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Chez les Kurdes de Syrie, la peur d’être lâchés par Washington

Washington a annoncé un futur "ajustement" du soutien aux forces kurdes après l'effondrement de l'EI et le rapatriement de 400 Marines déployés en Syrie

Des étudiants kurdes irakiens de l'université Salahddin brandissent des drapeaux turques à Arbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan irakien, le 11 décembre 2017. (Crédit : AFP / SAFIN HAMED)
Des étudiants kurdes irakiens de l'université Salahddin brandissent des drapeaux turques à Arbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan irakien, le 11 décembre 2017. (Crédit : AFP / SAFIN HAMED)

La guerre en Syrie leur a offert une semi-autonomie et la lutte contre les jihadistes les a transformés en enfant chéri des autorités américaines. Mais aujourd’hui, les Kurdes syriens sentent le vent tourner.

Washington a annoncé un futur « ajustement » du soutien aux forces kurdes après l’effondrement du groupe jihadiste Etat islamique et le rapatriement de 400 Marines déployés en Syrie.

Avec un risque de désengagement, une offensive de la Turquie voisine est à craindre selon des analystes et des habitants kurdes, la montée en puissance des Kurdes pendant le conflit ayant provoqué l’ire d’Ankara.

« Nous avons peur que les Etats-Unis nous lâchent après la fin des combats contre l’EI », confie à l’AFP Nada Abbas, professeure d’anglais de 30 ans dans la ville de Qamichli, grande ville à majorité kurde du nord-est syrien.

« Ce sera un cadeau pour la Turquie car elle n’accepte pas que les Kurdes aient leur propre force ; elle nous attaquera », craint-elle.

Estimés à 15 % de la population syrienne, opprimés pendant des décennies sous le régime du clan Assad, les Kurdes ont profité de la guerre déclenchée en 2011 pour établir une autonomie de facto dans les territoires qu’ils contrôlent, dans le nord et le nord-est du pays.

En 2016, ils ont proclamé une « région fédérale » et organisent désormais des élections locales. Ils ont introduit la langue kurde longtemps bannie dans les écoles et ont créé leurs propres forces de sécurité et surtout leur propre milice, les Unités de protection du peuple kurde (YPG).

‘Utilisés comme une carte’

Considérées comme un groupe « terroriste » par Ankara, les YPG ont été la colonne vertébrale de la lutte contre l’EI et pensaient avoir en Washington un partenaire indéfectible, alors que les Etats-Unis ont mis sur pied une coalition internationale anti-jihadistes.

La police turque lance des des gaz lacrymogènes et des canons à eau à Ankara le 8 Octobre 2014, pour disperser des manifestants qui protestaient contre les attaques lancées par les insurgés islamiques de l’Etat visant la ville syrienne de Kobani par les Kurdes, et le manque d’action de leur gouvernement. (Crédit : AFP / Adem Altan)

« La menace de l’EI est toujours présente, l’EI n’est pas fini », martèle Nesrine Abdullah, porte-parole des Unités de protection de la Femme (YPJ), force kurde exclusivement féminine, se référant aux cellules dormantes et attaques sporadiques des jihadistes.

« La Turquie est aussi une menace pour le peuple kurde », poursuit-elle.

« Les forces de la coalition doivent rester pour garantir la sécurité et la stabilité », plaide la responsable.

Mais, à présent, les jihadistes en déroute ne contrôlent plus que quelques portions du territoire syrien et la donne pourrait changer.

« Nous avons peur des Etats-Unis », affirme Rafee Ismaïl, vendeur ambulant d’accessoires à Qamichli. « Depuis longtemps, ils nous utilisent comme carte entre leurs mains. Quand nous ne leur serons plus utiles, ils nous oublieront », estime cet homme âgé de 37 ans.

Pour lui, « après ce qui s’est passé en Irak, nous nous sommes rendus compte que nous (les Kurdes) étions encore faibles ».

Washington a dénoncé le référendum sur l’indépendance organisé le 25 septembre dans la région autonome du Kurdistan irakien. La consultation a été rejetée par le pouvoir central à Bagdad, dont les troupes se sont ensuite emparées des territoires disputés.

Kurdes irakiens avec leurs drapeaux pendant une manifestation appelant le peuple à voter au référendum d’indépendance, à Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan irakien, le 22 septembre 2017. (Crédit : Safin Hamed/AFP)

« Les gens se jouent encore de nous. En Irak, il y a une constitution qui respecte les droits des Kurdes ; en Syrie, nous n’avons rien de ces droits donc nous sommes doublement vulnérables », ajoute Rafee Ismaïl.

Protection russe ?

En 2016, la Turquie a lancé une offensive en Syrie contre l’EI mais aussi les YPG.

« La principale menace pour les Kurdes en Syrie, c’est la Turquie », confirme Nicholas Heras, expert du Center for a New American Security à Washington.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan « a été très clair à ce sujet, dès que les Américains ne seront plus là, il prévoit d’écraser les Kurdes de Syrie », avance-t-il.

Une perspective qui pourrait jeter les Kurdes dans les bras de la Russie, grand rival des Américains dans la guerre complexe qui ensanglante la Syrie.

Moscou, un allié du régime syrien de Bashar al-Assad, a montré des signes de soutien à cette minorité, affirmant notamment que son aviation avait effectué des dizaines de missions de soutien aux milices kurdes dans la lutte anti-EI, notamment das l’est.

« Les rapports entre les YPG et l’armée russe deviennent très spéciaux, souligne M. Heras. La Russie, c’est une assurance pour les Kurdes de Syrie si les Etats-Unis venaient à les abandonner. »

Dans la région kurde syrienne d’Afrine (nord), frontalière de la Turquie et où l’EI n’a aucune présence, les Kurdes ont bénéficié de formations militaires russes.

« Pour une protection face à toute offensive ou occupation turque, Afrine peut compter uniquement sur les Russes, pas sur les Américains », conclut M. Heras.

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