Les États-Unis ont bloqué une tentative de la Chine de condamner Israël à l’ONU
L’administration Biden est à nouveau venue en aide à Israël à l’ONU, craignant que la condamnation n'établisse une équivalence entre Israël et le Jihad islamique Palestinien
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Les États-Unis ont bloqué, mercredi, une initiative de la Chine, au cours d’une session d’urgence du Conseil des sécurité des Nations unies consacrée au conflit à Gaza, visant à émettre un communiqué de presse exprimant l’inquiétude du Conseil face à la flambée de violences entre Israël et les organisations terroristes de l’enclave, a fait savoir un haut-responsable israélien au Times of Israel.
La Chine a plaidé sa cause, à la recherche de soutiens pour ce communiqué, qui aurait condamné à la fois les tirs de roquettes de Gaza contre des civils israéliens et les frappes aériennes israéliennes à Gaza qui ont commencé mardi matin, dans le cadre de l’opération Bouclier et Flèche, contre les terroristes du Jihad islamique palestinien, a ajouté le haut responsable.
La Chine souhaitait que cette déclaration conjointe – d’une portée symbolique bien moindre que celle d’une résolution contraignante mais qui requiert l’unanimité des 15 membres du Conseil de Sécurité – soit publiée à l’issue d’une réunion d’urgence, convoquée par elle mercredi, pour évoquer les violences entre Israéliens et Palestiniens.
Pékin avait obtenu le soutien de la Russie, de la France et des Émirats arabes unis, qui avaient également demandé la réunion à huis clos de mercredi, mais les États-Unis ont fait savoir qu’ils n’apporteraient pas le leur, condamnant de facto le projet.
Israël est intervenu auprès des États-Unis afin qu’ils s’opposent à cette initiative, qui met sur le même plan l’armée israélienne et le Jihad islamique palestinien, a-t-il ajouté.
L’ambassadeur d’Israël à l’ONU, Gilad Erdan, a déclaré jeudi sur l’antenne de la radio militaire avoir « réussi à bloquer cette tentative de condamnation d’Israël avec l’aide des États-Unis, avec lesquels nous avons travaillé ».
« Les États-Unis, ainsi que le Royaume-Uni, nous ont fait savoir qu’ils n’autoriseraient pas cette déclaration », a-t-il ajouté.
L’administration Biden a toujours pris la défense d’Israël au Conseil de sécurité, l’empêchant à de nombreuses reprises -et notamment plusieurs fois pendant la guerre de Gaza de mai 2021 – d’adopter des déclarations ou des résolutions liées aux crises israélo-palestiniennes.
Washington a fait valoir que l’ONU n’était pas l’institution appropriée pour juger le conflit.
Exceptionnellement, en février dernier, les États-Unis ont aidé le Conseil de sécurité à adopter une déclaration commune condamnant la décision du gouvernement israélien de légaliser neuf avant-postes en Cisjordanie et d’autoriser la construction de près de 10 000 logements au sein d’implantations. Pour autant, les États-Unis ont ensuite empêché le Conseil d’adopter une résolution contraignante contre Israël.
Comme lors des précédentes vagues de violence entre Israël et les organisations terroristes actives à Gaza, l’administration Biden a œuvré avec discrétion de manière à faire revenir le calme.
Lors de la guerre de 11 jours, en mai 2021, les premières déclarations de l’administration Biden se sont limitées à rappeler le soutien des Etats-Unis au droit d’Israël à se défendre, justifiant la poursuite des frappes israéliennes à Gaza. Ce n’est qu’au bout de quelques jours que les déclarations américaines ont clairement appelé au retour au calme et à un cessez-le-feu.
Mais cette fois-ci, l’argument est avancé après une seule journée de combat.
Dans le compte-rendu fait par la Maison Blanche de la conversation téléphonique entre le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, et son homologue israélien, Tzachi Hanegbi, le premier « a réaffirmé le soutien indéfectible de l’administration [Biden] à la sécurité d’Israël, ainsi que son droit à défendre son peuple contre les tirs aveugles de roquettes. »
« Sullivan a également souligné la poursuite des efforts régionaux pour négocier un cessez-le-feu et rappelé la nécessité de désamorcer les tensions et d’empêcher de nouvelles pertes en vies humaines », indique le communiqué.
