Foot : Ozil « trompé par des fausses informations », estime la Chine
Le footballeur a condamné la politique chinoise de sécurité maximale au Xinjiang ; Arsenal s'est distancé des "opinions personnelles" de son joueur sur le traitement des Ouïghours
La Chine a accusé lundi Mesut Ozil d’avoir été « trompé par des fausses informations » et l’a encouragé à visiter le Xinjiang, après des commentaires du footballeur allemand d’Arsenal sur cette région où Pékin est soupçonné d’avoir interné un million de musulmans.
Le numéro 10 des Gunners avait violemment condamné vendredi sur les réseaux sociaux la politique chinoise de sécurité maximale au Xinjiang (nord-ouest), engagée en réponse à des attentats meurtriers commis contre des civils.
Dès samedi, Arsenal avait pris ses distances par rapport aux « opinions personnelles » de son joueur sur le traitement des musulmans de l’ethnie ouïghoure, affirmant que le club a « toujours adhéré au principe de ne pas s’impliquer dans la politique ».
Une position qui n’a pas empêché la chaîne publique chinoise CCTV de déprogrammer dimanche la diffusion du match entre l’équipe londonienne et Manchester City, perdu par les Gunners (3-0). La plateforme de streaming PPTV a fait de même.
L’affaire pourrait avoir des répercussions pour Arsenal sur le marché chinois, à l’image de ce qui était arrivé à la NBA en octobre après un tweet du manager général des Houston Rockets en soutien aux manifestants pro-démocratie à Hong Kong.
Les Ouïghours constituent l’une des 56 ethnies recensées en Chine. Principalement musulmans, parlant pour la plupart une langue apparentée au turc, ils constituent un peu moins de la moitié des 25 millions de personnes vivant au Xinjiang.
Attentats meurtriers
La Chine a été frappée à de nombreuses reprises par des attentats commis par des militants ouïghours, notamment en 2014, lors d’attaques à l’arme blanche en gare de Kunming dans le sud-ouest du pays (31 morts) et à l’explosif contre un marché d’Urumqi (39 morts), la capitale du Xinjiang.
Des organisations de défense des droits de l’homme, des chercheurs et Washington accusent Pékin d’avoir interné dans cette région jusqu’à un million de musulmans, principalement ouïghours, dans des camps de rééducation politique.
Pékin dément ce chiffre et parle de « centres de formation professionnelle », destinés à aider la population à trouver un emploi et à l’éloigner de la tentation de l’extrémisme religieux.
« Des Corans sont brûlés… des mosquées détruites… les écoles islamiques interdites… des intellectuels religieux tués les uns après les autres… Des frères envoyés par la force dans des camps », s’était indigné Mesut Ozil vendredi dans un message diffusé en turc sur Twitter et Instagram.
L’Allemand d’origine turque avait également affirmé que « les femmes sont forcées d’épouser des hommes chinois ».
« Les musulmans restent silencieux. On n’entend pas leur voix », avait ajouté le joueur d’Arsenal dans son message où figure à l’arrière-plan le drapeau de ce que les séparatistes ouïghours appellent le « Turkestan oriental ».
« Qu’il se rende au Xinjiang »
L’AFP n’a pas fait état au Xinjiang de Corans brûlés, d’intellectuels religieux tués, ni de femmes mariées de force, comme l’évoque Ozil.
« Il semblerait qu’il ait été trompé par des fausses informations », a déclaré lundi lors d’une conférence de presse régulière Geng Shuang, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
« Si M. Ozil en a l’occasion, nous serons heureux qu’il se rende au Xinjiang pour se rendre compte de la situation. Tant qu’il est animé par le bon sens, qu’il parvient à distinguer le bien du mal et respecte les principes d’objectivité et d’honnêteté, il verra un autre Xinjiang », a-t-il dit.
Les propos du joueur ont déclenché un tollé en Chine, beaucoup d’internautes lui reprochant de reprendre à son compte des informations non vérifiées ou encore de « soutenir le terrorisme » au Xinjiang.
Certains pointent aussi le deux poids deux mesures d’Ozil, un ami personnel du président turc Recep Tayyip Erdogan, le footballeur n’ayant jamais condamné le traitement par Ankara de la minorité kurde en Turquie.
Plusieurs utilisateurs du réseau social chinois Weibo se sont ainsi réjouis de la défaite du club londonien contre Manchester City.
« Je suis fan d’Arsenal mais aujourd’hui c’est City que j’ai encouragé », a écrit l’un d’eux.
« Comment auraient-ils pu gagner avec un terroriste sur le terrain ? », a commenté un autre.