Israël en guerre - Jour 532

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La justice statue la démolition de certaines implantations, en légalise d’autres

Les juges ont approuvé un procédé juridique légitimant certaines implantations construites sur des terres palestiniennes, mais affirmé qu'il ne s’appliquait pas à Mitzpe Kramim

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Mitzpe Kramim. (Gideon Mermelstein)
Mitzpe Kramim. (Gideon Mermelstein)

Dans une décision rendue jeudi, la Haute Cour de justice a ordonné la démolition d’une trentaine de bâtiments d’une implantation centrale de Cisjordanie, construits sur des terres palestiniennes privées. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’est dit « attristé » par cette décision.

Dans une décision majoritaire de deux voix contre une, le panel des juges a permis l’utilisation d’un procédé juridique approuvé par le procureur général Avichai Mandelblit, connu sous le nom de « marché de régulation », qui légalise rétroactivement les implantations construites en territoires palestiniens, tant qu’elles ont été construites de « bonne foi ». Les experts juridiques pensent que le feu vert donné par les juges pourrait conduire à la légalisation de près de 2 000 foyers à travers la Cisjordanie.

Cependant, les juges Esther Hayut et Hanan Melcer, dans l’opinion majoritaire, ont statué que ce procédé ne pouvait pas être utilisé pour légaliser la majeure partie de Mitzpe Kramim, car l’État et les organismes privés impliqués dans sa création auraient dû être conscients de sa situation problématique.

Les juges ont statué que le responsable du ministère de la Défense, en charge de l’affectation du terrain sur lequel la construction s’est faite, « a détourné le regard afin d’éviter les nombreux avertissements avant-coureurs portés à son attention au fil des ans, y compris le fait que le terrain a été établi sur des terres palestiniennes privées ».

Le tribunal a émis un ordre d’arrêt des travaux sur de nombreux acres de terres enregistrées comme appartenant à des Palestiniens de la ville voisine de Deir Jarir, et a accordé à l’État 36 mois pour démolir ce que Yisrael Gantz, président du Conseil régional de Binyamin, a déclaré être quatre maisons permanentes, 30 habitats mobiles et plusieurs autres bâtiments communautaires. Les juges ont également ordonné à l’État de fournir une solution de logement alternative aux résidents, avant la démolition de leurs maisons.

La juge en chef Esther Hayut (à droite) et le juge Hanan Melcer à la Cour suprême, le 4 mai 2020. (Capture d’écran)

Mitzpe Kramim a été établi en 1999, à proximité de l’implantation de Kochav Hashachar, sur des terres cédées aux résidents par la Division des implantations de l’Organisation sioniste mondiale, en partie contrôlée par l’État. Peu de temps après, l’Administration civile – l’organe du ministère de la Défense qui autorise les constructions en Cisjordanie – a déterminé que l’État n’avait pas de droits sur les terres accordées par la Division des implantations.

En 2011, un groupe de Palestiniens du village de Deir Jarir, se revendiquant propriétaires du terrain sur lequel se trouve l’avant-poste, a déposé une requête à la Haute Cour de Justice dans le but d’expulser les quelque 40 familles qui composent cette communauté.

Afin de retarder le processus, les résidents juifs ont adressé leur propre requête au tribunal du district de Jérusalem, affirmant que le ministère de la Défense était responsable de leur installation sur cette colline du centre de la Cisjordanie, après que leur premier choix de terrain a été jugé illégal pour des raisons similaires.

En août 2018, le tribunal du district a accepté la pétition, une décision célébrée par les responsables des implantations, qui espéraient que cette décision en entrainerait d’autres du même ordre concernant la légalisation d’avant-postes à travers la Cisjordanie.

Mais la décision du tribunal de district ne touchait pas aux questions de propriétés terriennes. Une fois cette décision rendue, la Haute Cour a pu aller de l’avant en ce qui concernait les revendications des habitants de Deir Jarir. Si leur pétition avait été rejetée jeudi, l’État aurait pu étendre la légalisation à Mitzpe Kramim.

Une vue d’ensemble de l’implantation israélienne de Mitzpe Kramim en Cisjordanie, le 29 août 2018. (AFP / THOMAS COEX)

Alors que les résidents de l’implantation attendaient le verdict de la Haute Cour, ils se sont trouvés encore plus enhardis en décembre 2018, lorsque Mandelblit a émis un avis juridique approuvant l’utilisation du « marché de régulation » pour légaliser potentiellement des milliers d’avant-postes construits sur des terres palestiniennes privées.

