Devant les familles des otages, Gallant prône la pression militaire à Gaza
Le ministre de la Défense a affirmé qu'un accord qui envisagerait la remise en liberté des captifs contre celle des prisonniers palestiniens faisait partie d'un "jeu psychologique" d'un Hamas extrêmement "cynique"
Le ministre de la Défense Yoav Gallant a rencontré, dans la journée de lundi, des membres des familles des otages actuellement détenus par les terroristes à Gaza. Il a souligné que la pression militaire exercée par l’armée et les soldats sur le Hamas était plus à même de provoquer la libération des captifs qu’un grand échange de prisonniers.
Gallant a estimé que l’offre soumise par le Hamas de libérer tous les otages qu’il retient en captivité en échange de la remise en liberté des prisonniers palestiniens incarcérés en Israël était « un jeu psychologique » de la part du groupe terroriste, repoussant les appels de certaines familles qui ont demandé qu’un tel accord soit accepté.
« S’il n’y a pas de pression militaire sur le Hamas, rien ne progressera, » a expliqué Gallant aux familles des presque 240 personnes qui se trouveraient actuellement retenues contre leur gré par le Hamas et les groupes terroristes de la Bande de Gaza, selon un communiqué du ministère de la Défense.
Il est le dernier haut-responsable à avoir rencontré les familles des captifs. Le Premier ministre s’était entretenu avec ces dernières samedi, suite à des plaintes qui avaient déploré le désintérêt présumé affiché par le gouvernement sur la question des otages.
« Les histoires publiées par le Hamas entrent dans le cadre d’un jeu psychologique (…) Le Hamas utilise cyniquement ceux qui nous sont chers », a ajouté Gallant, qui a fait remarquer que le groupe terroriste comprenait très bien que ces kidnappings entraînaient la douleur et l’angoisse chez les Israéliens.
Le Hamas a libéré, jusqu’à présent, quatre des 243 captifs qui avaient été enlevés le 7 octobre, quand environ 2 00 terroristes, qui avaient franchi la frontière, avaient pris d’assaut le sud d’Israël, semant la désolation au sein des communautés et tuant environ 1400 personnes, des civils en majorité.
Parmi les otages – qui sont aussi principalement des civils – des femmes, des personnes âgées et des enfants parfois très jeunes. Le plus jeune est âgé de neuf mois seulement.
Israël a juré de détruire le Hamas, qui gouverne Gaza, et de faire tout ce qui sera possible pour libérer les otages. En plus de frappes intensives, l’armée israélienne a envoyé des troupes et des chars dans la bande de Gaza mais elle a limité son incursion terrestre, apparemment de manière à ne rien faire qui mettrait en péril la libération des otages.
« L’offensive terrestre s’accompagne étroitement d’initiatives prises en faveur du retour des otages », a expliqué Gallant aux familles lors d’une réunion organisée au ministère de la Défense de Tel Aviv.
Mais le ministre a aussi paru tempérer les attentes, notant que l’opération serait « complexe » et qu’elle entraînerait aussi « des déceptions ».
« Le retour des otages fait partie intégrante de la victoire », a affirmé Gallant, dont les propos sont venus en écho aux paroles prononcées par les proches des captifs, qui avaient déclaré qu’une victoire, sans retour de leurs êtres chers, aurait une saveur douce-amère.
« Nous combattons des animaux, nous ne combattons pas des êtres humains », a continué le ministre de la Défense. « Ils cherchent l’effondrement de l’intérieur de la société israélienne et ils utilisent les otages de manière brutale ».
Dans un enregistrement de la rencontre qui a été rendu public par la Douzième chaîne, les représentants des familles critiquent le gouvernement pour tous ses manquements avant et lors de l’attaque du 7 octobre. Certains appellent à accepter l’offre du Hamas « tous [les otages israéliens] contre tous [les prisonniers sécuritaires palestiniens en Israël] », certains faisant part de leur inquiétude face à une campagne militaire qui, selon eux, met en danger la vie de leur proche.
« Je vous demande d’accepter cette offre lorsqu’elle vous parviendra, même si elle n’est pas conforme pas à nos conditions », dit une femme – qui serait une représentante des familles – dans l’enregistrement. « Vous [les dirigeants de l’État] avec causé tant de dégâts en ce qui nous concerne qu’il ne sera jamais possible de nous compenser à hauteur des dommages subis mais vous pouvez au moins faire ce qui serait la moindre des choses, à savoir sauver tous ceux qui pourront l’être, quel qu’en soit le prix. Nous n’avons pas de temps à perdre. »
Gallant a rejeté cette formule du « tous contre tous », disant qu’elle était illusoire et qu’elle visait à perturber les Israéliens au niveau psychologique. L’opération terrestre en cours à Gaza permet d’exercer des pressions sur le groupe terroriste, a-t-il insisté.
« Si c’était aussi simple que ça de faire un échange, alors il n’y aurait pas de problème », a-t-il continué.
