La communauté juive de Berlin consternée face à l’antisémitisme en Allemagne
Samedi, une manifestation soutenue par des groupes néo-nazis a attiré plus de 20 000 personnes dans la capitale allemande pour demander la fin des restrictions liées au coronavirus
BERLIN, Allemagne (JTA) – Dimanche, la communauté juive a exprimé son désarroi devant l’antisémitisme affiché lors d’une manifestation de la veille soutenue par des groupes néo-nazis. La manifestation a fait descendre plus de 20 000 personnes dans la capitale allemande samedi pour demander la fin des restrictions liées au coronavirus.
La manifestation était appelée « Jour de liberté », référence apparente à un documentaire de 1935 sur l’armée nazie par le réalisateur marionnette d’Adolf Hitler, Leni Riefenstahl. Certains participants ont affiché des slogans antisémites, alors que d’autres ont comparé les restrictions imposées par l’Allemagne pour lutter contre le coronavirus aux lois nazies.
« Avec le recul sur l’événement, cette manifestation a confirmé beaucoup de nos craintes », a déclaré Sigmount Koenigsberg, responsable de la lutte contre l’antisémitisme pour la communauté juive de Berlin, à l’agence JTA dimanche. « La Shoah a été relativisée à plusieurs reprises et des mythes antisémites conspirationnistes faisaient partie des thèmes. »
Vendredi, une intervention de dernière minute de groupes juifs a conduit les autorités à modifier le parcours prévu de la manifestation, qui devait passer par l’une des principales synagogues de la ville pendant les services du Shabbat, a déclaré Koenigsberg.
Les organisateurs de la manifestation, un groupe basé à Stuttgart et appelé « Querdenken 711 » (« Penser contre le courant »), avait fait une demande pour une manifestation avec jusqu’à 500 000 participants. Plusieurs groupes néo-nazis ont appelé le public à participer à la manifestation, a déclaré Andreas Geisel, sénateur de l’Intérieur à Berlin, à ZDFheute TV news. Le nombre réel de personnes qui ont participé à la manifestation était très loin de cet objectif et reflétait un large éventail d’opposants idéologiques aux régulations sanitaires, selon certains médias.
La police de Berlin a interrompu la manifestation quelques heures après son départ, en faisant descendre de l’estrade par la force plusieurs intervenants, selon des médias allemands. Plus de 100 personnes ont été arrêtées, et 45 policiers ont été blessés dans les affrontements qui ont suivi la manifestation principale. La police de Berlin a engagé des poursuites contre les organisateurs car ils ne portaient pas de masques et qu’ils n’ont pas respecté les mesures de distanciation sociale. La police mène l’enquête sur l’utilisation de symboles d’organisations considérées comme anti-constitutionnelles en Allemagne – notamment le parti nazi.
Le département de recherche et d’information sur l’antisémitisme, un groupe de veille connu sous le nom de RIAS, a tweeté des images des manifestants transportant ou portant du matériel de propagande antisémite.
Un manifestant portait une étoile jaune semblable à celles que les nazis ont forcé les Juifs en Allemagne et dans d’autres pays occupés à porter, mais sur laquelle on pouvait lire « non vacciné ». Munich avait interdit le recours à l’étoile jaune dans des manifestations similaires en juin.
Un manifestant a été photographié en train de porter un t-shirt où l’on pouvait lire « FCK Sion » devant, et dans le dos il appelait les gens à « lire les protocoles », une référence au texte antisémite, un faux datant du début du 20e siècle. Le RIAS a également tweeté que l’un des intervenants avait fait référence à la « haute finance » – une code fréquemment utilisé pour parler des Juifs – comme étant derrière l’épidémie du coronavirus.
« L’antisémitisme ouvert n’était pas inattendu à cette manifestation », a tweeté le bureau du Berlin de la Commission juive américaine, appelant les gens à signaler les cas au RIAS.
Koenigsberg a déclaré à JTA que les manifestants ont « cherché des bouc-émissaires et à propager des mythes conspirationnistes antisémites, [ce qui] a confirmé notre position que cette démonstration doit être considérée comme antisémite ». Il a salué les principaux partis politique pour avoir critiqué la manifestation. Des contre-manifestants ont également protesté, certains tenaient des pancartes avec écrit « Aucune place pour les nazis ».
Le nombre de victimes de l’épidémie en Allemagne se situe actuellement à 9 000. Le nombre de cas enregistrés a fortement augmenté après avoir baissé en mai. La principale institution de recherche médicale du pays, l’institut de Santé Robert Koch, a récemment rapporté environ 1 000 nouvelles infections par jour.