L’ambassadeur américain en Israël, Tom Nides, s’en est fait l’écho, jeudi, se disant sur Twitter « préoccupé par les tirs de roquettes sans relâche, aujourd’hui. Nous défendons le droit d’Israël à se défendre. Il faut une désescalade rapide. »
Mercredi, c’était la quatrième fois que le Conseil de sécurité convoquait une session d’urgence pour évoquer l’escalade du conflit israélo-palestinien depuis la mise en place du gouvernement radical du Premier ministre Benjamin Netanyahu, le 29 décembre dernier. Durant cette même période, le Conseil a tenu quatre de ses réunions mensuelles obligatoires sur le conflit, ce qui, selon Jérusalem et Washington, démontre l’attention disproportionnée du Conseil sur Israël.
Compte tenu de la décision américaine de faire barrage à la publication d’une déclaration commune, les membres du Conseil de sécurité présents mercredi ont été informés de la situation à Gaza par la voix de l’envoyé de l’ONU au Moyen-Orient, Tor Wennesland, avant que les ambassadeurs n’expriment la position de leurs autorités sur les violences. Ils ont été unanimes dans leur appel à l’apaisement, et la plupart se sont montrés très critiques envers les victimes civiles causées par les frappes aériennes israéliennes sur les membres du Jihad Islamique Palestinien, a confié au Times of Israel le diplomate de l’un des pays présents à la réunion.
Mercredi toujours, le Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres, a publié une déclaration exprimant sa « profonde préoccupation » face aux événements à Gaza.
« Le Secrétaire Général condamne les pertes humaines civiles, notamment les enfants et les femmes, qu’il considère inacceptables et doivent cesser immédiatement », a déclaré António Guterres dans un communiqué. « Israël doit respecter les obligations qui lui incombent en vertu du droit international humanitaire, notamment en faisant un usage proportionné de la force et en prenant toutes les précautions pour épargner les civils et les biens de caractère civil dans la conduite des opérations militaires. »
« Le Secrétaire Général condamne par ailleurs les tirs aveugles de roquettes sur Israël depuis Gaza, effectués en violation du droit international humanitaire et au mépris de la sécurité des civils palestiniens et israéliens », a ajouté le communiqué, appelant les parties en présence à « faire preuve de la plus grande retenue et faire en sorte d’arrêter les hostilités immédiatement ».
Jeudi, le Bureau des droits de l’homme de l’ONU a publié sa propre déclaration disant son « inquiétude » face aux combats à Gaza.
« Nous sommes préoccupés par la question de savoir si Tsahal prend assez de précautions pour éviter, et à tout le moins pour minimiser, les pertes humaines civiles, les blessures de civils et les dommages occasionnés à des biens civils », indique le communiqué, qui condamne par ailleurs les tirs de roquettes palestiniens « aveugles » sur Israël.
L’opération Bouclier et Flèche a commencé par des frappes aériennes quasi simultanées de Tsahal, qui ont eu pour effet de tuer trois des plus hauts commandants du Jihad Islamique Palestinien, en représailles au lancement par l’organisation terroriste d’une centaine de roquettes sur Israël, la semaine passée. Dix civils palestiniens ont été tués par les frappes menés mardi, parmi lesquels quatre enfants.
Le Jihad islamique a depuis tiré plus de 800 roquettes sur Israël, dont l’une roquette s’est abattue, jeudi, sur un immeuble de Rehovot, où elle a tué un homme et fait cinq blessés.
En représailles, Tsahal a frappé pas moins de 191 cibles du Jihad Islamique Palestinien dans la bande de Gaza, en faisant en sorte d’éviter les sites du Hamas, au pouvoir à Gaza, qui, selon l’armée, s’est jusqu’à présent abstenu de se joindre activement aux combats.
Le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, a déclaré jeudi soir que le nombre des victimes des derniers combats s’élevait à 29, dont une bonne moitié de civils.
Israël affirme que certains civils ont trouvé la mort suite à des tirs de roquettes palestiniennes ratés.
On estime à 93 le nombre de personnes blessées lors de ces trois derniers jours de combats, a ajouté le ministère, bien que ces chiffres ne fassent pas de distinction entre les victimes des frappes aériennes israéliennes et celles des tirs ratés du Jihad islamique Palestinien.