Présenter, dans les discussions, un éventuel échange de prisonniers comme la solution à tout le reste « est exactement ce que veut le Hamas », a poursuivi Gallant qui a évoqué une tactique visant à entraîner des divisions et la méfiance dans le gouvernement israélien.
« Si les choses étaient comme ça, alors nous procéderions à un échange dès demain matin. Mais ce n’est pas le cas », a-t-il déclaré, selon l’enregistrement.
Des propos qui sont venus appuyer les réponses données aux familles pendant leur entretien, samedi, avec Netanyahu qui avait estimé que « l’essentiel, c’est le degré de pression » exercé sur Gaza.
« Plus fortes seront les pressions, plus importantes seront les chances de faire libérer les captifs », avait ainsi dit Netanyahu, selon son bureau.
Dans l’enregistrement de la réunion avec Gallant, une autre femme déclare que « votre premier et votre seul engagement, c’est le retour des otages. ‘Tout le monde contre tout le monde’ et peu importe le prix ».
Gallant a assuré aux familles que l’opération militaire « prend en considération » la sécurité des captifs, ajoutant que « si nous n’exerçons pas sur eux une pression militaire, nous pourrions bien rester à encore attendre vingt ans [la remise en liberté des prisonniers détenus à Gaza] ».
Certains éléments de l’enregistrement ont été interdits à la publication par le censeur, a précisé la chaîne.
Gal Hirsch, le responsable en charge du dossier des otages, qui a été nommé par le gouvernement, était présent lors de la rencontre ainsi que d’autres officiels du secteur de la sécurité israélienne. Hirsch a été critiqué pour avoir semblé éviter les efforts livrés, à l’international, visant à négocier un accord portant sur la libération des captifs, des efforts qui ont été réalisés sous la houlette du Qatar.
Samedi, le leader du Hamas à Gaza, Yahya Sinwar, a annoncé que son groupe était prêt à procéder à un échange de prisonniers « immédiat » avec Israël.
Vingt-quatre heures auparavant, le porte-parole du Hamas, Abu Obeida, avait demandé la libération de tous les Palestiniens emprisonnés pour des crimes sécuritaires en échange du retour de tous les otages israéliens, a fait savoir l’AFP.
« Le prix à payer pour le grand nombre d’otages de l’ennemi qui se trouvent entre nos mains est de vider les prisons israéliennes de tous les détenus palestiniens », avait-il dit, une déclaration faite devant les caméras de la chaîne de télévision Al-Aqsa, qui est affiliée au Hamas.
Hirsch a aussi rencontré les familles à la résidence officielle du président Isaac Herzog, dimanche matin. Les représentants des familles ont confié au président à cette occasion que l’État juif ne pourrait revendiquer aucune victoire si les captifs n’étaient pas libérés.
Le chef de l’État a répété aux familles que la libération des otages était la priorité absolue du gouvernement et du monde entier.
« Nous devons compter sur l’armée qui les ramènera tous sains et saufs », a dit Herzog. « Le Hamas est un groupe cynique que la faim des résidents de Gaza ou l’absence d’aide humanitaire n’intéressent pas. Tous les pays du monde sont de notre côté ».
Environ 70 membres des familles de 35 otages étaient présents lors de cette réunion, et Herzog devrait en rencontrer d’autres dans les jours à venir.
La colère à l’encontre du gouvernement s’est accrue dans certaines familles des otages, ces derniers jours, alors qu’Israël vient de lancer la première phase de son incursion terrestre à Gaza – une offensive qui, selon certains proches, pourrait bien mettre en danger la vie des captifs.
Ces réunions avec Netanyahu et avec Gallant ont été les premières que les familles ont pu avoir les deux hommes. Elles ont été organisées après une demande publique d’entretien de la part des proches des otages.
Hirsch a précisé que les négociations sont actuellement en cours et que tous les efforts sont livrés pour atteindre les prisonniers et pour obtenir des informations. « Nous voulons réellement mener à bien cette mission et ramener toutes les familles chez elles, saines et sauves », a-t-il commenté.
Jacky Levy, un oncle de la famille Calderon – deux membres de cette famille particulièrement frappée ont été assassinés et trois autres ont été pris en otage à Gaza – a dit à Herzog et à Hirsch qu’il n’avait pas le sentiment que la question des prisonniers retenus contre leur gré à Gaza était une priorité absolue pour le pays, ajoutant que ses proches avaient la même impression.
« Il a fallu beaucoup de temps au gouvernement pour commencer à faire des choses et même comme ça, beaucoup de choses ont été mal faites », a-t-il indiqué. « Pendant trois semaines, la famille a vécu dans une cellule de crise, sans dormir, sans aide réelle du gouvernement. Les responsables jouent le jeu de la politique politicienne ; ils attendent de vous, monsieur le président, que ce soit vous qui vous comportiez en adulte », a-t-il ajouté.