Crise des opioïdes: Teva conclut un accord de 21 M de $ avec le Rhode Island
L'accord prévoit que la filiale américaine du géant israélien de médicaments fournisse 78 millions de dollars de traitements pour la prévention et la guérison des dépendances
Ricky Ben-David est journaliste au Times of Israël
Teva Pharmaceuticals, la filiale américaine du géant israélien des médicaments génériques Teva Pharmaceutical Industries, versera à l’État américain du Rhode Island 21 millions de dollars à l’issue d’un accord sur les plaintes liées aux opioïdes et fournira des médicaments génériques soulageant la dépendance aux opioïdes et aidant à la récupération, pour une valeur de 78,5 millions de dollars.
Selon l’accord, les 21 millions de dollars seront versés à l’état du Rhode Island sur une période de 13 ans, et des doses de Narcan (vaporisateur nasal de chlorhydrate de naloxone) et de buprénorphine naloxone, un médicament opioïde sous forme de comprimé connu sous le nom de marque Suboxone) seront, eux, disponibles pendant 10 ans, a déclaré Teva dans un communiqué ce lundi.
L’accord est le dernier en date d’une série d’arrangements liés aux opioïdes conclus par Teva et des États américains, dont la Louisiane, la Californie et le Texas, sur fond de soupçons persistants selon lesquels Teva et d’autres fabricants de médicaments comme Johnson & Johnson, Endo International ou Allergan d’AbbVie auraient utilisé un marketing trompeur pour vendre des médicaments opioïdes, en minimisant les risques de dépendance.
La Louisiane a affirmé que Teva et d’autres sociétés pharmaceutiques « se sont livrées à un marketing frauduleux concernant les risques et avantages des opioïdes sur ordonnance, ce qui a contribué à alimenter la crise des opioïdes en Louisiane ». Teva a conclu un accord de 15 millions de dollars avec cet état en septembre dernier.
Fin décembre, un jury de la banlieue de New York a statué que Teva Pharmaceuticals avait contribué à la crise des opioïdes, dans l’un des verdicts rendus parmi des milliers de poursuites judiciaires en cours à l’échelle nationale concernant les analgésiques. Le jury a conclu que la société pharmaceutique avait joué un rôle dans ce que l’on appelle légalement une nuisance publique, avec des conséquences mortelles. Teva a déclaré à l’époque qu’elle « n’était pas du tout d’accord » avec le verdict et prévoyait de faire appel.
Le procès de New York de 2019 contre Teva, connue pour ses médicaments génériques, s’est concentré sur Actiq et Fentora, deux médicaments à base de fentanyl approuvés pour certains patients atteints de cancer. Teva les a promus à plusieurs reprises, et plus largement, pour d’autres types de douleur, dans une « stratégie de marketing trompeuse et dangereuse », pouvait-on lire dans l’acte d’accusation.
Teva a déclaré lundi chercher activement à négocier un accord à l’échelle du pays, comme l’ont fait d’autres fabricants de médicaments.
Les firmes pharmaceutiques et distributeurs ont été confrontés à des milliers de mises en cause de la part des autorités étatiques et locales selon lesquelles elles auraient contribué à alimenter l’épidémie de dépendance et de surdose aux États-Unis, une crise sanitaire qui a coûté la vie à près de 500 000 Américains depuis 1999, selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
Dans tout le pays, les gouvernements fédéraux et nationaux, les tribus amérindiennes, syndicats, districts scolaires et autres ont poursuivi l’industrie pharmaceutique dans le cadre de ces analgésiques.
Le mois dernier, Johnson & Johnson et trois grands distributeurs (AmerisourceBergen, Cardinal Health et McKesson) ont finalisé des accords nationaux d’une valeur de 26 milliards de dollars sur leur responsabilité dans la crise de la dépendance aux opioïdes.
Teva faisait initialement partie de ce groupe qui, en 2019, a offert un règlement évalué à 48 milliards de dollars combinés. La société a offert 250 millions de dollars en espèces et 23 milliards de dollars sous forme de médicaments gratuits.
Mais l’accord national de 26 milliards de dollars a été conclu sans Teva, qui a traité les plaintes au fur et à mesure qu’elles se présentaient. C’est parce que la société n’a pas offert autant de liquidités, en partie à cause d’une dette de plus de 20 milliards de dollars, a indiqué le PDG de Teva, Kåre Schultz, en juillet dernier.
À la mi-décembre, un juge fédéral a rejeté l’accord de grande envergure du fabricant d’OxyContin Purdue Pharma visant à régler des milliers de plaintes liées aux opioïdes.
Les entreprises n’admettent pas avoir commis d’actes répréhensibles et continuent de se défendre contre les accusations selon lesquelles elles auraient contribué à la crise des opioïdes.
Teva a déclaré lundi que l’accord conclu avec le Rhode Island n’était « pas un aveu de responsabilité ou d’actes répréhensibles » et a promis de « continuer à se défendre devant les tribunaux ».
Les accords devraient donner un coup de pouce significatif aux efforts visant à inverser la crise dans les endroits qu’elle a dévastés, dont de nombreuses régions rurales de l’Amérique.
Bien que les fonds négociés dans les accords se soient pas directement reversés aux victimes de dépendance aux opioïdes ou à leurs survivants, la plus grande partie doit être utilisée pour faire face à l’épidémie. Les représentants de l’État envisagent des campagnes de sensibilisation du public et des infrastructures de traitement et de désintoxication.
Alors que les surdoses mortelles continuent de faire rage à travers les États-Unis, en grande partie à cause de la propagation du fentanyl et autres opioïdes synthétiques produits illégalement, les experts en santé publique exhortent les gouvernements à utiliser cet argent pour assurer l’accès au traitement des toxicomanes.
Ils soulignent également la nécessité de financer des programmes qui ont fait leurs preuves, de recueillir des données sur les actions et de lancer des campagnes de prévention destinées aux jeunes, respectant l’équité raciale.