Les Egyptiens et leurs dirigeants se rapprochent des Juifs et d’Israël
Depuis al-Sissi, il y a un changement notable dans les relations avec Jérusalem et une plus grande ouverture sur les questions liées à la communauté juive locale

LE CAIRE (JTA) – Cela a été un été particulièrement difficile pour le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi.
En moins d’une semaine à la fin de juin et au début du mois de juillet, son procureur général a été assassiné dans la banlieue chic du Caire et une des organisations affiliées à l’État islamique a lancé un siège de deux jours dans la ville de Sheikh Zuweid au nord du Sinaï.
Mais quelques jours après la bataille sanglante du Sinaï, al-Sissi a consacré deux heures pour rencontrer une délégation de l’American Jewish Committee, le groupe de défense juif mondial, puis a prononcé un compte-rendu factuel de la rencontre au l’agence de presse Middle East News Agency régie par l’Etat.
La conversation a tourné autour des menaces terroristes régionales, des pourparlers de paix au point mort entre Israéliens et Palestiniens, de l’accord nucléaire avec l’Iran et de la préservation du patrimoine juif égyptien, selon le directeur de l’AJC pour les questions gouvernementales et internationales, Jason Isaacson, qui a coordonné la délégation.
La rencontre avec l’AJC au palais présidentiel est intervenue à un moment où l’attitude égyptienne sur les Juifs est en train de changer. Les Egyptiens réévaluent la politique des années 1950 de l’ère de nationalisation qui avait poussé vers la sortie la communauté juive et d’autres minorités ethniques.
Le mot « Juif » est utilisé moins souvent comme une insulte, et le drame historique télevisé Haret al-Yahood [Quartier juif] a battu des records d’audience pendant le Ramadan.
La série a présenté le groupe islamiste des Frères musulmans comme une plus grande menace pour l’unité et la sécurité de l’Egypte que les Juifs et, parfois, même que les sionistes. (Dans le passé, les séries télevisées diffusées pendant le Ramadan regorgeaient de stéréotypes négatifs sur la « trahison » de l’hostilité juive, de sorte que « Quartier juif » a constitué un changement notable.)
![Une scène du drame égyptien Haret al-Yahood [quartier juif], diffusé pendant le Ramadan 2015 (Capture d'écran YouTube) Une scène du drame égyptien Haret al-Yahood [quartier juif], diffusé pendant le Ramadan 2015 (Capture d'écran YouTube)](https://static.timesofisrael.com/fr/uploads/2015/06/Haret-al-Yahood-e1433250458171-965x4712-305x172.jpg)
« Je trouve plus de tolérance », a déclaré Isaacson, se référant à la période écoulée depuis qu’al-Sissi est arrivé au pouvoir en 2013.
« Je trouve plus de respect pour Israël et plus de sentiments de points communs entre les préoccupations stratégiques égyptiennes et israéliennes et des comportements communs envers le Hamas, en particulier en ce qui concerne les liens entre le Hamas et d’autres groupes extrémistes. »
Officiellement, moins de huit Juifs subsistent dans la capitale – toutes des femmes âgées. La présidente de la communauté, Magda Haroun, a ouvert le mois dernier la synagogue Shaar Hashamayim fortement gardée et rarement utilisée dans le centre du Caire pour un événement interconfessionnel de l’Iftar, le repas quotidien de rupture du jeûne pendant le mois du Ramadan. (Il y avait environ 75 000 juifs en Egypte avant 1948, mais dans les années 1950, la majorité de la population juive a été déchue de sa citoyenneté et de ses biens par le président Gamal Abdel Nasser.)
La rencontre a également coïncidé avec une tendance au réchauffement entre Sissi, l’homme fort qui dirige le pays arabe le plus peuplé du monde, et Israël. En juin, l’Egypte a désigné Hazem Khairat comme son nouvel ambassadeur à Tel-Aviv.
