Le projet de loi du report du budget passe sa première lecture
La commission des Finances de la Knesset a envoyé le texte en plénière après une réunion bruyante, au cours de laquelle les députés ont accusé la coalition de "troller le pays"
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël

La commission des Finances de la Knesset a approuvé, lundi, la première lecture d’un projet de loi qui accorderait plus de temps au gouvernement de coalition pour adopter un budget national – ce qui permettrait d’éviter des élections en repoussant la date-limite pour l’approbation du budget qui avait été fixée au 25 août.
Le texte, qui a été proposé par le député de la faction Derech Eretz, Zvi Hauser, doit être approuvé lors de trois lectures avant de devenir une loi, mais son avenir est toutefois incertain, le Likud ne s’étant pas engagé à le soutenir en deuxième et troisième lecture.
Il devrait être présenté en première lecture dans l’après-midi de lundi. Le projet de loi nécessitant une modification des Lois fondamentales quasi-constitutionnelles dans le pays, le projet de loi devra être approuvé par une majorité de 61 députés à la Knesset, forte de 120 membres.
Les membres du parti ultra-orthodoxe Yahadout HaTorah devaient organiser une rencontre, avant le vote, pour décider si ses sept législateurs apporteraient leur soutien au texte ou s’il s’y opposeraient, comme certains l’avaient fait lors de la lecture préliminaire, la semaine dernière. La formation est favorable à l’adoption rapide d’un budget, rejetant la possibilité d’un nouveau report.
La date-butoir pour l’adoption du budget a été fixée au 25 août. Le projet de loi stipule que cette date pourrait être prolongée de cent jours, au 3 décembre. Si le texte – ou le budget – devaient ne pas être approuvés le 25 août, le pays devrait alors automatiquement organiser de nouvelles élections – ce serait le quatrième vote en moins de deux ans.
Le leader de Yahadout HaTorah Yaakov Litzman, qui est aussi ministre du Logement, s’est entretenu lundi avec le président Reuven Rivlin, lui disant : « Nous devons nous unir dans un effort national conjoint pour éviter un nouveau retour aux urnes ».
« Il est impensable qu’il y ait une autre campagne électorale pendant cette période difficile, alors que l’économie est en crise, que le taux d’infection est élevé et que les citoyens attendent de leurs dirigeants de faire preuve de responsabilité et de répondre aux besoins du peuple », a dit Litzman à Rivlin.
La semaine dernière, Yahadout HaTorah avait permis à ses députés de voter librement sur le projet de loi lors de la lecture préliminaire – Litzman aurait toutefois vivement recommandé à sa faction de s’opposer au texte pour amener le Premier ministre Benjamin Netanyahu à adopter un budget avant la date-butoir du mois d’août.
YaHadout HaTorah veut qu’un budget soit rapidement déterminé pour permettre le déblocage de fonds en faveur des yeshivot ultra-orthodoxes, dénuées de toutes liquidités, des établissements au cœur de la vie communautaire haredi.
Avec le soutien de l’autre parti ultra-orthodoxe à la Knesset, Shas, la législation devrait passer le stade de ce vote en plénière. Mais le Likud ne s’est pas engagé à la soutenir au-delà de la première lecture dans un contexte de querelle avec son partenaire de coalition, Kakhol lavan, sur les termes du maintien du gouvernement d’unité.

Au cours de la réunion de la commission des Finances de lundi, un affrontement bruyant a opposé Hauser, de la faction Derech Eretz, et les députés issus de l’opposition, qui sont défavorables au report de l’approbation du budget.
« Mais qu’est-ce qui vous a empêché d’adopter un budget jusqu’à aujourd’hui ? », a interrogé le député Ram Ben-Barak, député du parti d’opposition Yesh Atid, en interpellant Hauser.
« Une collection de riens », s’est indigné Miki Levy, qui appartient au même parti.
« Je comprends que la raison d’être de l’opposition, ou ce qu’elle cherche, c’est de punir la coalition mais elle ne doit pas pour autant punir la population », a rétorqué Hauser. « Vous savez pertinemment qu’il est impossible que nous approuvions un budget en sept jours, alors arrêtez de mentir aux Israéliens. Regardez les Israéliens, montrez de la maturité et de la solidarité avec le public et aidez-nous à éviter des élections », a-t-il ajouté.
Levy a riposté avec force : « Adoptez le budget, arrêtez de troller le pays ! »
Ben-Barak a alors demandé : « Qu’est-il donc arrivé pendant les cent jours qui viennent de s’écouler ? »
Des représentants du Likud et de Kakhol lavan se sont rencontrés dimanche soir pour tenter de résoudre la crise budgétaire. Selon des informations, peu de progrès auraient été réalisés au cours de ces entretiens.
Le Premier ministre – qui a formé un gouvernement d’unité avec Benny Gantz, dirigeant du parti Kakhol lavan, après trois cycles électoraux qui ont échoué à désigner un vainqueur clair – pourrait, selon les rumeurs, chercher à provoquer un nouveau vote national dans un contexte de désaccords continus au sein du gouvernement et pour empêcher d’avoir à honorer dans un peu plus d’un an et demi un accord de rotation au poste de chef de gouvernement conclu avec Gantz.
S’il n’y avait eu la pandémie de coronavirus, a indiqué Netanyahu dimanche au micro de la radio militaire, la coalition se serait d’ores et déjà effondrée.
Les querelles se sont concentrées sur le budget de l’Etat. Gantz a insisté sur un budget qui couvrirait l’année 2020 et l’année 2021, comme le stipule, par ailleurs, l’accord de coalition signé entre les deux parties, tandis que Netanyahu ne veut qu’un budget courant sur le reste de l’année 2020, citant l’incertitude liée à la pandémie.
Selon un reportage qui a été diffusé la semaine dernière par la Douzième chaîne, Netanyahu demanderait aussi à Gantz que quelques changements soient effectués dans l’accord de coalition, sur des sujets sans lien avec le budget, comme condition au maintien du gouvernement actuel.
Toujours selon la Douzième chaîne, Netanyahu demande que l’accord soit changé de manière à ce que des élections soient immédiatement organisées si la Haute cour de Justice devait l’écarter du poste de Premier ministre d’alternance après la remise du mandat de chef de gouvernement à Gantz, au mois de novembre 2021. L’accord actuel ne protège actuellement Netanyahu que pendant les six premiers mois de l’existence du gouvernement.
Netanyahu réclamerait également que l’arrangement déterminant la formation d’une commission professionnelle pour nommer les hauts-responsables – comme le procureur d’Etat et le chef de la police – soit annulé, ce pouvoir revenant aux politiciens. Lors de son entrée dans le gouvernement de Netanyahu, Kakhol lavan avait déclaré que cette initiative lui permettrait de protéger l’indépendance des institutions démocratiques et du système judiciaire.