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En Israël, l’odyssée de couples gays pour des mères porteuses

Si l'Etat hébreu autorise depuis 1996 la gestation pour autrui (GPA), il réserve ce droit aux couples hétérosexuels

Harel Barak (droite) et son mari Yakir Kanneli (gauche) pose avec une poussette dans un parc de la ville côtière israélienne de Tel Aviv, le 14 août 2020.  (Photo par JACK GUEZ / AFP)
Harel Barak (droite) et son mari Yakir Kanneli (gauche) pose avec une poussette dans un parc de la ville côtière israélienne de Tel Aviv, le 14 août 2020. (Photo par JACK GUEZ / AFP)

Harel Barak et Yakir Kanneli sont mariés depuis quatre ans. Mais pour « réaliser leur rêve » de fonder une famille, les deux hommes se sont tournés vers le Canada car le recours aux mères porteuses reste interdit pour les couples homosexuels en Israël.

« Israël est un pays leader de la procréation médicalisée, des couples viennent ici du monde entier pour bénéficier de soins très performants, mais nous, on n’y a pas le droit », déplore Harel, 38 ans, avocat de profession installé à Tel-Aviv.

Si l’Etat hébreu autorise depuis 1996 la gestation pour autrui (GPA), il réserve ce droit aux couples hétérosexuels. En 2018, la Knesset a voté l’élargissement du recours à une mère porteuse aux femmes célibataires ou stériles, mais l’a interdit aux couples de même sexe et aux hommes célibataires.

Des dizaines de milliers d’Israéliens étaient descendus dans la rue pour dénoncer cette exclusion, notamment à Tel-Aviv qui, avec sa Gay pride, se veut l’un des phares de la tolérance envers les homosexuels au Moyen-Orient.

Selon Julien Bahloul, porte-parole de l’Association des pères homosexuels d’Israël, les couples gays souhaitant avoir des enfants doivent trouver une mère porteuse aux Etats-Unis ou au Canada, et débourser plus de 100 000 dollars (85 000 euros).

Des Israéliens participent à un rassemblement pour marquer la gay pride, annulée en raison du coronavirus, à Jérusalem, le 28 juin 2020. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

« En Israël, ça leur coûterait deux fois moins cher », dit-il à l’AFP.

Comme Harel et Yakir, ils sont « des dizaines et des dizaines » à entamer ce processus long et coûteux chaque année, dit-il.

Barrage orthodoxe

Saisie par les associations LGBT, la Cour suprême a donné en février au Parlement un an « pour mettre fin à la discrimination » et changer la loi, afin d’y intégrer « les couples de même sexe et les hommes célibataires ».

Mais le 1er juillet, le Parlement a voté contre le changement de la loi initié par Idan Roll, un député du parti d’opposition centriste, Yesh Atid, lui-même ouvertement homosexuel.

Le président du parti Yesh Atid, Yair Lapid, (à droite) et Idan Roll lors d’une conférence de presse à Tel Aviv, le 7 février 2019. (Flash90)

Comme en 2018, les députés ultra-orthodoxes, très influents au sein de la coalition gouvernementale du Premier ministre Benjamin Netanyahu et traditionnellement opposés à la reconnaissance des structures familiales homosexuelles, ont fait barrage.

Et les députés du parti centriste Kakhol lavan de Benny Gantz, naguère alliés de Yesh Atid mais aujourd’hui membre de la coalition gouvernementale, n’ont pas soutenu le projet malgré leurs engagements passés.

Ils se sont abstenus le jour du vote, probablement pour ne pas se mettre à dos leur partenaires politiques religieux, suppose Idan Roll. « Ils font des combines et ils mentent sur le dos des couples gays qui souhaitent simplement être parents », accuse-t-il.

« Fais-moi des petits-enfants »

Pour Julien Bahloul, le refus du Parlement de modifier jusqu’ici la loi sur la GPA pointe les contradictions d’un pays considéré comme pionnier en termes de droits LGBT mais où l’homosexualité reste un tabou dans les milieux religieux.

« Il y a un énorme décalage entre la mentalité de la société israélienne et ses représentants politiques », dit-il, ajoutant que « tous les sondages indiquent que la grande majorité des Israéliens est favorable au mariage gay et la GPA » (pour les homosexuels).

Cela tient selon lui au fait que dans le monde juif, la famille et les enfants sont au centre de la société. « C’est très important en Israël, il y a d’ailleurs plein de célébrités homosexuelles qui ont des enfants, des ministres papas gays, des députés, c’est devenu banal ».

Harel Barak (gauche) et son mari Yakir Kanneli (droite) pose avec une poussette dans un parc de la ville côtière israélienne de Tel Aviv, le 14 août 2020. (Photo par JACK GUEZ / AFP)

C’est même lorsque les gays ont commencé à élever des enfants qu’ils ont été de plus en plus acceptés, poursuit-il, car ils sont devenus « comme tout le monde ». « D’ailleurs, la blague locale veut que lorsque tu fais ton coming-out, ta mère te
dise : ok, fais-moi juste des petits-enfants ».

Mais pas si simple de payer pour la procréation assistée à l’étranger lorsque, comme Harel et Yakir, le budget est limité. Le couple a contracté plusieurs emprunts et a même mis en place une collecte de fonds pour rassembler la somme nécessaire.

Inscrits sur la liste d’attente de la société canadienne « Babies come true » (« les bébés deviennent réalité ») vers laquelle se tournent de nombreux Israéliens, ils espèrent trouver prochainement une mère porteuse. Une entreprise que complique la fermeture du ciel causée par la pandémie de nouveau coronavirus…

Mais pour Harel, aucun doute : « malgré tous les obstacles nous irons jusqu’au bout, parce qu’avoir un enfant est ce que nous voulons le plus au monde ».

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