Balad, la faction renégate de la Liste arabe unie qui a rejetté Gantz
Le parti nationaliste arabe laïc s'oppose à un État exclusivement juif, a longtemps courtisé la controverse avec des membres tels que Azmi Bishara, Hanin Zoabi et Basel Ghattas

Les trois membres de la faction Balad au sein de la Liste arabe unie ont ignoré une réunion dimanche avec le président Reuven Rivlin, au cours de laquelle les représentants de l’alliance des quatre plus grands partis à majorité arabe ont pris une décision très inhabituelle pour recommander Benny Gantz, le dirigeant de Kakhol lavan comme Premier ministre.
C’était la première fois qu’un parti à majorité arabe soutenait officiellement un candidat sioniste au poste de Premier ministre depuis 1992, date à laquelle Hadash et le Parti démocratique arabe ont recommandé feu Yitzhak Rabin.
Quelques minutes après la fin de la réunion, Balad a publié un communiqué expliquant son opposition à la recommandation de Gantz, ancien chef d’état-major de Tsahal, en raison de son « idéologie sioniste, ses positions de droite peu différentes de celles du Likud, son histoire militaire sanguinaire et agressive » et autres raisons.
Lundi matin, une lettre du député de la Liste arabe unie Ahmad Tibi à Rivlin a été révélée, disant que seules les factions Hadash, Taal et Raam devraient être considérées comme recommandant Gantz. Il a écrit que les membres de Balad à la Knesset inscrits sur la Liste arabe unie lui avaient demandé de faire cette clarification.
Sans l’appui des trois députés de Balad, Gantz a perdu son étroite avance sur Benjamin Netanyahu en termes de nombre de législateurs l’appuyant pour devenir Premier ministre.
Rivlin a en fin de compte le droit de décider à qui accorder l’opportunité de former un gouvernement, mais le président le donne habituellement au législateur qui a le plus grand nombre de recommandations parmi les 120 membres de la Knesset.

Aujourd’hui sous les feux de la rampe, Balad fait partie du Parlement israélien depuis plus de 20 ans.
Qu’est-ce que Balad ?
Balad est un parti nationaliste à majorité arabe qui a été créé dans les années 1990. Son nom est un acronyme hébreu pour « Alliance nationale démocratique », [Brit Le’umit Demokratit], et il opère principalement dans les communautés arabes à travers Israël.
Balad rejette catégoriquement l’idée qu’Israël est un État exclusivement juif et soutient fermement sa transformation en un pays où les Arabes et les Juifs jouissent des mêmes droits nationaux et civils. Selon son site Internet, le parti considère « les Arabes palestiniens en Israël comme faisant partie du peuple palestinien et de la nation arabe ».
En février, le président de Balad, Jamal Zahalka, qui était auparavant député représentant la faction, a déclaré lors d’un événement du parti : « Balad fait partie du mouvement national palestinien. Nous ne sommes pas la gauche israélienne. »

Le parti s’est présenté pour la première fois à la Knesset en 1996 dans une coalition avec la faction socialiste Hadash, et l’un de ses fondateurs a été élu au Parlement.
Depuis 1996, Balad fait partie de chaque Knesset. Lors du vote national de la semaine dernière, trois de ses membres ont été élus au Parlement dans le cadre de la Liste arabe unie.
Le parti compte également plusieurs institutions, dont un Congrès général qui se réunit occasionnellement pour décider de la politique de Balad et élire ses dirigeants.
Quelles sont les principales orientations de Balad ?
Le programme politique de Balad stipule que le parti soutient la reconnaissance des Arabes israéliens en tant que minorité nationale avec des droits collectifs nationaux et civils.
Il appelle spécifiquement Israël à garantir que les Arabes israéliens puissent gérer leurs propres affaires éducatives et culturelles ; il exhorte également l’Etat juif à reconnaître leur « lien spécial avec le peuple palestinien, car ils en font partie intégrante ».
Il ajoute que Balad veut l’établissement d’une université arabe en Israël.
Mtanes Shihadeh, un député de la Liste arabe unie représentant Balad, a déclaré dans une interview accordée au Times of Israel en avril : « Nous voulons développer nos propres programmes d’études et les axer sur notre peuple, sa culture, sa langue et son développement économique. Nous voulons aussi nommer notre propre direction dans les écoles. »
Lorsqu’on lui a demandé s’il pensait que sa vision de l’autodétermination minerait l’autodétermination des Juifs, il a répondu : « Les Juifs ont ce droit, mais nous aussi, et le gouvernement doit le reconnaître. »
Alors que les Arabes israéliens, qui représentent environ 20 % de la population d’Israël, gèrent leurs propres municipalités et cantons, le ministère de l’Éducation supervise l’éducation publique dans leurs communautés.
La plate-forme politique de Balad appelle également les autorités israéliennes à élaborer « un plan global et stratégique de lutte contre la criminalité dans la société arabe » en partenariat avec les dirigeants politiques arabes israéliens et les experts concernés.
Elle demande aux autorités de mener des enquêtes « exhaustives » sur les incidents violents, de cesser de donner des armes aux volontaires de la police israélienne, de cesser la production et le renouvellement des permis de port d’armes et autres mesures.