La décision de jeudi est la dernière en date dans une série de coups portés contre les groupes défendant les implantations qui, ces derniers mois, ont vu leur objectif principal – l’annexion de la Cisjordanie – mis de côté pour une durée indéterminée en échange de l’accord de normalisation des relations avec les Émirats arabes unis, et sa « loi de réglementation » être invalidée par la Haute Cour.

La Haute Cour a statué en juin que cette législation « violait les droits de propriété et d’égalité des Palestiniens, et donnait indiscutablement la priorité aux intérêts des résidents israéliens [des implantations] sur ceux des résidents palestiniens [de Cisjordanie] ».

Bien que similaires au « marché de régulation », les implications de la « loi de réglementation » auraient été beaucoup plus vastes et auraient permis la légalisation d’environs 4 000 foyers – nombre estimé par des experts. La législation précise également que tout soutien de l’État équivaut à la « bonne foi ». Avec le « marché de régulation », la bonne foi ne peut être établie que dans la transaction immobilière elle-même. Dans la décision du tribunal de district de Jérusalem concernant Mitzpe Kramim, le juge a estimé que l’octroi du terrain par la Division des implantations aux résidents était équivalent à une transaction immobilière. Jeudi, la Haute Cour a rejeté cet argument.

Le procureur général Avichai Mandelblit s’exprime lors d’une manifestation à l’université de Bar-Ilan, le 4 mars 2020. (FLASH90)

Malgré l’approbation du « marché de régulation », la décision de la Haute Cour a fâché les législateurs de droite et les défenseurs de l’annexion, qui ont accusé la plus haute instance juridique de « favoritisme d’extrême gauche ».

« Je suis attristé par la décision erronée de la Haute Cour ordonnant l’évacuation de Mitzpe Karmim », a déclaré Netanyahu dans un communiqué. « J’ai demandé au directeur général de mon bureau, Ronen Peretz, d’aller à la rencontre des représentants de la communauté. Nous ferons tout notre possible pour garder les résidents là où ils sont, et nous sommes convaincus que nous y parviendrons. »

Le président de Yamina, Naftali Bennett, a qualifié la décision de « scandaleuse, qui n’a ni logique ni justice ».

« Après que les juges de la Haute Cour ont voté contre la démolition de la maison d’un terroriste meurtrier, ils se prononcent en faveur de la destruction d’une implantation prospère où vivent les meilleurs de nos fils », a-t-il déclaré, faisant référence à une décision récente du tribunal, ordonnant la condamnation de la chambre de Nazmi Abu Bakr, accusé d’avoir tué le sergent Amit Ben-Ygal, âgé de 21 ans, en lançant une brique depuis un toit. Le panel des juges a décidé d’annuler la démolition du reste de la maison, prenant en considération que l’épouse d’Abou Bakr et ses huit enfants, qui n’étaient pas impliqués dans l’attaque, y vivaient toujours.

« La Haute Cour est devenue le défenseur des maisons de terroristes et le destructeur des maisons juives », a déclaré le député de Yamina Matan Kahana dans un communiqué.

« Seul un cœur de pierre et une hostilité aux implantations […] peuvent conduire à cette décision. Yamina mènera des démarches législatives pour empêcher la destruction de l’implantation », a ajouté Bennett, faisant allusion à une possible législation qui permettrait à la Knesset d’invalider les décisions de la Haute Cour.

Des soldats de la brigade Golani montent la garde près de la tombe du sergent de première classe Amit Ben-Yigal, après qu’elle a été vandalisée, au cimetière de Be’er Yaakov, le 15 mai 2020. (Crédit : Yossi Aloni/ Flash90)

Moshe Ya’alon, du parti centriste Yesh Atid-Telem, a déclaré dans un communiqué qu’il avait lu la décision « avec tristesse ». Cependant, il a insisté qu’elle devait « être respectée ».

« L’État doit examiner les possibilités offertes par la loi pour changer [ce décret sévère] », a ajouté Ya’alon.

Même à gauche, la décision du tribunal a déclenché la colère : Nitzan Horowitz, président du Meretz, a déploré la validation de l’utilisation du « marché de régulation » pour légaliser les bâtiments construits sur des terres palestiniennes privées.

« L’évacuation de l’avant-poste illégal de Mitzpe Karmim est l’application pratique du commandement ‘tu ne voleras pas’ », a-t-il dit, avant d’affirmer que la décision des juges concernant le « marché de régulation » ouvrait la voie « vers de futures expropriations de terres ».

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