Avec une opération terrestre encore en option, le temps n’est pas du côté d’Israël
Le gouvernement dispose de plusieurs options pour une opération terrestre à Gaza, mais doit décider si les résultats valent le prix du sang
Mitch Ginsburg est le correspondant des questions militaires du Times of Israel
À la mi-mai, le commandant de l’armée de l’air israélienne affirmait devant un auditorium rempli d’hommes aux cheveux blancs – la plupart des vétérans de l’aviation – qu’en 2014 Israël ne peut plus se payer « le luxe d’une guerre d’un mois ».
Le Général Amir Eshel a dit que le nombre de cibles frappées par l’aviation pendant les 34 jours de guerre au Liban en 2006, pourraient être touchées « en moins de 24 heures aujourd’hui ».
La puissance de feu déployée à partir de l’air en huit jours pendant l’opération Pilier de défense en 2012, a-t-il ajouté, pourrait prendre « moins de 12 heures aujourd’hui ».
Le point, semble-t-il, est le suivant : Israël d’après Goldstone, ne peut pas se permettre d’être traîné dans la boue internationale à cause d’une guerre prolongée et ne peut plus exposer ses citoyens et son économie pendant des semaines à des tirs de roquettes ; par conséquent, à l’aide, principalement, de renseignements acquis de satellites, et de munitions précises, Israël se devait de gagner, ou au moins conclure rapidement, tout futur conflit.
Nous sommes « à l’ère [du pouvoir] du feu », a déclaré Eshel. Et parce que la force militaire, depuis au moins l’époque de Napoléon, est vue comme étant composée à parts égales de la puissance de feu et de manœuvres terrestres, on peut déduire qu’Eshel, un homme qui dégage une compétence charismatique, voulait dire que nous ne sommes plus à l’ère de l’opération terrestre.
Cependant, malheureusement pour Israël, il semblerait que le Hamas, avec sa volonté d’endurer la souffrance terrible, a des notions tout a fait différentes du temps et des buts à atteindre, est resté très fermement à cette ère.
Et avec la 49ème journée de l’opération Bordure protectrice, on peut se demander si, après une invasion terrestre limitée mais coûteuse, Israël va en lancer une autre et quelle forme elle pourrait prendre.
Une option pourrait etre une nouvelle opération limitée destinée à répondre à la menace de tirs de mortier.
Le Hamas a remarquablement prouvé son habilité à diriger sa doctrine de combat loin des points forts d’Israël.
Si Israël dispose de munitions précises, le Hamas a alors placé ses centres d’armement et de commandement dans les hôpitaux et à proximité des centres civils ; si Israël a des capacités de renseignement électromagnétique très avancés, le Hamas s’est tourné alors vers des coureurs et d’autres formes primitives de communication ; si Israël contrôle le ciel et voit tout d’en haut, le Hamas s’est taillé un réseau souterrain d’où il lance des embuscades et des tirs de roquettes ; et si, entre autres, les ingénieurs israéliens ont fabriqué un moyen de d’intercepter dans les roquettes du Hamas, le Hamas a évolué vers des obus de mortier, qui ont une portée limitée, mais qui sont en grande partie à l’abri des capacités du Dôme de fer.
Une offensive terrestre de ce genre aurait pour but d’étouffer la plupart des tirs de mortier et peut-être couper la bande de Gaza en trois secteurs, appliquant ainsi une pression supplémentaire sur le Hamas et le forçant à revenir à la table de négociations au Caire dans une ambiance plus conciliante. Il faudrait également, après la poussée initiale, une présence largement statique des troupes de l’armée, ce qui en ferait une cible facile pour les activistes du Hamas.
Pour l’instant, la direction israélienne a évité cette option, préférant, après plusieurs semaines de réticence, de payer la relocalisation temporaire des résidents à portée des mortiers de la bande de Gaza et, de toute évidence, permettant à l’armée de l’air d’accroître ses attaques, ciblant les commandants du Hamas et des complexes résidentiels que l’armée israélienne dit aussi servir comme centres de commandement et de contrôle du Hamas.
Kobi Michael, chercheur à l’institut de réflexion INSS et ancien chef du desk palestinien au ministère des Affaires stratégiques, dit comprendre la raison de l’appel à la persévérance et de la stratégie de guerre d’usure du gouvernement, « parce que, dans l’ensemble, cela fonctionne en notre faveur ».
Et d’expliquer que l’Egypte ayant fermé les tunnels avec la bande de Gaza et le Hamas disposant de moins en moins d’armes, le temps semblait objectivement travailler pour Israël.
Cependant en tant qu’habitant d’Ashkelon, et ancien membre de l’administration municipale dans la ville balnéaire, a-t-il dit, « je ne pense pas que les gens du Sud soient prêts à porter ce fardeau ».
Une opération au sol, à ce stade, a-t-il suggéré, n’implique pas nécessairement une occupation complète de la bande de Gaza, mais plutôt un coup ciblé contre le personnel et l’infrastructure militaires de l’organisation, l’affaiblir au point de l’amener à faire des compromis.
Il a dit qu’il suppose qu’ « il n’y a pas mal de données » sur l’emplacement des centres de commandement et de contrôle du Hamas et de ses cadres supérieurs.
Une telle opération, si elle veut avoir une chance de succès, a-t-il ajouté, doit être initiée par Israël et constituer une surprise.
Affirmant que chaque jour qui passe « érode le potentiel » d’une éventuelle opération terrestre,« il serait très mauvais si nous la commencions après qu’une [roquette] Grad soit tombée sur une école. »
Cependant, à ce stade, il est difficile de savoir dans quelle mesure une opération terrestre pourrait contraindre le Hamas à hisser un drapeau blanc, comme le ministre des Affaires étrangères Avigdor Liberman l’a suggéré vendredi, et si le bénéfice obtenu à la table des négociations vaudrait le prix du sang.