La mère de l’adolescente de 13 ans agressée jure de faire retenir le « viol »
Après l'agression présumée d'une adolescente dans un hôtel COVID, sa mère dit que les faibles accusations retenues contre le suspect "donnent une légitimité" aux futurs attaquants
La mère d’une adolescente qui a déclaré avoir été agressée sexuellement par un homme alors qu’elle se trouvait à l’isolement dans un hôtel de quarantaine pour le coronavirus, des structures dirigées par les services de l’État, a évoqué son calvaire dans des entretiens accordés samedi.
L’incident présumé est arrivé dans un hôtel qui permet aux jeunes de se mettre en quatorzaine quand ils sont dans l’incapacité de le faire chez eux, à la fin du mois dernier.
« C’est une adolescente, elle a 13 ans, tout est compliqué pour elle aujourd’hui », a-t-elle dit à la Treizième chaîne. « Physiquement, plus rien ne fonctionne chez elle. Elle passe la plus grande partie du temps au lit, elle vomit beaucoup, elle est comme déconnectée à certains moments. A d’autres, elle revit les choses sous la forme de flashbacks. C’est très, très difficile pour elle », s’est exclamé la mère.
Elle a fustigé les juges qui n’ont pas retenu la charge de viol dans ce dossier. Elle a juré qu’elle se battrait pour que l’agression soit requalifiée en viol.
Yarin Sherf, 21 ans, a été inculpé en première instance par le tribunal de Tel Aviv pour relations sexuelles interdites, harcèlement sexuel, menaces et enivrement d’une personne mineure – mais pas pour viol.
« Cela a été un choc énorme pour nous d’apprendre ce jugement », a-t-elle dit. « Bien sûr, nous n’allons pas en rester là et nous irons jusqu’à la Haute-cour si c’est nécessaire ».
L’absence de mise en examen pour viol « donne de la légitimité aux violeurs potentiels », a-t-elle ajouté.
« Si lever la main sur une adolescente, si les violences et l’absence de consentement sont qualifiés de ‘consensuels’, alors où en sommes-nous arrivés en 2021 ? », a-t-elle interrogé.
Elle a expliqué à la Douzième chaîne s’être tournée vers les services sociaux parce que sa fille avait attrapé la COVID-19.
Son visage est resté flouté pendant toute cette interview émouvante pour protéger l’anonymat de sa fille.
« J’ai fait appel aux services sociaux pour empêcher une situation potentiellement dangereuse pour ma fille et qui, je le reconnaissais, pouvait bien arriver. Et les services sociaux se sont donc impliqués et ma fille, malade de la COVID-19, a été transférée dans un hôtel de quarantaine », a-t-elle continué.
Elle a indiqué s’être opposée d’abord au départ de sa fille dans un hôtel mais que les travailleurs sociaux lui avaient alors promis qu’elle serait en sécurité et surveillée à chaque instant. Les autorités lui avaient dit que seuls les autres enfants placés, eux aussi, sous la protection des services sociaux séjournaient dans l’établissement.
« J’ai ressenti comme un malaise en permanence. Les travailleurs sociaux et les conseillers le savaient très bien. Je leur avais dit que j’avais peur », a-t-elle déclaré. « Je n’ai pas pensé une seule seconde que l’État mettrait une adolescente de treize ans avec un homme adulte, âgé de 21 ans, un criminel qui avait déjà fait de la prison. Je n’aurais jamais pensé qu’il les mettrait tous les deux dans le même bâtiment ».
La mère de la jeune fille avait exprimé son indignation suite à l’audience de la cour qui avait écarté la retenue du chef de viol dans le dossier, jeudi.
« Je n’arrive pas à croire que je suis en train de dire ça – mais j’ai le sentiment que ma fille a été violée une seconde fois », avait-elle déclaré.
Le bureau du procureur de l’État a fait savoir vendredi qu’il réexaminerait ce jugement.
Le procureur de l’État, Amit Aisman, devrait convoquer une réunion en urgence dans ce dossier pendant la semaine.
Cette annonce a été précipitée par la vive indignation qui s’est exprimée suite au jugement excluant le viol.
La décision avait aussi été dénoncée par les activistes et des manifestants s’étaient réunis aux abords de la cour des magistrats de Tel Aviv, jeudi, lors de l’audience de mise en examen, pour afficher leur soutien à la victime.
Même si la loi israélienne établit que des relations sexuelles avec un mineur de moins de 14 ans constituent un viol – même si les relations sont consensuelles – les procureurs n’ont pas retenu la qualification de viol, la jeune fille ayant déclaré à Sherf qu’elle avait 14 ans.
Les procureurs ont demandé que Sherf reste en détention jusqu’à la fin de la procédure.
« L’accusé a profité de son pouvoir face à la mineure et, même s’il avait connaissance de son très jeune âge, il ne s’est pas arrêté avant d’avoir obtenu ce qu’il voulait », a écrit la procureure Ravit Shafir, qui a émis l’acte d’inculpation.
Cet incident survient alors que plusieurs dossiers de haut-niveau de violences faites aux femmes ont été révélés en Israël – une tendance qui a entraîné l’organisation de manifestations réclamant au gouvernement de passer à l’acte contre ces abus.
Le cofondateur des services d’urgence de la ZAKA a été accusé, cette semaine, d’agressions sexuelles à l’encontre de six personnes, des accusations rendues publiques dans un reportage de Haaretz.
Au début de la semaine dernière, trois hommes ont été arrêtés pour viol en réunion sur une adolescente âgée de 16 ans dans le nord du pays.
Au mois de février, un agent de police a été inculpé pour meurtre après avoir tué par balle son épouse dans l’implantation de Naale, en Cisjordanie.
Quelques jours plus tôt, un homme a été condamné à 15 ans d’emprisonnement pour le viol et le meurtre prémédité de la fille de son ex-conjointe. La victime n’avait que douze ans.
Au mois de septembre, l’année dernière, onze hommes avaient été arrêtés pour le viol en réunion présumé d’une adolescente de seize ans qui avait eu lieu dans un hôtel d’Eilat, un dossier qui avait choqué le pays et entraîné des appels à la réforme.