Les enfants déclarent la guerre au cancer dans un camp d’été judéo-arabe
Le personnel de Sunrise cherche à donner aux patients et à leurs proches une opportunité simple et compliquée à la fois : celle d'être des enfants
Chaque jour, au camp Sunrise, des enfants de tous les groupes d’âge se réunissent en tout début de journée à l’amphithéâtre pour une démonstration de talents.
Les campeurs organisent et animent l’événement et, en ce jour particulier, c’est Liron, huit ans, qui est appelée sur scène pour se produire.
« She’s Free », la chanson de Katrix & Doron Biton, surgit des hauts-parleurs et la petite fille chante sans rater un seul mot de ce hit de l’été, au rythme plutôt rapide.
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Liron termine son spectacle sous les applaudissements des 200 personnes environ présentes dans la salle, campeurs et membres du personnel. C’est maintenant au tour de Samer.

Une autre chanson commence mais au lieu de chanter les paroles, le petit garçon de neuf ans se couche sur la scène et offre une démonstration de breakdance, acclamé par ses camarades.
La scène – qui inclut habituellement un certain nombre de moniteurs tentant de retrouver des enfants éparpillés, peu intéressés par le spectacle – pourrait sembler assez habituelle dans un camp de vacances.
Et c’est très exactement ce que le personnel du camp Sunrise, qui rassemble des enfants atteints de cancer et leurs frères et soeurs, s’est fixé comme objectif.
« Il ne s’agit pas d’emmener de petits cancéreux à [Disney World], mais plutôt de leur montrer qu’ils sont comme tout le monde – qu’ils pratiquent les mêmes activités, qu’ils font les fous et qu’ils passent un bon moment », commente Lior Svirsky, un animateur âgé de 27 ans.
Le campus où il travaille dans la ville de Beit Yehoshua, dans le centre du pays, est l’un des trois camps qui accueillent de petits malades du cancer ainsi que leurs frères et soeurs depuis 2010.

« L’expérience n’est pas moins importante pour le reste de la fratrie », explique la directrice Hagar Zakai. « Pendant le reste de l’année, ils doivent souvent se placer à l’arrière de leur frère ou de leur soeur en cours de traitement mais ici, ils ont l’occasion de se mettre en avant ».
Tandis que le camp se déroule majoritairement en hébreu, approximativement 20 % des participants à Beit Yehoshua sont des Arabes israéliens, et les instructions pour les activités sont donc données dans les deux langues.
Sur les sites de Beer Sheva, au sud, et de Ramat Yochanan au nord, les Arabes israéliens forment jusqu’à 50 % des campeurs.
« Nous n’avons pas essayé de créer un camp de coexistence, c’est arrivé naturellement, d’une certaine manière », dit Zakai.

Tandis qu’un certain nombre d’enfants qui connaissent moins l’hébreu préfèrent encore rester à proximité des animateurs arabes israéliens pour une aide à la traduction occasionnelle, aucune division claire n’est ressentie entre les petits pensionnaires.
« La coexistence fonctionne ici spécifiquement parce que ce n’est pas là-dessus que se focalise le camp », explique Svirsky.
Le moniteur, qui travaille pour le camp depuis quatre ans, ajoute qu’un grand nombre des activités sont mises en place pour n’utiliser qu’une quantité minimale de langage. « Que ce soit dans le sport, la musique, la danse, les arts, les artisanats, il y a tellement d’autres moyens pour amener ces gamins à communiquer et à se lier », dit-il.
Tandis qu’il est impossible d’éviter certaines différences culturelles, Sewar Abu-Raiya, une animatrice de 22 ans, clame que ces dernières représentent également une opportunité d’apprentissage pour les campeurs. Et pour elle aussi.
« C’est dérisoire mais ça a été drôle pour nous (Arabes) d’apprendre combien les jurons, qui sont une grosse affaire pour nous, représentent peu de choses pour les Israéliens ! », s’exclame-t-elle en riant.

