Les diplômes des dentistes étrangers bientôt reconnus en Israël
Une loi favorable à la reconnaissance des diplômes de dentistes étrangers en Israël vient de passer un premier cap à la Knesset
« Nous constatons, enfin, une véritable volonté politique de faire avancer le dossier », se félicite Thierry Lasker, membre actif de l’EFI, l’association des chirurgiens-dentistes francophones en Israël, qui a effectivement de quoi se réjouir.
Le 11 janvier, le groupe de travail de la Knesset a validé un projet de loi qui exempte les dentistes de plus de cinq ans de pratique de l’examen d’équivalence en Israël.
Le lobby de l’EFI, soutenu par la toute jeune mais très efficace association Qualita, mais aussi le bruit fait par le dentiste français David Tibi sur les réseaux sociaux, semblent donc porter ses fruits. Laissant entrevoir une véritable révolution pour les aspirants à l’alyah.
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Après un premier vote favorable à la Knesset le 28 décembre, le projet de loi, porté par Yisraël Beytenu et soutenu par quasiment tous les partis politiques, a de sérieuses chances d’aboutir dans les mois qui viennent.
« Dans le meilleur scénario à l’été 2016 », confirme Olivier Rafowicz, Colonel de réserve de Tsahal et proche d’Avigdor Liberman. « Peut-être même à Pessah », ose espérer Thierry Lasker.
Aujourd’hui, on évalue à quelques centaines, entre 300 et 400, le nombre de dentistes ayant obtenu l’équivalence de leurs diplômes français sur le territoire israélien, pour un peu plus de 9 000 praticiens au total.
Chaque année, moins d’une dizaine d’hexagonaux réussiraient à obtenir le précieux sésame. Pour combien d’échecs ? Personne n’avance de chiffres précis… Mais on parle de jusqu’à… 80 %.
Les nombreux récits de dentistes français interdits d’exercer en Israël après avoir fait leur alyah sont ainsi légion. « Nous parlons de praticiens qui ont souvent des dizaines d’années d’expérience ! Un seul dentiste bloqué par ce système est un dentiste de trop ! », s’insurge Olivier Rafowicz.
« Cela fait 25 ans que j’exerce et tout à coup on me considère comme un petit étudiant et on me demande de faire mes preuves et de passer des examens. Même moralement c’est difficile à supporter ! », s’agace Alain Lussato, Israélien depuis juin 2014. Ce père de neuf enfants s’est rapidement découragé devant les exigences administratives imposées pour pouvoir poser sa plaque à Raanana, la ville où il a choisi de vivre… Et continue de faire des allers-retours hebdomadaires à Paris en attendant de trouver une solution.
Meyer Habib, député de la 8e circonscription des Français à l’étranger, a salué la décision de la commission aux Affaires sociales en partenariat avec la commission à la Santé et la commission à l’Alyah et à l’Intégration.
Comme l’explique le député français sur sa page Facebook, « dans les prochaines semaines, après adoption en 2e et 3e lecture par la Knesset, tout dentiste ayant exercé pendant plus de cinq ans sera exempté des deux examens d’équivalence, théorique et pratique, ainsi que de la période de stage ! C’est une révolution. »
« Après des années de travail depuis mon élection mi-2013, c’est une immense victoire, qui offre à présent toute visibilité aux dentistes français qui envisageaient de s’installer en Israël prochainement, » a déclaré Meyer Habib.
Ce dernier salue le travail des ministres israéliens et de Benjamin Netanyahu.
« Les nombreux rendez-vous de travail et entretiens que j’ai eus avec le Premier ministre depuis deux ans ainsi qu’avec le ministre l’Alyah Zeev Elkin et plus récemment avec le ministre de la Santé Yaacov Litzmann ont eu un impact déterminant notamment pour supprimer les examens et réduire au minimum le nombre d’années d’expérience exigées, » explique le député UDI.
« L’évolution législative de ces derniers jours est une agréable surprise mais est logique », analyse Thierry Lasker.
« Depuis les attentats de janvier 2015, le gouvernement israélien sait qu’il doit agir et alléger les obstacles des olim de France. D’un autre côté, depuis Charlie, les dentistes français ne prennent plus les mêmes précautions et décident d’immigrer sans s’assurer au préalable de pouvoir exercer… C’est dangereux et cela peut provoquer des situations familiales et humaines extrêmement douloureuses ».
Le pays, entre ses appels massifs à l’alyah de France et ses exigences professionnelles élevées se retrouve en effet dans une situation schizophrène… Accueillir en masse l’immigration de qualité qu’elle appelle de ses vœux sans remettre en cause sa réputation d’excellence. Car les études dentaires, en Israël, sont reconnues comme très sélectives. Une majorité d’étudiants préfère ainsi partir étudier à l’étranger, pour ensuite faire reconnaitre leurs diplôme par une équivalence. Et seul un quart des dentistes israéliens a obtenu le diplôme en Israël. Difficile dans cette situation pour le ministre de la Santé, Yaakov Litzman, de céder trop facilement…
« D’abord les Français ne sont évidemment pas les seuls concernés par cet examen », rappelle Hervé Dari, dentiste français installé à Raanana depuis cinq ans. « Ensuite, l’alyah nécessite un minimum de préparation. L’examen d’équivalence existe depuis vingt ans et les dentistes français qui voulaient venir ont eu le temps de prendre leurs dispositions… C’est un peu facile de venir et de se plaindre que le pays nous empêche de gagner notre vie. Certains professionnels comme les infirmières ou les kinésithérapeutes doivent eux reprendre toutes leurs études depuis le début pour exercer ici. Dans leur cas, oui, la revendication est légitime ».
Outre la réussite des examens théorique – un questionnaire à choix multiple de 180 questions – et pratique exigée aujourd’hui pour tout dentiste ayant obtenu son diplôme à l’étranger, les praticiens français dénoncent un parcours du combattant administratif.
« Juste pour préparer et passer le concours, je devrais prendre des congés tant les papiers à produire et à remplir sont nombreux ! », dénonce Alain Lussato.
« Quand j’ai annoncé mon souhait de passer l’examen », raconte Mickael Salama tout juste diplômé, « on m’a conseillé de prendre un avocat, et j’ai bien fait. Entre les papiers perdus, les inscriptions à l’examen effacées, c’est le parcours du combattant… Je ne sais pas s’ils sont très mal organisés ou s’ils veulent nous barrer la route, mais il faut être très motivé ».
« Nous pensons à l’alyah avec mon mari depuis quelques mois », déclare Lisa, 32 ans, dentiste à Bordeaux, au Times of Israël, « mais je ne sais pas si je suis prête à exercer comme dentiste en Israël. Même si l’examen d’équivalence est supprimé, la pratique sur place est si différente… Entre exercice privé et Kupat holim, il semble trop difficile de créer sa propre clientèle ».
A Raanana, Hervé Dari, lui commence à remplir correctement son cabinet tout en continuant ses allers-retours mensuels à Marseille.
« Là où, en France, en six mois j’avais ma clientèle, j’ai eu besoin de cinq ans ici. Mais c’est le jeu ! Aucun dentiste français ne peut envisager, équivalence ou non, de garder le même train de vie après l’alyah ».
Alain Lussato, après des mois d’allers-retours hebdomadaires à Paris, préfère aujourd’hui penser à une reconversion avec un ami français dans… le chocolat. De quoi donner du travail à ses anciens confrères.
Charlotte Guimbert a contribué à cet article.
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