Le Labour promet une enquête sur la fuite d’un rapport sur l’antisémitisme
Le nouveau chef du parti aurait déjoué la tentative des partisans de son prédécesseur Jeremy Corbyn d'arrêter l'enquête ; certains risqueraient des sanctions disciplinaires

Le Parti travailliste britannique (Labour) a fait savoir jeudi qu’il allait rapidement enquêter sur la fuite d’un rapport interne sur la manière dont il traite les cas d’antisémitisme dans ses rangs.
L’organe directeur du parti a fixé un calendrier pour que l’enquête soit terminée à la mi-juillet.
Les partisans de l’ancien chef du Labour Jeremy Corbyn avaient tenté d’empêcher une enquête sur cette affaire, a rapporté le Times, mais leur échec a été considéré par certains comme la preuve que son successeur, Sir Keir Starmer, a consolidé son pouvoir au sein du parti.
D’après The Guardian, Keir Starmer a assuré que ceux nommés dans le rapport comme ayant enfreint les règles risquent des mesures disciplinaires.

Le rapport interne a trouvé des failles dans le traitement par le parti des incidents antisémites entre 2014 et 2019, reconnaissant que les plaintes n’étaient pas correctement enregistrées et souvent ignorées. Mais il a surtout accusé « une atmosphère hyper-factionnelle » et l’hostilité envers l’ancien leader Jeremy Corbyn au sein du parti de mettre à mal les efforts de lutte contre la haine des Juifs.
Les critiques ont déclaré que le rapport a été divulgué dans le but de salir les dénonciateurs qui ont tiré la sonnette d’alarme sur l’étendue de l’antisémitisme au sein de la formation.
Selon le Guardian, le rapport sur le département juridique et de gouvernance du Labour – qui a traité les plaintes d’antisémitisme – a révélé que « de nombreux membres du personnel, y compris le personnel [de l’unité juridique et de gouvernance] et les cadres supérieurs… étaient amèrement opposés à la direction de Jeremy Corbyn, et semblent avoir été démotivés, ou s’être largement consacrés à faire avancer un programme dissident ».
L’enquête a constaté que la situation s’était améliorée depuis que l’actuelle secrétaire générale Jennie Formby avait pris ses fonctions en 2018.
L’enquête s’est achevée le dernier mois de la direction de Jeremy Corbyn. Elle a conclu qu’aucun membre actuel ou ancien du personnel n’était « motivé par une intention antisémite ».
L’enquête a révélé un manque de « processus, de systèmes, de formation, d’éducation et de gestion hiérarchique efficaces ».

Le rapport devait à l’origine être soumis à la Commission britannique pour l’égalité et les droits de l’homme dans le cadre de son enquête sur les allégations d’antisémitisme au sein du Labour, mais il aurait été mis en veilleuse par les avocats du parti qui craignent qu’il ne cause d’autres dégâts.
Il y a un an, cette Commission avait annoncé avoir lancé une enquête officielle sur les allégations d’antisémitisme au sein du Parti travailliste.
L’EHRC, le principal organe de surveillance du gouvernement en matière de lutte contre le racisme, a déclaré qu’elle enquêterait pour savoir si le principal parti d’opposition dirigé à l’époque par Corbyn avait fait preuve de discrimination, de harcèlement ou de persécution à l’égard des Juifs, en violation de la loi britannique sur l’égalité de 2006.
La commission a déclaré qu’elle examinerait également si le parti avait répondu aux plaintes d’actes illégaux de manière légale, efficace et effective.
Répondant à la décision d’étouffer le rapport interne plutôt que de le soumettre à l’EHRC, un porte-parole du Parti travailliste a expliqué à la chaîne Sky News : « Le parti a soumis des informations détaillées à l’EHRC et a répondu aux questions et aux demandes d’informations complémentaires, dont aucune ne comprenait ce document ».
Selon Sky News, les avocats du parti craignaient que l’enquête interne ne nuise à son cas.
Le nouveau leader travailliste Kier Starmer, qui a remplacé Corbyn lors d’élections internes au début du mois, a assuré qu’il coopérerait pleinement à l’enquête de l’EHRC sur l’antisémitisme au sein du parti.