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Islam, immigration, femmes… Les saillies du candidat extrémiste Eric Zemmour

Ses sorties controversées lui ont valu une quinzaine de procédures judiciaires et deux condamnations pour provocation à la discrimination raciale et à la haine religieuse

L'idéologue d'extrême droite français Eric Zemmour lors d'une séance photo à Paris, le 22 avril 2021. (Crédit : JOEL SAGET / AFP)
L'idéologue d'extrême droite français Eric Zemmour lors d'une séance photo à Paris, le 22 avril 2021. (Crédit : JOEL SAGET / AFP)

L’ancien éditorialiste d’extrême droite Eric Zemmour, qui a déclaré ce mardi midi sa candidature à la présidentielle française de 2022, a construit sa notoriété à coup de saillies extrémistes et de polémiques.

Depuis plus de dix ans, ses sorties controversées et provocatrices lui ont valu une quinzaine de procédures judiciaires et deux condamnations pour provocation à la discrimination raciale et à la haine religieuse.

L’islam, les immigrés, les femmes, les homosexuels, Pétain… Florilège de ses déclarations controversées, et retour sur ses passages devant les tribunaux.

Immigration

Elle est au cœur du discours d’Eric Zemmour, obsédé par une « identité française » en péril et par le « grand remplacement », une thèse d’extrême droite affirmant qu’un processus délibéré est en cours, visant à substituer la population française et européenne par une population originaire d’Afrique noire et du Maghreb.

« Le grand remplacement n’est ni un mythe ni un complot, mais un processus implacable », écrit-il dans son dernier livre, La France n’a pas dit son dernier mot.

À longueur de discours, il fustige les immigrés « colonisateurs » et lie systématiquement l’immigration à la délinquance et la criminalité.

Il a ainsi été condamné en 2011 pour avoir déclaré l’année précédente que « la plupart des trafiquants sont Noirs et Arabes, c’est comme ça, c’est un fait ». Le tribunal correctionnel de Paris l’avait alors reconnu coupable de provocation à la haine raciale, lui infligeant 1 000 euros d’amende mais le relaxant des poursuites pour diffamation.

En juin 2016, la cour d’appel de Paris avait relaxé l’éditorialiste pour provocation à la haine et diffamation raciales.

En cause, une chronique de 2014 sur RTL où il dénonçait « les bandes de Tchétchènes, de Roms, de Kosovars, de Maghrébins, d’Africains qui dévalisent, violentent ou dépouillent ».

Le tribunal correctionnel l’avait déjà relaxé en septembre 2015 au motif que les communautés visées ne l’étaient pas dans leur ensemble.

Le 8 septembre 2021, la cour d’appel de Paris a aussi relaxé Eric Zemmour pour avoir fustigé les immigrés « colonisateurs » lors d’une réunion organisée en 2019 par des proches de l’ex-députée du Front national (devenu RN) Marion Maréchal.

Marion Maréchal-Le Pen du Front national français et ancienne députée de l’Assemblée nationale française prend la parole lors du CPAC 2018 le 22 février 2018 à National Harbour, Maryland (Crédit : Alex Wong / Getty Images / AFP)

En première instance, il est condamné à 10 000 euros d’amende pour « exhortation, tantôt implicite tantôt explicite, à la discrimination et à la haine à l’égard de la communauté musulmane et à sa religion ».

Les juges d’appel estiment à l’inverse « qu’aucun des propos poursuivis ne visent l’ensemble des Africains, des immigrés ou des musulmans mais uniquement des fractions de ces groupes ».

Le parquet général et les parties civiles se sont pourvus en cassation.

Eric Zemmour était encore poursuivi le 17 novembre, cette fois pour une saillie sur les migrants mineurs isolés.

« Ils n’ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu’ils viennent », a-t-il lancé sur CNews en septembre 2020.

Des « propos méprisants, outrageants », a estimé le parquet, qui a requis 10 000 euros d’amende.

« Il n’y a pas une once de racisme » chez lui, a plaidé son avocat, Me Olivier Pardo, il ne fait que dire « la réalité ».

La décision du tribunal est attendue le 17 janvier prochain.

Islam

Issu d’une famille juive algérienne, Eric Zemmour se considère comme un nationaliste défenseur de l’héritage et des racines chrétiennes de la France.

Il répète régulièrement que « l’islam est incompatible avec la France » et appelle les musulmans « à se détacher de l’islam et avoir une pratique ‘chrétienne’ de leur religion » en France.

« La crise démographique nous mène soit à une république islamique, soit à une guerre civile », estime-t-il, en répétant que dans certains « quartiers » les Français « vivent comme des étrangers dans leur propre pays ».

Il plaide pour une « remigration », un renvoi des immigrés « qui ne s’assimilent pas ».

En octobre 2014, il avait affirmé au quotidien italien Corriere della Sera que les musulmans « vivent entre eux, dans les banlieues. Les Français ont été obligés de s’en aller ».

