Des dessins de Mahomet censurés à l’expo Charlie Hebdo à Tel Aviv ?
Un dessin enlevé, un autre partiellement couvert à la commémoration des meurtres ; l’hôte dément une intervention de l’ambassade

Deux caricaturistes israéliens ont vu leurs dessins censurés à l’exposition à Tel Aviv pour la commémoration de l’attentat terroriste de l’année dernière dans les bureaux parisiens du magazine satirique Charlie Hebdo, ont rapporté dimanche des médias hébraïques.
Les travaux auraient été censurés après que l’ambassade de France a exprimé des inquiétudes sur la représentation du prophète Mahomet, selon Globes et NRG.
Les caricaturistes Vladik Sandler et Roy Friedler ont soumis des dessins à l’exposition « Après Charlie » – un hommage aux 11 personnes, dont 5 dessinateurs, qui ont été assassinées dans l’attentat du 7 janvier 2015.
L’exposition a ouvert jeudi et se tiendra pendant le mois de janvier à l’Institut français, dans le centre de Tel Aviv.
Le dessin de Sandler, qui représentait Mahomet comme un modèle de nu pour les cinq caricaturistes assassinés dans l’attentat de l’année dernière, a été retiré de l’exposition. Parallèlement, un autocollant a été placé sur l’image de Mahomet dans le dessin de Friedler où les caricaturistes vont au paradis, et se retrouvent face à Mahomet à la réception. Dans la légende, l’un des caricaturistes dit : « Mes amis, je pense que nous sommes foutus… »
Dans un post publié samedi sur Facebook, Sandler a écrit : « J’ai envoyé deux caricatures à l’exposition, et les deux montraient d’une manière ou d’une autre le fait que depuis les attentats, Mahomet n’est pas dessiné dans les journaux. A ma grande surprise, quand je suis arrivé au vernissage de l’exposition, j’ai découvert qu’après une demande spéciale de l’ambassade de France, l’une de mes caricatures avait été enlevée ».
Sandler a écrit que bien qu’il ne dessine habituellement pas d’images « provocantes » et « insensibles », il a senti que dans ce cas, il était approprié de dessiner une image en hommage aux caricaturistes assassinés de Charlie Hebdo, dont le magazine a été ciblé spécifiquement à cause de la publication de dessins montrant le prophète.
« Les conclusions et les calculs des gagnants et des perdants, les gens peuvent le faire eux-mêmes », a écrit Sandler à propos de sa réaction à l’enlèvement de l’un de ses dessins.
« Mais il me reste un sentiment d’aigreur terrible. Ces personnes, dont le seul crime était l’humour noir, sont mortes pour rien, et tout l’héritage symbolique qu’ils auraient pu vouloir laisser derrière eux est parti à la poubelle ou est caché derrière un autocollant rouge de censure. »
A propos de la censure de son dessin, Friedler a déclaré au site du Globes qu’il avait découvert le problème la veille de l’ouverture de l’exposition.
« Ils m’ont demandé de participer à l’exposition, et la veille de l’ouverture ils m’ont dit qu’il y avait un problème [avec mon dessin], a déclaré Friedler. Comme je n’ai envoyé qu’un seul dessin, ils voulaient l’exposer et aussi satisfaire l’ambassade, mais ils ont dit que [le dessin] serait soit censuré, soit complètement absent. »
Friedler a également déclaré que la censure de son travail « interférait avec la chute [de la caricature], mais envoyait également un message : le crayon n’a pas battu la Kalachnikov ».
La porte-parole de l’Institut français, Anne Gollion, a déclaré au site d’informations NRG que les accusations n’étaient pas vraies, et que des considérations de places disponibles dictaient quels dessins exposer.
« A ma connaissance, aucune caricature n’a été enlevée du mur, a déclaré Gollion. A cause du peu d’espace disponible pour accrocher les travaux, nous avons dû choisir un ou deux dessins parmi ceux que les artistes ont soumis, et donc tous les travaux que les dessinateurs et les caricaturistes ont soumis ne sont pas exposés. Tous les travaux sont présents dans le catalogue. Aucune pression n’a été exercée sur nous par l’ambassade française, et il n’y a pas eu d’intervention politique. »
« Tout est visible sur la revue éditée par l’Institut. distribuée lors du vernissage et distribuée en trois langues. Toutes les caricatures sont dessus. L’Institut conteste toute censure ; il n’y a eu que des choix artistiques : toutes les caricatures de la revue ne pouvaient être exposées sur le petit espace du café, » a déclaré Anne Gollion au Times of Israël.