Iran: Un haut-responsable accuse Israël d’avoir placé des explosifs dans des centrifugeuses
Zarif a affirmé que Téhéran avait "réussi à détecter" les bombes, sans préciser quand l'incident s'est produit ni où il est survenu ; Blinken a laissé entendre qu'il s'opposait à une frappe israélienne sur les usines nucléaires de l'Iran

Mohammad Javad Zarif, qui était ministre des Affaires étrangères quand l’Iran et les grandes puissances mondiales avaient conclu l’accord nucléaire de 2015 et qui est aujourd’hui vice-président chargé des affaires stratégiques, a affirmé dans une récente interview qu’Israël avait déjà placé des explosifs dans des centrifugeuses iraniennes, selon une traduction de ses propos qui a été proposée mardi par Iran International.
« Nos collègues avaient acheté des centrifugeuses pour l’Organisation de l’énergie atomique et nous avons découvert que des explosifs avaient été placés à l’intérieur – des explosifs qu’ils sont parvenus à détecter », a dit Zarif lors de l’émission Hozour, selon le média d’opposition.
Zarif a également dénoncé les sanctions qui ont été imposées à l’Iran et qui, a-t-il déclaré, obligent les autorités de la République islamique à se tourner vers des intermédiaires, ce qui ouvre des failles dans la chaîne d’approvisionnement dont Israël est susceptible de tirer parti.
« Au lieu de pouvoir commander des équipements directement auprès des fabricants, les sanctions vous obligent à recourir à de multiples intermédiaires pour procéder aux achats », a-t-il expliqué. « Si le régime sioniste infiltre ne serait-ce qu’un seul de ces intermédiaires, il peut tout faire, il peut intégrer tout ce qu’il veut dans les commandes et c’est très exactement ce qui s’est passé ».
« Le problème des bipeurs, au Liban, s’est avéré être quelque chose qui avait été préparé pendant plusieurs années, quelque chose qui a été orchestré avec soin par les sionistes », a-t-il fait remarquer, faisant référence aux explosions du mois de septembre dernier qui avaient pris pour cible les terroristes du Hezbollah, un groupe soutenu par l’Iran.
Zarif n’a pas précisé, dans cet entretien, quand avait eu lieu l’incident qui aurait touché les centrifugeuses, ni où il se serait produit. En 2021, l’ancien chef du Mossad, Yossi Cohen, avait laissé entendre qu’Israël avait fait sauter une installation souterraine de centrifugeuses iraniennes à Natanz, une explosion qui avait été causée, semble-t-il, par des bombes placées dans les équipements qui se trouvaient sur place.
« Elle ne ressemble plus à ce qu’elle était auparavant », avait indiqué Cohen à l’époque dans le cadre d’un entretien, évoquant la « cave » souterraine de Natanz, où « les centrifugeuses tournaient ».

La journaliste d’investigation Ilana Dayan, qui avait interviewé Cohen pour les besoins de l’émission « Uvda », sur la chaîne d’information N12, avait noté que les médias étrangers avaient attribué deux explosions majeures à Natanz au Mossad au cours des douze mois précédents. Ces médias affirmaient qu’une « quantité énorme d’explosifs » avait été intégrée à une plate-forme en marbre utilisée pour équilibrer les centrifugeuses.
« L’homme à l’origine de ces explosions s’est assuré de fournir aux Iraniens la fondation en marbre sur laquelle les centrifugeuses étaient placées », avait déclaré Dayan. « En installant cette fondation à Natanz, ils ne se doutaient pas qu’elle contenait déjà une énorme quantité d’explosifs. »

Téhéran « se contentera-t-il de reconstruire » son programme nucléaire en cas d’attaque ?
Alors qu’il lui était demandé, lors d’un entretien accordé lundi à la chaîne MSNBC, pourquoi Israël ne devrait pas s’attaquer au programme nucléaire iranien une bonne fois pour toutes, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a, pour sa part, ouvertement laissé entendre qu’il était opposé à une frappe israélienne qui prendrait pour cible les installations nucléaires iraniennes.
« Il faut voir ce qui serait durable et ce qui garantirait que le programme ne reprendra pas. L’une des choses à évaluer est donc la suivante : Si cela devait se produire, Téhéran se contenterait-il de reconstruire ce qui a été détruit encore plus profondément sous la surface de la terre, dans un endroit qui serait encore plus difficile d’accès ? » a répondu le secrétaire d’État sortant.
Blinken a répété qu’il avait récemment reconnu que l’Iran avait accumulé suffisamment de matières fissiles pour fabriquer une arme nucléaire et que le pays pourrait, en une semaine approximativement, les transformer pour obtenir la qualité d’une bombe. Toutefois, la mise au point proprement dite d’une arme prendrait beaucoup plus de temps, a-t-il souligné.
« L’Iran va devoir faire face à ses propres décisions s’agissant de la manière dont le pays souhaite aller de l’avant, mais je pense que l’administration américaine entrante pourrait avoir une opportunité à saisir très précisément parce que l’Iran est en difficulté – avec des souffrances économiques terribles », a-t-il estimé. « Le peuple conteste une grande partie des agissements du régime, et notamment sa tendance à l’ingérence dans les affaires des autres pays de la région ».
« C’est un moment d’opportunité, et c’est peut-être une occasion de résoudre de manière durable le défi nucléaire qui est posé par l’Iran – mais c’est peut-être aussi l’occasion de mettre un terme aux actions entreprises par l’Iran dans toute la région », a-t-il ajouté.

Ces propos de Blinken ont été tenus alors que le Conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan, a de nouveau déclaré mardi que l’Iran était dans un état de faiblesse sans précédent depuis la révolution de 1979 et que cette faiblesse était préoccupante dans la mesure où elle pourrait pousser le pays à réexaminer son dispositif d’armement nucléaire – une inquiétude qui est partagée par le président sortant Joe Biden.
Reuters a contribué à cet article.