Un an après, le tribunal correctionnel l’a condamné à 3 000 euros d’amende, peine confirmée en appel en novembre 2016.

Mais la Cour de cassation a ordonné pour un motif de forme un troisième procès devant la cour d’appel qui, en novembre 2018, le relaxe car « il n’est pas prouvé qu’Eric Zemmour (…) savait que ce journal était publié en France ».

Cette sortie lui coûte sa place dans l’émission « Ça se dispute » sur la chaîne iTELE (aujourd’hui CNews).

La France vit « depuis trente ans une invasion », elle est le théâtre d’un « jihad » qui vise à « l’islamiser », a-t-il également professé en 2016 sur France 5.

Le tribunal lui inflige en juin 2017 5 000 euros d’amende pour des propos « stigmatisant (…) en des termes particulièrement violents et péremptoires » les musulmans.

La cour d’appel confirme en mai 2018 sa culpabilité pour provocation à la haine religieuse mais réduit son amende à 3 000 euros.

Son pourvoi en cassation est rejeté, la peine est définitive. Il saisit toutefois en 2019 la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), qui n’a pas encore examiné sa requête.

Femmes

Dans un pamphlet paru en 2006, Le Premier sexe, en réponse au célèbre livre de Simone de Beauvoir Le Deuxième sexe, Eric Zemmour déplore la « féminisation » et la « dévirilisation » de la société. Cet ouvrage, vendu à plus de 100 000 exemplaires, a marqué le début de l’ascension médiatique du journaliste.

Dans Le Suicide français, paru en 2014, il pleure un temps « d’avant le féminisme », où l’on pouvait « glisser une main concupiscente sur un charmant fessier féminin » sans risquer de poursuite pour harcèlement sexuel.

Zemmour a été accusé ces derniers mois dans la presse de plusieurs agressions sexuelles, sans qu’aucune plainte n’ait été déposée.

Pétain

Le candidat d’extrême droite a été accusé de « révisionnisme » par de nombreux historiens et des rescapés de la Shoah, après avoir tenu des propos visant à réhabiliter le maréchal Pétain.

Dans Le Suicide français, il écrit que Philippe Pétain, qui gouverna la France et collabora avec l’occupant nazi de 1940 à 1944, a sauvé des Juifs français en livrant des Juifs étrangers, reprenant la thèse, démentie par l’immense majorité des historiens, de Pétain comme « bouclier » de la France.

L’entrevue de Montoire, le 3 octobre 1940, entre le maréchal Pétain et Adolf Hitler. (Crédit : wikimedia commons)

« Je dis que Vichy a protégé les Juifs français et donné les Juifs étrangers », a encore répété récemment Eric Zemmour.

En décembre 2020, Eric Zemmour comparaît pour « contestation de crime contre l’humanité » suite à ces propos.

En février 2021, le tribunal le relaxe car ses propos ont été prononcés « à brûle-pourpoint lors d’un débat sur la guerre en Syrie » face au philosophe Bernard-Henri Lévy sur CNews.

Les parties civiles ont fait appel.

En 1995, le président de droite Jacques Chirac avait pour la première fois reconnu, dans un discours historique, la responsabilité de l’État français dans la déportation de 76 000 Juifs vers les camps de la mort.

Homosexualité

Défenseur de la « norme hétérosexuelle », Eric Zemmour considère que l’homosexualité est un « choix ».

En 2019, il avait fustigé le mariage pour tous, légalisé en 2013 sous le président socialiste François Hollande, qui a « détruit la famille », et qualifié le désir d’enfant chez les couples gays de « caprice ».

Il fustige également « l’idéologie LGBT » à l’œuvre selon lui dans les écoles.

Le journaliste et écrivain français Eric Zemmour au tribunal de Paris, pour son procès pour incitation à la haine raciale, le 6 novembre 2015. (Crédit : BERTRAND GUAY/AFP/Getty Images)

« Le seul qui ose », paroles de partisans d’Eric Zemmour

Malgré ses propos extrêmes, Eric Zemmour bénéficie d’un large écho médiatique, d’une base de soutien importante et n’a aucun mal à remplir de grandes salles ou à vendre ses livres, qui se sont tous hissés en tête des ventes pour les derniers.

Les partisans d’Eric Zemmour rencontrés par l’AFP à plusieurs de ses conférences de pré-campagne expliquent ainsi l’attrait qu’exerce sur eux le polémiste d’extrême droite par sa manière « intelligente » d’aborder des sujets « dont personne ne parle ».

Le 17 septembre à Toulon, 800 personnes attendent Eric Zemmour devant le Palais des congrès pour sa première conférence aux allures de meeting.

Lucie, prof d’anglais de 26 ans, porte un tee-shirt célébrant les « racines » de la France. Pour elle, Eric Zemmour est « la dernière chance de sauver la France ». Elle a démissionné de l’Education nationale après des « menaces d’élèves, pour la plupart issus de l’immigration ».

