Israël en guerre - Jour 374

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Analyse

Israël craint que Washington ne se dirige vers un nouvel accord nucléaire avec l’Iran

Jérusalem s'inquiète : Les États-Unis cèderont-ils aux sirènes de l'Iran concernant un nouvel accord ? La normalisation avec les Saoudiens pourrait-elle tenir un rôle précis ?

Lazar Berman

Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu procède à une évaluation de la situation avec le conseiller à la sécurité nationale Tzachi Hanegbi, le chef d’état-major Tzachi Braverman et le secrétaire militaire Avi Gil au cabinet du Premier ministre, à Jérusalem, le 11 mai 2023 (Autorisation)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu procède à une évaluation de la situation avec le conseiller à la sécurité nationale Tzachi Hanegbi, le chef d’état-major Tzachi Braverman et le secrétaire militaire Avi Gil au cabinet du Premier ministre, à Jérusalem, le 11 mai 2023 (Autorisation)

Les choses vont dans une direction inquiétante pour Israël. Un petit nombre d’informations, de rencontres et d’annonces semblent indiquer que les États-Unis pourraient conclure un nouvel accord avec l’Iran concernant son programme nucléaire. Par ailleurs, les responsables américains ont aidé à faire naître la crainte d’une administration Biden qui pourrait finalement être prête à s’incliner devant des demandes déterminantes de Téhéran dans le but de finaliser le pacte.

La question, pour les décisionnaires politiques israéliens, est de savoir quelles avancées entre les deux parties ont d’ores et déjà été réalisées dans cette direction.

Les officiels israéliens sont clairement effrayés. Une frayeur qui est devenue plus vive après la décision prise, la semaine dernière, par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de clore son enquête sur les traces d’uranium qui avaient été découvertes à Marivan, à environ 525 kilomètres au sud-est de Téhéran – des traces qui étaient clairement d’origine humaine.

Les analystes ont fait le lien de manière répétée entre Marivan et le programme nucléaire secret de l’Iran, un programme à visée militaire, et ils ont accusé la république islamique d’avoir mené des tests hautement explosifs là-bas, au début des années 2000.

L’année dernière, le président iranien Ebrahim Raissi avait déclaré dans des termes sans équivoque que l’arrêt des investigations menées sur les particules découvertes sur des sites nucléaires présumés était une condition préalable à la relance de l’accord qui avait été signé en 2015, le JCPOA (Plan d’action global commun).

La conclusion qui a été tirée par l’AIEA – celle que ces particules pouvaient être des résidus datant de l’époque où le site accueillait des activités minières, il y a plusieurs décennies – n’a guère satisfait de nombreux observateurs israéliens, qui ont laissé entendre que le groupe de veille des Nations unies n’était plus digne de confiance après s’être trahi pour répondre aux demandes de Téhéran.

« Nous sommes extrêmement déçus face aux dégâts essuyés par le statut professionnel de l’AIEA », a confié un responsable israélien au Times of Israel dans la journée de vendredi, vingt-quatre heures après que le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lior Haiat, a accusé le directeur-général de l’instance, Rafael Grossi, d’avoir « cédé » sous les pressions politiques de Téhéran.

Le directeur de l’AIEA, le général Rafael Mariano Grossi, lors d’une conférence de presse au siège de l’agence, dans le centre international de Vienne, en Autriche, le 2 mars 2022. (Crédit : AP Photo/Lisa Leutner)

Haiat a estimé que l’agence de l’ONU avait « gravement porté atteinte » à sa crédibilité.

Israël avait exercé de fortes pressions pour s’opposer à l’accord conclu en 2015, dont les États-Unis s’étaient retirés de manière unilatérale en 2018 sous l’impulsion du président Donald Trump. Les efforts livrés par l’Europe et par le président américain Joe Biden pour relancer l’accord et pour réintégrer Washington dans ce dernier avaient suscité de fortes protestations de la part de Jérusalem.

Israël affirme que les efforts diplomatiques à eux seuls n’empêcheront pas l’Iran de se doter de l’arme atomique, réclamant à la place une menace militaire crédible susceptible de peser dans la balance.

Les propos tenus par les officiels israéliens qui ont mis en garde contre des avancées qui pourraient nécessiter une action militaire en Iran de la part de l’État juif se sont amplifiés, ces dernières semaines – alors que des signaux indiquent que Washington et Téhéran pourraient être sur le point d’ouvrir un nouveau chapitre des négociations nucléaires intermittentes.

« J’entends toutes les informations au sujet de l’Iran et j’ai donc un message clair et précis à transmettre à l’Iran et à la communauté internationale : Israël fera tout ce qui est à faire pour empêcher l’Iran d’obtenir l’arme atomique », a dit le Premier ministre Benjamin Netanyahu, lapidaire, dans un court message vidéo diffusé jeudi.

Le ministre de la Défense Yoav Gallant a aussi répondu à ce que son bureau a qualifié « d’événements récents en lien avec la question nucléaire iranienne ».

