Comment préparer les enfants au retour à l’école malgré la pandémie ?
La professeure Limor Aharonson-Daniel prodigue quelques conseils, notamment celui d'apporter aux enfants des informations factuelles afin d'éviter toute anxiété de leur part

Les écoles maternelles et primaires israéliennes vont progressivement rouvrir leurs portes.
Comment les parents, qui ont été ces dernières semaines en permanence avec leurs enfants, pour éviter toute exposition au virus et à leur inculquer des notions d’hygiène, peuvent-ils les préparer à ce retour en classe ?
Le Times of Israël s’est entretenu avec la professeure Limor Aharonson-Daniel, experte en santé publique, directrice du PREPARED Center for Emergency Response Research à l’université Ben Gurion du Néguev.
Elle apporte ainsi des conseils aux parents et aux enseignants et prédit que ce retour à l’école placé sous le signe de l’anxiété et du gel hydroalcoolique sera compliqué. Mais si les parents sont suffisamment informés, ils parviendront à relever ce défi.
1. Qu’est-ce qui est crucial pour un retour à l’école serein et sécurisé ?
Le plus important, c’est que les enfants se sentent en position de contrôle. Quand les gens ont le sentiment de maîtriser ce qui leur arrive, ils sont moins anxieux ou angoissés. Ici, il est question de connaissances. Donnez-leur des faits. Les enfants sont assez intelligents pour comprendre le mécanisme de contamination, la notion de surfaces contaminées, pourquoi les virus est inquiétant, et comment il fonctionne. S’ils comprennent la situation sur le plan cognitif – et il n’est pas question de se limiter à des « ne fais pas ceci ou cela » – ils développeront probablement moins d’anxiété.

2. Devons-nous également les briefer sur la façon de réagir s’ils s’exposent à des risques ?
Oui. Il faut leur dire ce qui se passe s’ils touchent une surface contaminée. Dites-leur que ce n’est pas la fin du monde : « ne panique pas, va te laver les mains soigneusement à l’eau et au savon. » C’est une chose importante à enseigner. Nous ne voulons pas que les enfants soient terrifiés.
3. On espère que les parents donneront des informations précises à leurs enfants, mais qu’en est-il des échanges qu’ils auront avec les autres enfants ? Faut-il craindre que les enfants partagent entre eux de fausses informations au sujet du virus et s’effraient mutuellement ?
La quantité d’infox que nous recevons est énorme, et il en va de même pour les enfants. Mais je pense que les enfants, notamment à partir du primaire, peuvent être plus malins que nous pour détecter une infox.
4. Les enfants veulent se retrouver, mais la lutte contre le virus passe par la distanciation sociale. Comment apprenons-nous à nos enfants à se comporter en présence d’autres enfants ?
Je leur expliquerais que c’est une situation temporaire, jusqu’à ce que la maladie disparaisse, et qu’ils doivent essayer, autant que possible, de ne pas être tactiles. Mais d’un autre côté, ils ont besoin de jouer, et l’une des raisons derrière la reprise de l’école, c’est l’aspect social. Ils doivent interagir. Ils doivent jouer, mais faire l’effort de choisir des jeux qui n’impliquent pas de contact physique étroit.
5. Quelles instructions donner au sujet du lavage des mains ?

Dites leur de se laver les mains toutes les quelques heures, ainsi qu’avant et après manger. Mais les écoles devraient prendre conscience que des attroupements d’enfants autour des éviers peuvent potentiellement poser problème. Ce serait une bonne chose d’avoir des pots de désinfectant un peu partout, pas juste pour les utiliser, mais pour rappeler aux enfants que tout n’est pas comme d’habitude.
6. Doit-on craindre que, avec l’accent mis sur le lavage des mains, les enfants finissent par développer des pratiques d’hygiène compulsives, comme un trouble obsessionnel compulsif ?
Je pense qu’il y a un risque, et il faut être vigilant. C’est également vrai pour les adultes. Nous nous lavons tous beaucoup les mains en ce moment. Certains reprendront leurs habitudes après la crise, d’autres auront besoin d’une forme d’intervention, même si c’est trop tôt pour parler de ça, parce qu’à l’heure actuelle, le lavage des mains reste impératif.
7. Les enfants israéliens emmènent habituellement leur casse-croûte à l’école et à la maternelle, et les enseignants distribuent une collation. Quels changements faut-il prévoir ?
Les enseignants ne devraient pas utiliser d’assiette de service pour proposer des aliments à un groupe. Ils doivent, au lieu de cela, servir les portions individuellement. Les parents doivent préparer la nourriture de sorte que l’enfant puisse la manger sans avoir besoin d’une aide extérieure pour déballer ou couper la nourriture.
8. De manière générale, les établissements scolaires évitent le recours aux ustensiles jetables pour des raisons d’écologie, mais en ce moment, y-a-t-il une exception concernant l’usage du jetable au nom de la lutte contre le virus ?
Si les enseignants ne peuvent pas certifier le niveau de lavage des ustensiles, j’opterais pour le jetable le temps de voir venir. Mais si l’usage du jetable ne convient pas, il faut s’assurer que le lavage de la vaisselle soit très efficace. Il se peut qu’il faille mettre l’accent sur le nécessité de trouver le savon le plus fiable qui soit, ou faire tremper la vaisselle dans du désinfectant.

9. Au début, il n’était question que de rescolariser les plus jeunes, mais on parle également désormais de la reprise des lycées. Y-a-t-il une approche spécifique à avoir pour parler à des adolescents ?
Le conseil est le même et l’approche sur le partage d’informations est la même, mais les chances qu’ils se conforment aux directives que vous instaurerez sont plus faibles.
10. Que suggérez-vous pour répondre à cela ?
Il pourrait être utile de se concentrer sur les meneurs dans les classes. Si j’étais un éducateur dans un lycée, je chercherais des meneurs parmi les élèves de la classe, et je m’assurerais qu’ils sont responsables, en espérant que les autres suivront.