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Israël, Jordanie, 20 ans de relations fraîches mais cruciales

"Nous ne pourrions espérer meilleur voisin," a récemment déclaré l'ambassadeur d'Israël en Jordanie

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, rencontrant le roi Abdallah II de Jordanie, en Jordanie, en janvier 2014. (Crédit : Kobi Gideon/Bureau du Premier ministre/Flash90/Dossier)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à droite, rencontrant le roi Abdallah II de Jordanie, en Jordanie, en janvier 2014. (Crédit : Kobi Gideon/Bureau du Premier ministre/Flash90/Dossier)

Vingt ans après sa signature historique, le traité de paix entre Israël et la Jordanie a beau être très impopulaire chez les Jordaniens, il reste un pacte stratégique que les deux parties sont déterminées à défendre, estiment les experts

La relation délicate entre les deux pays a pourtant subi bien des épreuves, pour la plupart causées par le conflit israélo-palestinien, depuis que les Premiers ministres Yitzhak Rabin et Abdelsalam al-Majali ont signé le traité le 26 octobre 1994 sous les auspices du président américain Bill Clinton.

Si le texte, qui a mis fin à l’état de guerre persistant entre les deux pays depuis 1948, reste une source de profond dépit en Jordanie, où plus de la moitié de la population est palestinienne, la relation entre les deux pays, fortement empreinte de pragmatisme, s’est discrètement renforcée, encore récemment devant l’expansion de l’islamisme radical dans la région.

Israël et la Jordanie partagent une même perception des groupes djihadistes qui combattent tout près, en Syrie et en Irak, explique David Schenker, expert au Washington Institute for Near East Policy.

« Cela rapproche forcément ces pays, comme cela a rapproché l’Egypte et Israël », dit-il, « ils voient bien que plus l’échange de renseignement sera important, plus la relation militaire sera forte, plus la sécurité des deux pays sera assurée ».

Hussein 1er, Bill Clinton et Yitzhak Rabin lors des négociations de paix en 1994 (Crédit : Maison Blanche/ Domaine public)
Hussein 1er, Bill Clinton et Yitzhak Rabin lors des négociations de paix en 1994 (Crédit : Maison Blanche/ Domaine public)

Question palestinienne

Mais la question palestinienne continue d’entraver des rapports plus harmonieux, conviennent les experts. La mort d’un juge jordano-palestinien tué par l’armée israélienne, et la guerre dans la bande de Gaza en juillet/août, y ont encore porté un coup.

Dès 1996, les rapports s’étaient dégradés avec l’accession de Benjamin Netanyahu au poste de Premier ministre en Israël, et s’étaient rapprochés du point de rupture quand les services secrets israéliens ont tenté d’assassiner Khaled Meshaal, leader du Hamas, à Amman.

La seconde Intifada palestinienne (2000-2005), la guerre du Liban en 2006 et trois guerres dans la bande de Gaza ont enflammé l’opinion publique en Jordanie et suscité des déclarations courroucées jordaniennes.

Et Amman surveille attentivement les agissements israéliens sur le mont du Temple à Jérusalem-est, la Jordanie étant le gardien de ce lieu saint et ultra-sensible où se dresse la mosquée Al-Aqsa — un rôle inscrit dans le traité de paix.

« Du point de vue jordanien, le problème principal, c’est que, tant qu’on n’aura pas trouvé de solution globale au conflit israélo-palestinien, le régime aura toutes les difficultés politiques à entamer une normalisation complète » des relations, souligne Oded Eran, ancien ambassadeur israélien à Amman et désormais expert à l’Institute for National Security Studies, en Israël.

Ainsi pour le député jordanien Khalil Attieh, qui brûla un jour le drapeau israélien au Parlement, « Israël est toujours considéré comme un ennemi ». « Il continue à occuper la terre palestinienne, à violer le traité de paix par ses attaques sur Al-Aqsa, à tuer des Palestiniens innocents et à détruire leurs maisons. Il continue à construire des colonies ».

Pas de « meilleur voisin » pour Israël

Mais en dépit de mots parfois durs, Israël et la Jordanie n’ont aucune envie de sacrifier leur relation, soutient M. Schenker.

« Les deux sont d’accord pour laisser sa place à la rhétorique, pour laisser le roi dire certaines choses et pour que les Israéliens ne soient pas contents, c’est le prix à payer quand on fait affaire ensemble », dit-il.

D’un point de vue économique, si le commerce bilatéral reste limité (365 millions de dollars en 2013), le sabotage par des djihadistes du gazoduc qui alimentait la Jordanie en gaz égyptien a contribué à améliorer les échanges : Israéliens et Jordaniens viennent de signer une lettre d’intention qui ferait d’Israël le principal fournisseur en gaz du royaume hachémite pour les 15 prochaines années.

« Cet accord gazier est le signe le plus éloquent que les liens du royaume avec Israël sont forts et qu’ils ne vont faire que se resserrer », analyse M. Schenker, « ce n’est pas populaire, mais c’est sensé du point de vue du royaume, et cela démontre la solidité de la relation ».

Daniel Nevo, l’ambassadeur d’Israël en Jordanie, en a d’ailleurs récemment vanté la qualité à la radio militaire israélienne : « Les relations sont bonnes », a-t-il dit.

« Il y a encore beaucoup de choses à améliorer. La situation n’est pas idéale, mais ce que nous avons fait va dans la bonne direction (…) la Jordanie est un îlot de stabilité et de modération dans cette région instable, et nous ne pourrions espérer meilleur voisin ».

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