Chloé, 70 ans, se réjouit que le polémiste aborde des thèmes « dont personne ne parle » comme le « grand remplacement », théorie complotiste selon laquelle la population européenne est remplacée par une population non européenne. Pour cette artiste-peintre, il « ringardise tous les autres politiques ».

Gérard, 70 ans, un retraité électeur de Fillon en 2017 et abstentionniste au second tour, voudrait qu’il « impose ses thèmes sur l’immigration, la réindustrialisation, le pouvoir des juges », comme ça « tous les candidats vont être obligés de s’en emparer ».

Pour lui, la guerre civile « on la voit tous les jours, disséminée dans les quartiers ».

Il est « bien sûr » favorable à la « remigration », soit le retour des immigrés dans leur pays d’origine. « C’est une question de racines, de mode de vie, de valeurs. Ceux qui n’en veulent pas repartent. »

Enzo, 19 ans, étudiant en commerce, est face à un dilemme. Il vient d’adhérer au RN de Marine Le Pen mais salue en même temps la « clarté » du discours de Zemmour.

Le polémiste Eric Zemmour à la « Convention de la Droite » à Paris, le 28 septembre 2019. (Crédit : Sameer Al-Doumy / AFP)

Le 4 octobre à Paris, devant le Palais des congrès porte Maillot, des militants de l’Action française distribuent leur journal qui demande « qui est colonisé, eux ou nous ? ».

Marion, 25 ans, salariée d’une maison de champagne et électrice de Fillon en 2017, est venue écouter le débat entre Eric Zemmour et le philosophe Michel Onfray, qui dénonceront de concert, devant 3 700 personnes, le « climat de guerre civile », jusqu’à s’interroger sur le besoin ou non « d’armer » les Français.

Elle « n’est pas d’accord avec tout » ce que dit le polémiste mais apprécie « sa façon de prôner la France historique et ses valeurs ».

Pour Alexandre, juriste de 28 ans venu de Puteaux (Hauts-de-Seine), Eric Zemmour « c’est un hussard qui osera agir » alors que « le RN s’est beaucoup gauchisé ».

Quinze jours plus tard, à Versailles, parmi les 1 500 spectateurs Pascal, 60 ans, gérant de supermarché à Asnières, a payé 60 euros, le tarif bienfaiteur, et « sent une sincérité » chez Eric Zemmour.

Marié à une Péruvienne, il emploie des Sénégalais et des Ivoiriens qu’il aide à obtenir des papiers. « Ce sont des étrangers mais des gens qui veulent s’en sortir. La France ne peut pas vivre sans les étrangers, mais ce n’est pas contradictoire avec ce que dit Zemmour », dit-il, en se plaignant de l’insécurité.

Mathilde, 31 ans, qui travaille dans une agence de communication, voit « l’évidence de ce qu’il dit » depuis les attentats de 2015. « Il est Juif, Algérien, il a une vraie légitimité pour dire ce qu’il dit. » « Le danger pour les femmes, c’est pas Zemmour » – qui considère qu’elles sont « le but et le butin de tout homme doué » – « c’est quand je marche seule le soir », ajoute la jeune femme.

Thierry, agriculteur en Dordogne âgé d’une soixantaine d’années, a lui fait une heure trente de route jusqu’au Palais des congrès de Bordeaux le 12 novembre pour écouter avec 1 300 autres personnes le polémiste, condamné à deux reprises pour provocation à la haine.

« Elle m’a déçue Marine Le Pen. Dès qu’on prononce un mot, on est raciste et on est éjecté. Il faut pouvoir appeler un chat un chat », dit cet ancien électeur du RN.

Pour lui la candidate du RN concurrente d’Eric Zemmour « s’est affadie » sur l’islam, qu’elle juge compatible avec la République contrairement au polémiste, alors que « nos chapelles vont être remplacées par des mosquées ».

Sur Pétain qui aurait sauvé des Juifs français, selon Eric Zemmour, thèse contestée par les historiens, il dit que « les historiens c’est comme les journalistes, ils attaquent sans arrêt. Si un jour Zemmour arrive au pouvoir il faut qu’il me vire tout ça ».

Renaud Camus (Crédit : CC 2.0)

Jacky Morel, ancien journaliste automobile à la retraite qui « adorait regarder » Eric Zemmour sur CNews, a lu Renaud Camus, théoricien du soi-disant « grand remplacement », et trouve « dommage qu’on ait passé le Karcher que sur l’autoroute ».

« Je ne suis pas raciste. À Bali où je vis 6 mois de l’année, ils sont tous Noirs. Mais j’ai un problème avec le nombre et des mœurs qui ne sont pas les miennes », dit cet opposant au pass sanitaire.

À Londres le 19 novembre, parmi les 400 personnes venus l’entendre, Amir, un entrepreneur français d’origine iranienne, qui vit à Londres depuis 15 ans et n’est « pas d’accord avec le modèle multiculturel » anglais, déplore qu’en France « on accueille beaucoup de gens sans leur expliquer ce que ça veut dire être Français ».

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