Et comme dans tous les autres camps, certaines des amitiés liées à Sunrise prennent souvent des tournures plus romantiques.
« Nous avons connu un certain nombre d’histoires d’amour entre des campeurs juifs et arabes », dit Abu-Raiya, souriante.
Sunrise propose une session de trois semaines pendant l’été et une autre d’une semaine durant les fêtes de Pessah. Les sites israéliens fonctionnent sous la direction de l’organisation américaine Sunrise Association Camps, qui a été fondée il y a quatre ans et qui propose des camps à New York, Baltimore et Atlanta.
« Pour un grand nombre de campeurs en cours de traitement, c’est la seule interaction sociale à laquelle ils ont accès », explique Zakai.

Les parents d’enfants malades sont souvent dans l’incapacité d’envoyer ces derniers à l’école, leur faible système immunitaire ne leur permettant pas d’accéder à de tels environnements. Mais à Sunrise, chaque détail de chaque programme est étudié de manière à garantir la sécurité des 150 enfants, qui participent au camp sans que cela ne coûte quoi que ce soit aux familles.
Pendant les cours de cuisine – une des activités favorites des campeurs de tous les âges – les enfants portent tous des gants de protection. Tandis que Zakai reconnaît qu’une telle précaution peut être également prise dans les camps d’été en Amérique, elle reste probablement négligée dans d’autres camps d’été en Israël, rendant les jeunes vacanciers plus vulnérables face aux bactéries.
La présence d’un moniteur pour quatre campeurs signifie que rien n’est laissé au hasard. Sunrise est également organisé en coordination étroite avec les hôpitaux variés où les enfants sont traités pendant l’année et un médecin n’est jamais loin.
Mais Zakai note que le personnel infirmier, sur le site, est souvent plus sollicité par les frères et soeurs des malades du cancer que par ces derniers. « Ils viennent parfois à l’infirmerie avec une petite coupure ou un bleu parce qu’ils veulent eux aussi avoir le sentiment qu’on s’occupe d’eux », dit la directrice en souriant.

De plus, Zakai déclare que la majorité des animateurs ignorent qui est le « frère ou la soeur malade » et celui ou celle qui est « en bonne santé ».
Même s’ils sont formés à se montrer attentifs envers les besoins particuliers des enfants malades, les campeurs sont tous traités de la même façon, indépendamment de leurs antécédents médicaux.
Sunrise n’est pas un « camp de cancer » même s’il accueille les petits cancéreux, explique la directrice.
Tandis que le sujet n’est jamais abordé par les animateurs, dont l’objectif primaire est d’offrir aux campeurs une expérience aussi typique que possible, Svirsky affirme en entendre parler occasionnellement par les campeurs eux-mêmes.
« Ils en parlent de la manière la plus simple et la plus franche, avec un ami qui demande à un autre : ‘A quel hôpital tu as été ?… Oh, moi aussi, j’y suis allé !’, » indique le moniteur.
Mais parfois, la réalité de la maladie a un impact plus remarquable sur le camp Sunrise.

Zakai explique qu’alors que 170 enfants sont inscrits aux camps de Beit Yehoshua, près de 130 y participent chaque jour. Parce que, en partie, certains sont des frères ou des soeurs en bonne santé qui ont des engagements par ailleurs mais aussi parce que d’autres sont eux-mêmes malades et suivent leur traitement ou se trouvent en convalescence.
Mais le camp s’adapte.
Chaque activité commence et se termine le même jour. Alors qu’on lui demande si les enfants ont mis en place un spectacle – une tradition des camps d’été juifs – Zakai répond que le personnel évite de tels programmes dans la mesure où ils exigent la présence constante des campeurs.
C’est l’attention portée à de tels détails qui permet à ces derniers d’avoir le sentiment que leur expérience est aussi typique et enrichissante que toutes les autres.
Maoz, par exemple, a huit ans. C’est un survivant d’un cancer du cerveau qui a subi plus de dix interventions chirurgicales à la tête pendant sa courte vie.
Son surnom, à Sunrise, c’est « Balagani » — un jeu de mot basé sur le mot hébreu qui désigne la pagaille qu’il, se vante-t-il, est enclin à semer.
Et tandis que dans certains camps, cet élément pourrait être une source d’inquiétude, c’est au contraire une victoire quotidienne à Sunrise – laisser un enfant être un enfant. Tout simplement.
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