« Les dangers que l’État d’Israël doit affronter s’intensifient et il pourrait être nécessaire que nous accomplissions notre devoir de manière à protéger l’intégrité d’Israël et, en particulier, l’avenir de l’État juif », a-t-il déclaré lors d’une cérémonie organisée à l’occasion de la promotion d’officiers de l’armée, jeudi.

Le site d’information Axios a indiqué, la semaine dernière, que l’envoyé au Moyen-Orient de la Maison Blanche, Brett McGurk, se trouvait ce mois-ci à Oman pour discuter de la possibilité de faire revenir les Iraniens à la table des négociations.

L’article a cité trois responsables de la Défense israélienne qui ont fait part de leur inquiétude face à une éventuelle discussion, par les parties, d’un possible accord intermédiaire « gel contre gel » de manière à réduire rapidement les tensions. Les États-Unis, qui ne négocient pas directement avec Téhéran, ont démenti l’existence d’un tel accord ou un possible allègement des sanctions imposées à la république islamique auprès d’Axios.

Ni Oman, ni les États-Unis n’ont fait de commentaire public sur cette visite.

Le sultanat – qui se considère comme un intermédiaire entre l’Iran et l’Occident – aurait accueilli des pourparlers secrets entre Washington et Téhéran, il y a une décennie. Ces pourparlers avaient finalement entraîné la signature du JCPOA, qui avait assoupli les sanctions appliquées à la république islamique en échange de la réduction, par cette dernière, de son programme nucléaire.

Selon le Financial Times, l’envoyé spécial de l’administration Biden pour l’Iran, Robert Malley aurait eu plusieurs réunions récentes avec l’ambassadeur d’Iran aux Nations unies, Amir Saeid Iravani.

Le journal, qui cite des diplomates et des analystes, a noté qu’Iravani était un haut responsable du Conseil suprême de sécurité nationale iranien avant son affectation au siège de l’ONU à New York l’an dernier. L’ancien chef du conseil, qui a été remplacé le mois dernier, a joué un rôle clé dans les négociations qui ont conduit à l’accord sur le nucléaire de 2015.

Un proche non identifié de l’administration Biden a déclaré que les pourparlers portaient principalement sur un éventuel échange de prisonniers.

« L’échange de prisonniers va être une ouverture pour les pourparlers », a déclaré un diplomate. « Il est peu probable qu’il y ait un accord sur le nucléaire, mais il pourrait y avoir une sorte de chose provisoire, ou un gel. »

Un autre responsable américain a déclaré que l’administration Biden « a toujours cru que la diplomatie était le meilleur moyen de s’assurer de manière vérifiable et durable que l’Iran n’acquiert jamais l’arme nucléaire ».

« Mais nous n’avons rien à annoncer, et nous n’avons retiré aucune option de la table », a déclaré le responsable.

Le ministre de la Défense Yoav Gallant s’exprime lors d’une cérémonie au siège de l’armée à Tel Aviv, le 1er juin 2023. (Crédit : Nicole Laskavi/Defense Ministry)

Au même moment, les efforts visant à négocier une normalisation des liens entre Israël et l’Arabie saoudite semblent s’intensifier de la part des États-Unis – ce que certains rapprochent d’un possible accord sur le nucléaire, estimant que l’établissement de relations diplomatiques avec le royaume viendrait, en quelque sorte, « compenser » Israël en cas de conclusion d’un nouveau pacte.

L’administration Biden œuvre à négocier un accord sur les vols directs entre Israël et Jeddah dans le cadre des efforts de normalisation plus généraux, que le Conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a qualifié « d’intérêt sécuritaire national » au début du mois de mai.

Le ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer et le conseiller à la sécurité nationale Tzachi Hanegbi se sont aussi rendus à Washington, cette semaine, pour rencontrer Sullivan et d’autres officiels de haut-niveau de la Maison Blanche et du département d’État, évoquant la menace nucléaire iranienne et les perspectives de paix avec l’Arabie saoudite.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, rencontrant le conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, Jake Sullivan, à Jérusalem, le 19 janvier 2023. (Crédit : Kobi Gideon/Bureau du Premier ministre)

Mais un responsable israélien a fait part, la semaine dernière, de son inquiétude – disant qu’il craignait que les avancées en faveur de la normalisation avec l’Arabie saoudite ne soient utilisées pour « compenser » la consternation qu’entraînerait inévitablement un nouvel accord sur le nucléaire iranien.

Toutefois, un responsable européen de la diplomatie a déclaré vendredi au Times of Israel que les parties n’étaient pas prêtes à réintégrer le JCPOA ou à conclure un autre accord de ce type.

« Je pense que c’est le début du débat », a indiqué le responsable. « C’est le début d’un processus de désescalade ».

« Personne ne se précipite tête baissée dans une direction ou dans une autre », a-t-il ajouté.

Jacob Magid a contribué à cet article.

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