase des pourparlers et relancer des combats à grande échelle à Gaza à la fin de la première phase de six semaines du cessez-le-feu, mettant en péril les otages encore retenus en captivité et replongeant Israël la tête la première dans la guerre, avec une issue indéterminée.

Mais Netanyahu fera probablement l’objet de pressions extraordinaires de la part de Trump. Le nouveau président américain, qui aime être reconnu comme un négociateur hors-pair, s’est vanté d’être parvenu à sceller l’accord « en moins de trois mois et en n’étant pas seulement président ». Il se dit qu’il lorgnerait sur le prix Nobel.
Dans un entretien qui a été accordé samedi, Trump a indiqué que l’accord « ferait mieux de se maintenir… Il faut que ça cesse ». Et dans son discours d’investiture, dimanche, il a affirmé que « nous mesurerons nos réussites non seulement à l’échelle des batailles que nous remporterons mais aussi à l’échelle des guerres auxquelles nous mettrons un terme – et, plus important encore, à l’échelle des guerres dans lesquelles nous n’entrerons jamais. L’héritage dont je serai le plus fier sera celui d’un faiseur de paix. »
S’il s’est querellé de manière répétée avec les membres de l’administration Trump, Netanyahu sera moins susceptible de souhaiter provoquer l’agacement de Trump – un homme qui est connu pour ses petites rancunes, pour faire de la politique une affaire très personnelle et un homme qui pourrait également, en tant que président des États-Unis, accorder à Netanyahu de nombreuses choses qui figurent actuellement sur sa wish list.
Netanyahu a de nombreuses décisions à prendre au cours des six prochaines semaines – et il pourrait bien réfléchir à la possibilité de se procureur un exemplaire du livre écrit par le président Trump, « The Art of the Deal ».
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