Comment la rupture des liens avec Israël gênera l’armée colombienne et clouera au sol sa flotte
Jérusalem est le seul fournisseur de services pour la flotte vieillissante d'avions de chasse Kfir d'Israël, d'autres armes et en cyber-sécurité ; le commerce en pâtira également
BOGOTA, Colombie (AP) – La Colombie est le dernier pays d’Amérique latine à avoir annoncé qu’elle rompait ses relations diplomatiques avec Israël en raison de sa campagne militaire à Gaza, mais les répercussions pour la nation sud-américaine pourraient être plus importantes que pour d’autres pays en raison d’accords bilatéraux de longue date sur les questions de sécurité.
Mercredi, le président colombien Gustavo Petro a qualifié les actions d’Israël à Gaza de « génocide » et a annoncé que son gouvernement mettrait fin aux relations diplomatiques avec Israël à compter de jeudi. Il n’a toutefois pas évoqué les conséquences de sa décision sur l’armée colombienne, qui utilise des avions de guerre et des mitrailleuses fabriqués par Israël pour lutter contre les cartels de la drogue et les groupes rebelles, ni sur l’accord de libre-échange entre les deux pays, en vigueur depuis 2020.
Dans la même région, la Bolivie et le Belize ont eux aussi rompu leurs relations diplomatiques avec Israël en raison de la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas, qui a débuté en raison de l’assaut du Hamas sur le sud d’Israël, tuant près de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et prenant 253 otages.
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Nous vous proposons un aperçu des liens étroits qui unissent la Colombie à Israël et de leur impact :
Pourquoi la coopération en matière de sécurité entre la Colombie et Israël est-elle importante ?
Depuis l’établissement de relations diplomatiques en 1957, la Colombie et Israël ont signé des dizaines d’accords couvrant un large éventail de domaines, tels que l’éducation et le commerce. Mais rien ne les lie plus étroitement que les contrats militaires.
Les avions de chasse colombiens sont tous de fabrication israélienne. La vingtaine d’avions de combat Kfir de fabrication israélienne a été utilisée par l’armée de l’air colombienne pour lancer de nombreuses frappes sur des camps de guérilla éloignés, contribuant ainsi à affaiblir les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Ces frappes ont joué un rôle déterminant pour amener le groupe rebelle à entamer des pourparlers de paix qui ont abouti à son désarmement en 2016.
Toutefois, la flotte, achetée à la fin des années 1980, est vieillissante et nécessite une maintenance qui ne peut être effectuée que par une entreprise israélienne. Des fabricants français, suédois et américains ont proposé au gouvernement colombien des options de remplacement, mais les priorités de l’administration Petro en matière de dépenses sont ailleurs.
L’armée colombienne utilise également des fusils Galil, conçus en Israël et dont la Colombie a acquis les droits de fabrication et de vente. Israël aide également le pays sud-américain à répondre à ses besoins en matière de cybersécurité.
Cette décision aura-t-elle une incidence sur les contrats militaires conclus par la Colombie avec Israël ?
La question n’est pas encore tranchée.
Le ministère des Affaires étrangères colombien a déclaré dans un communiqué jeudi que « toutes les communications liées à cette annonce se feront par les voies officielles établies et ne seront pas rendues publiques. » Le ministère n’a pas répondu à la demande de commentaire de l’Associated Press, et l’ambassade d’Israël à Bogota a refusé de discuter de l’affaire.
Pourtant, un jour avant l’annonce de Petro, le ministre colombien de la Défense, Iván Velásquez, avait déclaré aux législateurs qu’aucun nouveau contrat ne serait signé avec Israël, mais que les contrats existants seraient honorés, notamment ceux concernant la maintenance des chasseurs Kfir et un autre relatif aux systèmes de missiles.
Velásquez a expliqué que le gouvernement a créé un comité de « transition » qui s’efforcera de « diversifier » les fournisseurs afin d’éviter la dépendance à l’égard d’Israël. Il a ajouté que l’une des possibilités envisagées était le développement d’un fusil par l’industrie militaire colombienne pour remplacer le Galil.
La coopération en matière de sécurité est au cœur des tensions entre les deux pays. En octobre, Israël a déclaré qu’il mettrait fin aux exportations d’équipements de sécurité vers la Colombie en raison du refus de Petro de condamner l’attaque du Hamas contre le sud d’Israël le 7 octobre, qui a déclenché la guerre, et des comparaisons faites par le président entre les actions d’Israël dans la bande de Gaza et celles de l’Allemagne nazie. En février, Petro a annoncé la suspension des achats d’armes à Israël.
Selon le général à la retraite Guillermo León, ancien commandant de l’armée de l’air colombienne, les capacités militaires du pays seront affectées si l’administration Petro ne respecte pas ses obligations contractuelles ou si elle les respecte mais refuse d’en signer de nouvelles.
« À la fin de l’année, la maintenance et les pièces de rechange seront épuisées et, à partir de ce moment-là, la flotte se retrouvera rapidement dans une situation où nous n’aurons plus les moyens de la soutenir », a-t-il déclaré à l’agence de presse AP. « Cette année, trois avions ont été retirés du service parce qu’ils ne respectaient pas les exigences de leur cycle de vie. »
Quelles sont les relations commerciales entre les deux pays ?
Un accord de libre-échange entre la Colombie et Israël est entré en vigueur en août 2020. Israël achète désormais 1 % du total des exportations colombiennes, qui comprennent le charbon, le café et les fleurs.
Selon le ministère colombien du Commerce, les exportations vers Israël ont totalisé 499 millions de dollars l’année dernière, soit une baisse de 53 % par rapport à 2022.
Les importations colombiennes en provenance d’Israël comprennent des équipements électriques, des plastiques et des engrais.
Aucun des deux gouvernements n’a indiqué si la querelle diplomatique affecterait les accords commerciaux.
L’équipe du Times of Israël a contribué à cet article.
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