Le prédécesseur de Sissi, Mohamed Morsi, proche des Frères musulmans, avait rappelé l’ancien ambassadeur en novembre 2012 après que l’Armée de l’Air israélienne ait éliminé un haut commandant militaire du Hamas et ait lancé une offensive de huit jours dans la bande de Gaza.
الرئيس السيسي يستقبل وفداً من اللجنة الأمريكية اليهوديةاِستقبل الرئيس عبد الفتاح السيسي صباح اليوم وفداً من اللجنة…
Posted by AbdelFattah Elsisi – عبد الفتاح السيسي on Monday, July 6, 2015
La guerre d’Israël de l’été dernier à Gaza a mis en relief à quel point l’image du Hamas, fondé comme une émanation des Frères musulmans, était tombée dans les couloirs du Caire officiel depuis l’accession d’al-Sissi au pouvoir. (Morsi a été renversé dans un putsch militaire en 2013 orchestré par al-Sissi, et a été élu président l’année suivante.)
Durant l’opération Bordure protectrice, les stations de télévision égyptiennes detenues par l’État avaient spécifiquement utilisé l’adjectif « terroristes » pour décrire les attaques de missiles du Hamas lancées sur Israël.
Et dans le sillage de l’augmentation de l’activité dans le Sinaï des groupes affiliés à l’État islamique, le commandement de la region Sud de l’armée israélienne et celui de l’armée égyptienne dans le Sinaï partagent de plus en plus de renseignements sur le mouvement des contrebandiers des armes et des militants motivés idéologiquement.
Le gouvernement d’al-Sissi a également été largement critiqué en Occident pour la repression des libertés d’expression et de la presse, et pour avoir emprisonné ses opposants politiques.
Washington a retenu des fonds et des équipements après des affrontements particulièrement violents en août 2013 entre les troupes gouvernementales et les partisans de Morsi, qui ont laissé plus de 600 morts dans les rues du Caire.
En mars dernier, le président Obama a restauré le financement militaire annuel de plus d’ 1,3 milliard de dollars , et le Pentagone a repris les livraisons des nouveaux missiles Harpoon, d’avions de combat F-16 et de kits de remplacement des chars Abrams.
La capacité de l’armée de l’air égyptienne à déployer des F-16 a permis aux troupes gouvernementales de repousser l’assaut contre Sheikh Zuweid par Ansar Beit al Maqdess, un groupe affilié à l’État islamique.
Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry était lundi au Caire, où il a co-présidé une réunion de « dialogue stratégique » avec le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Shoukry.

Si une seule personnalité mérite en Egypte le crédit pour le changement contemporain dans les attitudes, c’est peut-être Amir Ramsès, dont le dernier documentaire en deux parties « Les Juifs d’Egypte » et « Fin de voyage » explore la montée et la disparition des communautés juives du Caire et d’Alexandrie entre la fin du 19e siècle et le milieu du 20e siècle.
Ramsès, un Musulman de la classe moyenne du Caire, a lutté contre les censeurs officiels sous les deux administrations de Morsi et d’Hosni Moubarak, et les islamistes ont été particulièrement ulcérés par la couverture dans le documentaire des émeutes de la « Journée de Balfour » fomentées par les Frères musulmans en 1945.
Elles coïncidaient avec l’anniversaire de la Déclaration Balfour, le document de 1917 déclarant l’intention de la Grande-Bretagne de créer une patrie juive en Palestine. Pourtant, l’an dernier, les films de Ramsès ont été projetés en Egypte et acclamés par la critique.
Ramsès a dit qu’il avait été intrigué par les histoires de ses grands-parents sur leurs voisins juifs, grecs et italiens dont les différents aliments et coutumes avaient ajouté une touche internationale à la métropole – une touche qui est désormais absente.
« La grande fresque que je suis en train de dessiner, » a-t-il dit, « est celle de la société d’avant 1952 à travers la fenêtre de la diversité d’une manière de vivre cosmopolite au Caire. »
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