Le périple de deux étudiantes nigérianes, d’Ukraine au centre Hillel de Berlin
Le centre communautaire juif allemand mène une campagne de collecte de fonds pour permettre aux de jeunes femmes de terminer leur formation médicale aux États-Unis
BERLIN (JTA) – Les étudiantes nigérianes Funke Oluwatosin et Deborah Ologbenla, toutes deux âgées de 16 ans, ont reçu un cours accéléré sur la vie juive allemande – à la suite d’un voyage très inattendu.
Les amies étudiaient à l’université de médecine de Kiev lorsque la Russie a lancé son invasion de l’Ukraine le 24 février. Elles ont fui dès le début des violences, et se sont dirigées vers Varsovie, en Pologne, où elles ont été séparées dans la panique, parmi les transports rapides en partance pour d’autres pays.
Oluwatosin a poursuivi sa route avec un groupe de cinq autres étudiants nigérians en direction de Berlin, où un juif américain du New Jersey les a repérés à la gare centrale de Berlin et leur a proposé de les aider à trouver un logement. Il a raconté leur histoire sur un chat Telegram pour les Juifs d’Allemagne qui aidaient à loger les réfugiés déplacés d’Ukraine.
Le rabbin Jeremy Borovitz, directeur de l’enseignement juif à Hillel Deutschland – un centre d’apprentissage et d’engagement communautaire pour les étudiants et les jeunes professionnels juifs de Berlin – a vu le message et a proposé d’héberger le groupe d’Oluwatosin dans les locaux du siège de Hillel, transformé en auberge temporaire.
Oluwatosin a mentionné son amie restée à Varsovie et a demandé si elle pouvait se joindre à eux. Borovitz a donné son accord avec enthousiasme et Ologbenla est arrivée à Berlin quelques jours plus tard.
Oluwatosin, Ologbenla et le reste du groupe sont restés dans les locaux de Hillel Deutschland pendant les cinq semaines suivantes, découvrant la culture juive sur le vif dans leur maison temporaire. Depuis, des membres de la communauté Hillel Deutschland les ont accueillis chez eux en attendant de trouver une solution à leur avenir.
Selon le ministère de l’intérieur du pays, l’Allemagne a accueilli quelque 383 916 réfugiés ukrainiens depuis le début de l’invasion russe. On estime que 60 000 d’entre eux sont restés et vivent à Berlin dans des foyers de bénévoles et des centres de réfugiés.
Le chat Telegram illustre la manière dont la communauté juive allemande en particulier a su se mobiliser rapidement et fournir des secours et des logements aux juifs et aux non-juifs fuyant la guerre.
« Nous les avons aidés parce que c’étaient eux qui avaient été placés sous nos yeux », a déclaré M. Borovitz. « Ils étaient définitivement dans une situation particulièrement vulnérable, car il y a eu moins d’intérêt à venir en aide aux ressortissants de couleur de pays tiers qu’aux Ukrainiens. »
« Et je persiste à penser que nous avons la responsabilité d’aider les plus vulnérables. La marque d’une société juste est la façon dont elle traite les éléments les plus vulnérables », a-t-il ajouté.
« Mais nous avons également hébergé des Ukrainiens dans l’auberge », a-t-il ajouté. « Nous avons aidé tous ceux qui sont venus nous demander de l’aide. Et, en fin de compte, ce sont eux qui se sont trouvés à notre porte et qui avaient besoin d’aide. »
Pendant leur séjour au centre Hillel, Oluwatosin et Ologbenla ont été immergées dans un nouveau milieu juif. Pour Pourim, elles ont participé à une sorte de fête de rue organisée par Hillel, où elles ont aidé à servir des hamburgers et des hotdogs aux passants, elles ont aussi assisté à quelques dîners de shabbat et à des cérémonies de havdalah (prière de fin de shabbat).
« Je n’avais jamais rien fait de tel avant. C’est nouveau pour moi », a déclaré Ologbenla à propos des offices de prière juifs. « Mais j’aime bien ça. Nous nous réunissons et tout le monde apprend à se connaître. »
Bien que les deux étudiantes continuent de suivre des cours en ligne, il est évident qu’elles ne pourront pas terminer leurs études en Ukraine. Comme elles ont toutes deux de la famille aux États-Unis, elles ont décidé de poser leur candidature à la Temple University de Philadelphie pour poursuivre leurs études.
Toutes deux ont été admises et Hillel Deutschland a lancé une collecte de fonds pour les aider à trouver des financements – l’objectif est de financer la première année d’études d’Ologbenla et d’Oluwatosin. Elles espèrent par la suite combiner prêts et aide familiale pour poursuivre leurs études. Jusqu’à présent, le centre Hillel a récolté 55 000 dollars sur les 80 000 visés, principalement grâce à l’aide de donateurs juifs américains.
Malheureusement pour les candidates à la médecine, le gouvernement américain a récemment rejeté leurs premières demandes de visa d’étudiant. Le raison principale étant qu’elles n’étaient pas en mesure de prouver qu’elles retourneraient au Nigeria après avoir obtenu leur diplôme.
« Ce sont deux jeunes femmes qui rêvent d’être médecins dans leur pays natal, le Nigeria », a déclaré M. Borovitz. « L’université de Temple a pu le constater, les 100 donateurs uniques qui ont contribué à notre campagne ont déjà pu le constater, et j’espère que le gouvernement américain pourra également le constater. »
Borovitz estime que la charge de la preuve est beaucoup plus exigeante pour les étudiants originaires d’Afrique que pour les Européens blancs. De plus, aucune instruction n’a été donnée aux étudiantes sur les éléments à fournir pour prouver leur volonté de retourner au Nigeria après l’obtention de leur diplôme. Un avocat spécialisé dans les questions d’immigration apporte ses conseils aux étudiantes à titre gracieux, pendant qu’elles continuent à rassembler autant de preuves que possible sur leurs liens familiaux avec le Nigeria dans le but de prouver qu’elles y retourneront après l’obtention de leur diplôme.
Elles comptent retourner à l’ambassade des États-Unis à Berlin prochainement pour continuer de plaider leur cause.
« Mes arrière-grands-parents étaient des immigrants qui avaient fui les pays d’où ils venaient, c’est-à-dire aujourd’hui l’Ukraine et la Pologne, et des gens les ont aidés en cours de route », a déclaré M. Borovitz. « Je pense que nous avons une responsabilité en tant que juifs, et une responsabilité morale en tant qu’êtres humains d’aider les gens qui se trouvent devant sous nos yeux. Et ce sont ces êtres humains que nous avons rencontrés, et je suis vraiment reconnaissant aussi de les avoir rencontrés. »
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