Le laboratoire COVID de l’aéroport reste inactif, malgré l’augmentation des cas
Au lieu d'utiliser les nouvelles installations, les autorités envoient les échantillons à tester hors de l'aéroport, causant des retards massifs et une incompréhension générale
À l’endroit même où le variant Delta, hautement contagieux, est entré en Israël, un outil majeur de l’arsenal de défense du pays contre le virus est pratiquement mis hors service.
Un laboratoire ultramoderne de dépistage du coronavirus, d’une valeur de 25 millions de shekels (6,4 millions d’euros), est pour l’essentiel hors service depuis que le ministère de la Santé a mis fin à son rôle dans le plus grand défi sanitaire du pays : la mise en quarantaine rapide des personnes positives à la COVID arrivant de l’étranger afin d’arrêter la propagation du virus, a fortiori si elles sont porteuses du nouveau variant.
Au lieu de cela, dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres bâclée, le ministère a provisoirement attribué le contrat à une société dont les laboratoires sont hors site, ce qui entraîne un ralentissement du processus et des engorgements massifs, le laboratoire de l’aéroport lui-même n’étant pas utilisé à bon escient.
« C’est fou », a déclaré au Times of Israel le Dr. Avi Weissman, directeur adjoint du centre médical Rambam qui s’est associé à la société Omega dans la gestion du laboratoire abandonné. « Dans un pays qui s’est si bien battu contre la COVID, nous laissons toutes les avancées et les installations que nous avons construites à l’aéroport être gâchées par des décisions de fonctionnaires. »
C’est à l’aéroport Ben Gurion qu’est apparu pour la première fois le variant qui se répand maintenant rapidement en Israël, et qui représente actuellement autour de 300 nouveaux cas par jour. Le professeur Gabi Barbash, ancien directeur général du ministère de la Santé, a noté que c’est par là qu’arriverait presque certainement le prochain variant dangereux, qui pourrait être plus mortel ou plus résistant aux vaccins.
« Je ne m’inquiète pas pour l’aéroport à cause du variant Delta, qui est déjà là, mais je m’inquiète pour l’aéroport concernant l’entrée du prochaine variant », a-t-il déclaré au Times of Israel mercredi.
Si les nouveaux arrivants sont tous testés, et si les cas positifs sont assurément mis en quarantaine, Israël a une chance d’empêcher l’entrée de nouveaux variants. Mais si les tests ne sont pas efficaces, des cas positifs sont beaucoup plus susceptibles de passer la frontière et de se propager dans la population.
Les trois quarts des arrivants en Israël sont des citoyens israéliens vaccinés qui sont généralement dispensés de quarantaine à leur retour, en partant du principe que s’ils sont positifs à la COVID, un test à l’aéroport le montrera rapidement, et ils recevront alors un ordre d’isolement. Mais plus longue est l’attente des résultats, plus les individus positifs se promènent librement, risquant d’infecter d’autres personnes.
Les résultats sont également importants pour alerter les Israéliens non-vaccinés et les arrivants étrangers s’ils sont porteurs de la COVID. Ces personnes sont censées être mises en quarantaine dès leur arrivée, quels que soient les résultats des tests. Toutefois, le Premier ministre Naftali Bennett a reconnu que « beaucoup » contournaient l’ordre d’isolation. Néanmoins, lorsque les porteurs sont définitivement informés qu’ils sont positifs, ils sont beaucoup moins nombreux à ignorer les exigences de quarantaine.
Dès la mi-juin, des voyageurs arrivant dans le pays ont commencé à faire état d’expériences chaotiques dans les centres de dépistage des aéroports. Le 18 juin, juste avant l’explosion des cas de coronavirus, la situation était telle que près de 3 000 passagers vaccinés ont été priés de quitter l’aéroport sans subir de tests, afin d’éviter qu’ils ne s’entassent et ne s’infectent mutuellement.
Les cas de coronavirus ont encore augmenté ces derniers jours, atteignant près de 300 nouveaux cas par jour. En parallèle à cette augmentation, les files d’attente pour se faire tester n’ont cessé de grossir, tandis que des récits de personnes qui n’ont pas pu obtenir leurs résultats de tests ont fait surface.
La plupart des passagers ont supposé que c’était simplement parce que les stands de test et les laboratoires étaient en sous-effectif et peinaient à faire face à la demande. Mais à quelques centaines de mètres de l’endroit où ils faisaient la queue, se trouvaient des guichets de prélèvement vides et un énorme laboratoire de dépistage qui ne fonctionnait presque pas.