Ces dernières années, les Arabes israéliens ont participé à un nombre beaucoup plus élevé d’incidents de fusillade que les Juifs. Selon un rapport du contrôleur de l’État de 2018, les Arabes israéliens ont commis 17,5 fois plus de délits liés aux armes à feu que les juifs entre 2014 et 2016.
Le programme du parti affirme également que Balad souhaite « la fin de l’occupation de toutes les zones palestiniennes » et le démantèlement de toutes les implantations ainsi que de la barrière de sécurité en Cisjordanie.
De plus, il précise que Balad vise la création d’un Etat palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza avec Jérusalem-Est comme capitale aux côtés d’Israël et une « résolution juste » à la question des réfugiés sur la base de la résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations unies.
Cette résolution stipule que les réfugiés qui souhaitent rentrer chez eux en Israël doivent pouvoir le faire, tandis que ceux qui espèrent s’installer ailleurs doivent recevoir une indemnisation pour les biens perdus.
La plate-forme note également que Balad, qui est un parti laïc, soutient un système de gouvernance fondé sur la séparation de la religion et de l’État, mais qui permet la liberté de culte.
Membres actuels de la Knesset
Mtanes Shihadeh
Shihadeh est le membre le mieux classé de la Liste arabe unie, occupant la deuxième place sur la liste de la Knesset. Il est originaire de Nazareth mais réside actuellement à Isfiya, un village à majorité druze près de Haïfa, avec sa femme et ses trois enfants. Il a rédigé sa thèse de doctorat à l’Université hébraïque de Jérusalem sur l’impact de la mondialisation sur le mode de scrutin israélo-juif.
Après avoir terminé ses études, il a travaillé pendant une quinzaine d’années à Mada al-Carmel, un institut de recherche à Haïfa qui se concentre sur la société et la politique arabes israéliennes. L’institut a été co-fondé par Azmi Bishara, un ancien député Balad recherché par les autorités israéliennes pour espionnage pour le groupe terroriste libanais Hezbollah. Shihadeh est un membre actif de Balad depuis deux décennies et, en 2016, il est devenu secrétaire général du parti.
Heba Yazbak
Mme Yazbak est le deuxième membre le mieux classé de Balad dans la Liste arabe unie, occupant sa huitième place. Elle vient également de Nazareth et est mariée et mère d’un enfant. Selon un article paru en avril dans le journal Haaretz, elle a récemment soumis sa thèse de doctorat au département d’anthropologie et de sociologie de l’Université de Tel Aviv.
Yazbak, qui a rejoint Balad alors qu’elle était étudiante de premier cycle à l’Université de Haïfa, défend les droits des femmes. La presse israélienne a récemment publié sur Facebook un article qu’elle a publié en 2015 pour glorifier Samir Kuntar, un terroriste qui a pris part en 1979 au meurtre barbare de membres d’une famille israélienne à Nahariya. Le post comprenait une photo de Kuntar avec la légende : « Le combattant martyr Samir Kuntar. »
Sami Abu Shehada
Abu Shehada est le troisième membre de Balad le mieux classé de la Liste arabe unie, détenant la 13e place. Il est originaire de Lod mais réside actuellement à Jaffa avec sa femme et ses deux enfants. Il a obtenu une maîtrise en histoire moderne du Moyen Orient à l’Université de Tel Aviv et a travaillé dans la municipalité de Tel Aviv-Jaffa entre 2010 et 2013.
Il a rejoint Balad dans les années 1990 et a occupé un certain nombre de postes de direction au sein du parti. Il a dit qu’il a consacré une grande partie de son temps à combattre les démolitions de maisons à Jaffa.
Les polémiques antérieures
Azmi Bishara
Bishara, l’un des fondateurs de Balad, qui en a été l’un des députés pendant plusieurs années, a été accusé par Israël en 2007 d’espionnage au profit du Hezbollah. Il a nié ces allégations, mais il n’est jamais retourné dans l’État juif depuis début 2007 pour y être jugé.

Hanin Zoabi
Mme Zoabi, qui a été députée de Balad à la Knesset entre 2009 et 2019, a participé à la flottille de Mavi Marmara en 2010 qui visait à briser le blocus maritime d’Israël dans la bande de Gaza dirigée par le Hamas. Dix militants pro-palestiniens ont été tués dans des actes de violence à bord d’un des bateaux de la flottille après avoir attaqué les soldats israéliens qui sont montés à bord de ce navire.
Zoabi a également déclaré à la télévision israélienne en 2014 que l’armée israélienne et le groupe de l’État islamique « sont des armées d’assassins ».
Basel Ghattas
Ghattas, qui a été député Balad à la Knesset entre 2013 et 2017, a plaidé coupable en avril 2017 d’avoir fait passer en contrebande des téléphones cellulaires et des notes à des prisonniers sécuritaires palestiniens. Il a passé environ deux ans en prison et a été libéré en mai 2019.
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