Du porc à la ‘centrification’, comment courtiser l’électorat israélien ?
Leçons d’une fermière de l’Iowa, les éléments manquants à Kahlon et Herzog et autres conseils
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Alors que la campagne prend de l’ampleur, voici cinq idées pour et au sujet de nos dirigeants en puissance.
1. Moshe Kahlon aurait besoin d’un rabbin sépharade
L’ancien ministre des communications au charmant sourire, avec un peu d’autodénigrement et une capacité évidente à se ‘centrifier’, cherche à élargir son attrait.
Ancien opposant à la création d’un État palestinien, il déclare maintenant qu’il serait prêt à céder du territoire en échange de la paix.
Ancien ministre dévoué du Likud, il se plaint maintenant de la pauvreté croissante apparue au cours de la décennie passée, avec principalement des années de règne du Likud.
Ancien allié de Netanyahu, il prend maintenant à son compte les échos de la critique répétée du Premier ministre par le parti travailliste en avertissant qu’Israël ne doit pas négliger sa coopération vitale avec ses amis et alliés.
Tandis qu’il recrute de possibles atouts pour entrer à la Knesset avec son nouveau parti Koulanou, présentant l’ancien ambassadeur d’Israël aux Etats-Unis Michael Oren, aussi né aux Etats-Unis, mercredi, et l’activiste anti-pauvreté Eli Alaluf jeudi, Kahlon devrait aussi penser à chercher une figure majeure dans le monde sépharade orthodoxe.
Enfant d’immigrants libyens, Kahlon était l’un du petit nombre de sépharades à la direction du Likud, et même si le gouffre s’est largement réduit au cours des dernières années passées au Likud, l’origine ethnique constitue encore un facteur pour certains électeurs alors que le cadre politique sépharade ultra-orthodoxe implose sous nos yeux.
Eli Yishai s’est senti obligé de quitter le Shas d’Aryeh Deri et de créer son propre parti, et les premiers sondages indiquent que de nombreux votants pourraient se détourner des deux candidats.
Le Shas avait gagné 11 sièges en 2013, les sondages actuels montrent qu’à la fois le Shas et le parti de Yishai vraisemblablement mal nommé HaAm Itanu (Le peuple est avec nous) s’affrontent pour passer le seuil électoral de la Knesset. Kahlon est bien placé pour tirer parti de la situation.
Recruter ou obtenir le soutien d’une figure du monde Shas en faveur du service dans l’armée, et qui idéalement ne se serait pas brouillé avec feu le rabbin Ovadia Yosef (désolé Haim Amsalem), pourrait aider Kahlon à monter encore plus haut dans les sondages.
2. Le parti travailliste a besoin d’un général, d’un chef du Shin Bet ou du Mossad
Quelqu’un se souvient-il de quand le parti travailliste a gagné une élection ? Il faut revenir aux années 1999, et au court mandat de Premier minsitre d’Ehud Barak. Quand cela fait 15 ans que l’ancien parti de gouvernement a dirigé le pays pour la dernière fois, cela va demander beaucoup d’efforts pour persuader l’électorat que le parti travailliste peut toujours gouverner.
Avec tout le respect dû au petit coup de fouet donné par la fusion avec le parti Hatnua de Tzipi Livni, elle ne va pas attirer beaucoup d’électeurs du centre et du centre droit.
Isaac Herzog, le dirigeant jamais aussi sympathique du parti travailliste, a bien évidemment reçu un entraînement pour savoir comment apparaître plus sûr de soi, mais sa tentative d’attirer la foule à la conférence de presse avec Livni il y a deux semaines, qui a inclus une promesse répétée et énergique d’une « révolution » politique, était quelque peu embarassante. Le parti travailliste a besoin d’une image d’acier que seul un ancien ponte dans la sécurité peut lui fournir.

Les travaillistes Barak et Yitzhak Rabin ont justifié leurs politiques diplomatiques relativement modérées sur la base de leurs précédentes carrières qui les a emmenés jusqu’au sommet de la chaîne de commandement. En équilibrant les risques sécuritaires et les opportunités diplomatiques, on a pensé qu’ils savaient de quoi ils parlaient.
Le problème d’Herzog est que les anciens chefs de sécurité charismatiques et énergiques sont presque en rupture de stock. On avait annoncé il y a dix jours que Yoav Galant, nommé chef de l’armée en 2011 mais ensuite écarté par un scandale, allait se présenter avec le Likud, même si Galant a nié cette information.
L’ancien chef du Shin Bet Yuval Diskin explique qu’il ne veut pas faire de politique pour le moment, et, dans tous les cas il serait certainement trop proche de la gauche pour attirer des électeurs.