Seule une des quatre machines du laboratoire géré par la société Omega fonctionne en raison de l’absence de demande, la société étant reléguée aux tests des voyageurs sortants uniquement. Pendant ce temps, les tests des nouveaux arrivants sont effectués par une autre société, Femi Premium, et envoyés dans ses laboratoires, dont certains sont éloignés de l’aéroport.
Le service Check2Fly d’Omega, exploité avec l’aide du centre médical Rambam, fournissait des tests aux passagers sortants et entrants, en effectuant des prélèvements et des analyses de laboratoire sur place, jusqu’à ce que son contrat initial, démarré en novembre, ne prenne fin le 15 juin.
Le contrat avait été initié par l’Autorité aéroportuaire, qui était responsable de tous les tests, mais il a pris fin sous l’égide du ministère de la Santé, qui a pris le contrôle des tests pour les passagers entrants en mars.
Le ministère de la Santé a décidé de lancer un nouvel appel d’offres pour les tests à l’arrivée, mais n’a pas terminé le processus avant l’expiration du contrat avec Omega.
En mettant en place une solution temporaire jusqu’à ce que le processus d’appel d’offres soit terminé, il n’a pas renouvelé le contrat avec la société choisie par l’Autorité aéroportuaire, Omega, malgré le fait qu’elle dispose d’un laboratoire sur place, ni pris des dispositions pour qu’une autre société utilise le laboratoire existant. À la place, elle a conclu un accord temporaire avec Femi pour effectuer des tests tout en livrant des échantillons à ses laboratoires situés à une heure et demie de route.
Le laboratoire de Check2Fly ne traite plus que les tests des passagers sortants, une question bien moins urgente en termes de lutte contre le virus en Israël, et ne fonctionne qu’à 20 % de sa capacité.
Les membres de l’équipe de Check2Fly reconnaissent que le renouvellement de leur contrat n’allait pas forcément de soi, mais restent incrédules quant au fait que le laboratoire sur place ne soit pas utilisé pour au moins certains passagers entrants.
« Je ne dis pas que nous aurions dû continuer à le faire, mais le changement aurait pu être plus organisé », a déclaré Weissman. « Ils auraient pu utiliser notre laboratoire ou notre personnel – n’importe quoi pour donner un sentiment de continuité et s’assurer, avant la relève, que tout était fonctionnel. »
Le ministère de la Santé n’a pas répondu aux questions concernant la situation à l’aéroport.
Par ailleurs, le laboratoire Check2Fly pourrait bientôt être complètement arrêté et ne plus fournir de tests, même pour les passagers sur le départ. En effet, une procédure judiciaire est en cours pour examiner l’allégation d’une société concurrente selon laquelle l’installation – dans laquelle une société privée travaille avec un hôpital public – ne respecte pas les conditions de l’appel d’offres initial qui a été lancé pour ce service.
Naftali Bennett a clairement fait savoir qu’il était consterné par les diverses décisions prises concernant la lutte contre le virus à Ben Gurion avant son entrée en fonction le 13 juin.
Il a déclaré dimanche que l’aéroport avait été un « énorme point faible » tout au long de la pandémie. La gestion de l’aéroport a été un « échec majeur », a-t-il dit, ajoutant que cela « nous a causé du tort et provoqué la mort de milliers d’Israéliens ».
Bennett a nommé un commissaire à la gestion de la COVID à l’aéroport, Roni Numa, et son gouvernement va lancer un appel d’offres pour la construction d’une zone agrandie de dépistage du virus à l’aéroport.
À Ben Gurion mercredi matin, trois jours après les commentaires de Bennett, il était clair que Femi faisait de nouveaux efforts pour augmenter sa capacité de tests, avec des dizaines de jeunes travailleurs nouvellement recrutés arrivant pour leur premier jour. Il y avait une soixantaine de stations, et une équipe a été assemblée pour envoyer les échantillons aux laboratoires.
Le Times of Israel a demandé à interviewer le personnel de la Femi, une demande transmise à la direction, mais notre reporter a été escorté hors des locaux et n’a pu joindre aucun responsable pour commenter la situation.
Désormais, tous les regards sont tournés vers le nouveau ministre de la Santé, Nitzan Horowitz – qui a pris ses fonctions deux jours seulement avant la transition d’Omega à Femi –, observant la manière dont il gérera la situation complexe de l’aéroport, et s’il parviendra à traduire son enthousiasme pour le changement en une politique cohérente.
« Afin de maintenir la routine quotidienne en Israël, nous devons surveiller de près l’entrée en Israël », a-t-il commenté dimanche, promettant d’agrandir les installations de test et déclarant : « En coopération avec tous les ministères du gouvernement, nous protégerons la santé publique en Israël tout en imposant des restrictions minimales au public. »