Cour suprême : Le procès des enfants yéménites disparus doit être instruit
Des familles poursuivent l'État pour la disparition de 11 enfants après leur arrivée dans les années 1950 ; les juges citent des "craintes préoccupantes au sujet du mode d'action"
![Enfants yéménites arrivés en Israël grâce à l'opération Tapis volant, devant un avion d'Alaska Airlines. (Crédit : Autorisation AJM) Enfants yéménites arrivés en Israël grâce à l'opération Tapis volant, devant un avion d'Alaska Airlines. (Crédit : Autorisation AJM)](https://static.timesofisrael.com/fr/uploads/2017/09/Yemenite-Airlift-Kids-with-Plane-640x400.jpg)
La Haute Cour de justice a chargé mardi un tribunal de district d’examiner un procès contre l’État et l’Agence juive, intenté par des immigrants yéménites qui affirment que leurs enfants et leurs frères et sœurs leur ont été enlevés par les autorités dans les années 1950.
La poursuite en indemnisation vise à forcer l’État à accepter la responsabilité d’au moins 11 nourrissons dont on sait qu’ils ont disparu des institutions publiques telles que les hôpitaux et les garderies après l’arrivée de leur famille en Israël entre 1948 et 1954.
Dans sa décision, la cour a écrit qu’il y a « des préoccupations inquiétantes au sujet d’un modèle d’action de la part des intimés ».
Les plaignants affirment que les enfants ont été enlevés à leurs parents par les autorités israéliennes qui ne leur ont jamais dit ce qu’il était advenu d’eux. Ils font valoir que les incidents n’étaient pas un assortiment de cas sans lien entre eux mais qu’ils reflétaient plutôt une politique de l’époque.
Chacune des affaires citées dans la plainte présente des circonstances différentes et devrait être clarifiée individuellement plutôt que collectivement. Regrouper les affaires en une seule poursuite pourrait retarder la conclusion, a dit l’État.
En février, un tribunal de district avait rejeté la plainte après avoir accepté l’argument de l’État, ce qui a conduit à la saisine de la Haute Cour.
Dans sa décision de mardi, la Haute Cour a estimé qu’il « semble y avoir une base commune qui unit les histoires personnelles de toutes les familles ».
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Quelque 49 000 Juifs yéménites ont été conduits dans l’État d’Israël naissant dans le cadre de l’opération « Tapis volant » en 1949-50. Depuis les années 1950, plus de 1 000 familles – pour la plupart des immigrants du Yémen, mais aussi des dizaines de personnes originaires des Balkans, d’Afrique du Nord et d’autres pays du Moyen Orient – ont affirmé que leurs enfants avaient été enlevés dans des hôpitaux israéliens et placés en adoption, parfois à l’étranger, dans ce qu’on appelle l’affaire des enfants yéménites.
Contestée par les spécialistes et apparemment réfutée par trois commissions d’État qui ont examiné la question et conclu que la plupart des enfants étaient morts, l’affaire n’a cessé de refaire surface, notamment parce que la plupart des familles n’ont pas récupéré le corps de leurs enfants ni été informées de leur lieu de sépulture.
Les familles ont constaté que de nombreux certificats de décès des enfants étaient truffés d’erreurs et que la plupart des enfants disparus avaient reçu des avis de conscription de l’armée envoyés à leur famille 18 ans après leur décès présumé. Il y a également eu des cas sporadiques d’enfants adoptés qui ont pu confirmer, grâce à des tests ADN, qu’ils étaient issus de familles yéménites à qui l’on avait annoncé leur décès.
Un rapport de 2001 de la commission d’État Cohen-Kedmi sur la question a conclu qu’il n’y avait aucune preuve d’un effort systématique ou parrainé par l’État pour retirer les enfants à leurs familles, et que la grande majorité d’entre eux étaient morts comme on l’avait dit aux familles – mais aussi que 69 enfants avaient disparu sans laisser de trace dans les hôpitaux publics et autres institutions, dont les représentants avaient alors menti aux familles sur leur sort.
Ces allégations ont également été liées à la négligence et à la marginalisation avec lesquelles de nombreux immigrants juifs du monde musulman ont été accueillis lorsqu’ils sont arrivés dans un Israël contrôlé à l’époque par une élite juive ashkénaze.