L’ancien chef de l’armée Gabi Ashkenazi est disponible, mais contrairement à Galant, il est trop impliqué dans un potentiel pour devenir un atout. Où sont les généraux pragmatiques d’autrefois ? Herzog doit bien se le demander. Son problème est que beaucoup d’électeurs potentiels du parti travailliste, observant le vide du parti en matière de sécurité, pourraient bien se poser la même question.
3. L’électorat est courtisable
« Je suis Joni Ernst. J’ai grandi en castrant des cochons dans une ferme d’Iowa. Alors quand j’irai à Washington, je saurai comment couper les porcs ». Voilà comment une candidate anonyme pour une primaire républicaine dans l’Iowa s’est présentée aux électeurs potentiels dans un publicité télévisuelle au printemps dernier.
Elle est maintenant la sénatrice élue de l’Iowa Joni Ernst (et a par ailleurs visité Israël pour la première fois plus tôt cette année). Ancienne combattante de l’armée américaine qui a servi en Irak et au Kuwaït, et ancienne sénatrice de l’état de l’Iowa, Ernst était une candidate crédible, mais c’est la publicité qui a donné à sa campagne ce qui s’est révélé être l’élément décisif.
Les politiciens israéliens dépensent d’importantes sommes d’argent public pour des campagnes publicitaires, bombardant littéralement l’électorat de publicités généralement rébarbatives. Agacés par l’idée d’être forcé de retourner voter trop tôt, inquiets pour leur sécurité, leur économie et cherchant de l’espoir et des encouragements, l’électorat de 2015 pourrait bien être plus courtisable que de coutume.
Une campagne publicitaire qui offrirait de l’inspiration serait un bon départ. Nous sommes cyniques, à juste titre, au sujet de nos politiciens, et les scandales actuels n’aident pas (on pense aux tout derniers suspects d’Yisrael Beytenu), mais nous sommes à la recherche d’un marketing efficace.
4. Observez encore plus attentivement que d’habitude les sondages
Les archives des enquêtes sur l’électorat israélien est loin d’être impressionant. Mais cela vaut la peine d’être encore plus sceptique que d’habitude à une époque où l’importance politique des médias augmente.
Juste pour donner un exemple d’une enquête très douteuse : un sondage du 9 décembre sur la Dixième chaîne a été mis en gros titre avec frénésie comme montrant qu’Herzog n’était qu’1 % derrière Netanyahu en tant que Premier ministre préféré des Israéliens.
La Dixième chaîne a fait une grande mise en scène du rapprochement drastique de ce qui avait été un écart beaucoup plus important entre les deux, interprétant cela comme une chute dramatique de la position de Netanyahu : un élément réellement susceptible de changer la donne des élections.
Pourant, un examen plus précis a montré qu’on avait donné aux personnes interrogées un choix de sept potentiels Premiers ministres : Netanyahu (qui était favorisé par 23 %), Herzog (22 %), Naftali Bennett (13 %), Gideon Sa’ar (13 %), Moshe Kahlon (10 %), Avidgor Liberman (10 %) et Yair Lapid (9 %). Où est l’embrouille ?
Ces sept noms ne sont pas les chefs de sept partis rivaux. En glissant le nom de Sa’ar dans la liste, les sondeurs ont donné aux personnes interrogées un choix de deux Premiers ministres potentiels du Likud. (L’ancien ministre du Likud Sa’ar avait envisagé un retour politique lorsque le sondage a été réalisé, mais il s’est depuis retiré de la course).
Il n’est donc pas étonnant que Netanyahu « chute » dans le sondage ; il n’était pas seulement en compétition avec des rivaux extérieurs, mais aussi avec des compagnons du Likud.
5. Surveillez les faiseurs de roi
Dans des commentaires du weekend dernier, l’ancienne chef du parti travailliste Shelly Yachimovich a déclaré que la pensée qu’Avidgor Liberman devienne Premier ministre lui donnait la nausée. Elle parlait au milieu de calculs que Liberman, un autre polticien occupé à ‘se centrifier’, pourrait être particulièrement bien placé pour construire une coalition le matin après les élections du 17 mars.
Avec son parti maintenant plongé dans un scandal de corruption qui semble dramatique même par sa dimension incroyable, l’époque d’un Liberman Premier ministre semble maintenant plus distante qu’elle ne l’était il y a encore aussi peu de temps que samedi. Cinq jours sont très longs dans la politique israélienne.
Le fait que ces élections seront déterminées par les centristes et le ‘centrifieur’ reste pourant un possibilité crédible. Avec les autres partis ultra-orthodoxes, c’est une coalition de partenariat entre Yesh Atid, Koulanou et, maintenant dans une moindre mesure Yisrael Beytenu, qui pourrait donner des majorités solides à la droite ou à la gauche.
Cela signifie donc que Lapid et Kahlon, en particulier, pourraient bien être les faiseurs de rois de 2015. C’est la moindre des choses.
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David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel