Évasions de Gilboa : le directeur de la prison accablé par sa hiérarchie
Pour Arik Yaakov, responsable des services pénitentiaires du district, l’évasion de six prisonniers de sécurité palestiniens « n’aurait pas pu se produire ailleurs »

Un haut responsable de l’administration pénitentiaire israélienne (IPS) s’en est pris lundi au directeur de la prison de Gilboa, Freddy Ben Shitrit, qu’il tient pour responsable de l’évasion de six condamnés palestiniens pour terrorisme, en 2021.
Le commandant du district nord de l’IPS, Arik Yaakov, lui-même éclaboussé par le scandale, a déclaré dans un témoignage devant la commission d’enquête sur l’évasion que Ben Shitrit « avait échoué sur tous les plans ».
« Ce n’est pas une coïncidence si cela s’est produit [à la prison de Gilboa] », a déclaré Yaakov à la commission, refusant de prendre sa part de responsabilité et insistant sur le fait que les circonstances ayant conduit à l’évasion ne reflétaient en rien le district dans son ensemble.
Yaakov a accusé Ben Shitrit d’avoir tout endossé « sans sourciller » et d’avoir notamment accepté ce que son agent de renseignement lui disait, sans remettre les informations en question ni tenter de les recouper.
« Il n’était pas au courant de ce qui se passait. Cela n’aurait pu se produire ailleurs », a accusé Yaakov. « Qu’il ose dire ‘je me suis fié à mon agent de renseignement’ [dans son témoignage] est proprement scandaleux… Le renseignement doit être étayé par des actions », a-t-il rappelé.
À l’époque, Yaakov considérait Ben Shitrit comme un bon directeur d’établissement, a-t-il dit, mais il en est finalement venu à la conclusion que le chef de la prison de Gilboa l’avait manipulé et lui avait menti.
« Je ne m’explique pas un tel écart… Il donnait l’image de quelqu’un qui dirigeait la prison d’une main ferme », a-t-il précisé, ajoutant que « la commission avait donné une toute autre image de sa conduite ».
Yaakov a fait valoir que Ben Shitrit » avait réussi à leurrer toute la hiérarchie de l’IPS ».

Il a rappelé l’existence de plusieurs points d’attention « requérant une action » mais qui ont manifestement été ignorés par Ben Shitrit. C’est notamment le cas de résidus de sable trouvés dans les égouts après l’évasion. Il a évoqué une évasion déjouée à la prison de Shata, grâce à l’information donnée par un détenu qui avait remarqué la présence de sable sur le poignet d’un autre détenu, après qu’il a creusé un tunnel. « La zone [de sécurité] ne devrait comporter ni jardin ni sable », a-t-il affirmé.
Il a également rappelé qu’en application de la politique de l’administration pénitentiaire, les prisonniers présentant un risque élevé d’évasion ne devaient pas être mis dans la même cellule sur de longues durées, comme ce fut le cas à la prison de Gilboa.
Il a relevé que les gardes de sécurité n’avaient pas été faites la nuit de l’évasion, et qu’un gardien avait bien entendu des chiens aboyer, sans toutefois le signaler.
Tout ceci « aurait dû appeler l’attention du commandant de quartier, de l’officier de renseignement et du directeur de la prison », a déclaré Yaakov.
Dans son témoignage devant la commission d’enquête la semaine dernière, Ben Shitrit a concédé avoir commis des erreurs et dit assumer la responsabilité de l’évasion.
« L’erreur est humaine », a-t-il assuré. « Je tiens à préciser que j’assume l’entière responsabilité de ce qui s’est passé dans cette prison. »
Il a toutefois indiqué qu’en sa qualité de directeur, il avait obéi aux ordres. « En ce qui me concerne, j’ai donné les bons ordres. Si mes subordonnés ont mal fait, il m’appartient, en tant que directeur, d’en endosser la responsabilité. »
Sommé par la commission d’expliquer les failles qui ont conduit à l’évasion, Ben Shitrit a déclaré : « C’est un malheureux concours de circonstances. »

La prison de Gilboa fait l’objet d’une autre enquête, suite à la plainte d’une soldate qui a déclaré la semaine dernière avoir été agressée sexuellement – et même violée – par un prisonnier de sécurité palestinien, au vu et au su de sa hiérarchie, alors qu’elle travaillait à la prison de Gilboa.
Ben Shitrit, qui ne dirigeait pas la prison à l’époque des faits, a confirmé en novembre certaines informations selon lesquelles des femmes soldats auraient été « prostituées » auprès de prisonniers palestiniens, dans l’enceinte-même de la prison.
Ces agissements avaient conduit au licenciement de l’officier de renseignement de la prison, Rani Basha, le mois dernier.
S’adressant à la radio de l’armée lundi, le ministre de la Sécurité intérieure, Omer Barlev, a déclaré que l’IPS était une « organisation pourrie », ajoutant que « personne ne s’intéressait à ce qui s’y passait ».
« Ces douze derniers mois, nous avons pris des mesures pour faire toute la lumière sur l’organisation de l’établissement, au niveau de la direction comme sur des points plus techniques », a-t-il poursuivi. « Il reste encore beaucoup à faire pour que cette organisation fonctionne correctement. »
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.