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Analyse

Les frappes contre l’Iran marquent le pari le plus important et le plus risqué de Trump

Les analystes mettent en garde contre un conflit prolongé si Téhéran riposte ; les frappes américaines pourraient renforcer la détermination de l'Iran à développer son programme nucléaire

Le président américain Donald Trump s'exprimant depuis la Maison Blanche à Washington, le 21 juin 2025, après que l'armée américaine a frappé trois sites nucléaires et militaires iraniens, se joignant directement à l'effort d'Israël pour décapiter le programme nucléaire du pays, en présence du vice-président JD Vance, du secrétaire d'État Marco Rubio et du secrétaire à la Défense Pete Hegseth. (Crédit : Carlos Barria/Pool via AP)
Le président américain Donald Trump s'exprimant depuis la Maison Blanche à Washington, le 21 juin 2025, après que l'armée américaine a frappé trois sites nucléaires et militaires iraniens, se joignant directement à l'effort d'Israël pour décapiter le programme nucléaire du pays, en présence du vice-président JD Vance, du secrétaire d'État Marco Rubio et du secrétaire à la Défense Pete Hegseth. (Crédit : Carlos Barria/Pool via AP)

Avec sa décision sans précédent de bombarder les sites nucléaires iraniens dans la nuit de samedi à dimanche, rejoignant ainsi directement l’attaque aérienne israélienne, le président américain Donald Trump a fait ce qu’il s’était depuis longtemps engagé à éviter de faire : intervenir militairement dans une guerre étrangère majeure.

La frappe spectaculaire des États-Unis contre trois sites nucléaires, dont l’installation nucléaire la plus fortifiée d’Iran, située profondément sous la terre, marque le plus grand pari en matière de politique étrangère de Trump depuis son arrivée à la présidence, un pari lourd de risques et d’inconnues.

Samedi, Trump a insisté sur le fait que l’Iran devait désormais faire la paix ou faire face à de nouvelles attaques. Ce qui peut provoquer des représailles de la part de Téhéran, qui est notamment en capacité de fermer le détroit d’Ormuz, l’artère pétrolière la plus importante au monde, d’attaquer des bases militaires américaines et des alliés au Moyen-Orient, d’intensifier ses tirs de missiles sur Israël et d’activer des groupes terroristes hostiles aux intérêts américains et israéliens dans le monde entier, ont déclaré des analystes.

Avec le risque de déclencher un conflit plus large et plus long que celui envisagé par Trump, un conflit qui rappellerait les « guerres éternelles » menées par les États-Unis en Irak et en Afghanistan, qu’il avait qualifiées de « stupides » et qu’il avait promis de ne jamais mener.

« Les Iraniens sont sérieusement affaiblis et leurs capacités militaires sont dégradées », note Aaron David Miller, ancien négociateur pour le Moyen-Orient sous des administrations démocrate et républicaine.

« Mais ils disposent de toutes sortes de moyens asymétriques pour riposter… Cela ne va pas se terminer rapidement. »

L’usine d’enrichissement de Fordo, en Iran, le 24 janvier 2025. (Crédit : Maxar Technologies via AP)

Avant d’annoncer samedi soir les frappes aériennes, Trump avait hésité entre menaces militaires et appels à la reprise des négociations afin de persuader l’Iran de conclure un accord visant à démanteler son programme nucléaire.

Un haut responsable de la Maison Blanche déclare qu’une fois qu’il a été convaincu que Téhéran n’avait aucun intérêt à conclure un accord sur le nucléaire, Trump a décidé que les frappes étaient « la bonne chose à faire ».

Trump a donné son feu vert après avoir obtenu l’assurance d’une « forte probabilité de succès », indique le responsable – une conclusion à laquelle le président américain est parvenu après plus d’une semaine d’attaques aériennes israéliennes contre des installations nucléaires et militaires iraniennes, des frappes qui ont ouvert la voie à un coup potentiellement décisif de la part des États-Unis.

La menace nucléaire demeure

Trump a vanté le « grand succès » des frappes, qui, selon lui, ont notamment consisté à utiliser des « bombes antibunker » sur le site principal de Fordo. Cependant, certains experts suggèrent que même si le programme nucléaire iranien a peut-être été retardé de plusieurs années, le risque est encore loin d’être écarté.

L’Iran nie chercher à se doter de l’arme nucléaire, affirmant que son programme est purement pacifique, mais le pays enrichit de l’uranium à des niveaux bien supérieurs à ceux nécessaires à des fins civiles.

Israël affirme que ses frappes devaient avoir lieu pour empêcher l’Iran, qui prône ouvertement la destruction de l’État juif, d’accéder à la capacité nucléaire. Elles ont également visé des scientifiques nucléaires et des chefs militaires du Corps des Gardiens de la Révolution islamique (CGRI), le bras armé du régime iranien, ainsi que son arsenal massif de missiles balistiques.

« À long terme, une action militaire risque de pousser l’Iran à conclure que les armes nucléaires sont nécessaires à sa dissuasion et que Washington n’est pas intéressé par la diplomatie », explique dans un communiqué l’Arms Control Association, une organisation américaine non partisane qui milite en faveur d’une législation sur le contrôle des armes.

« Les frappes militaires ne peuvent à elles seules détruire les vastes connaissances nucléaires de l’Iran ».

« Ces frappes feront reculer le programme iranien, mais au prix d’une détermination renforcée de Téhéran à reconstituer ses activités nucléaires sensibles », estime Arms Control Association.

Eric Lob, professeur adjoint au département de politique et de relations internationales de l’université internationale de Floride, dit que les prochaines initiatives, de la part de Téhéran, restent une question ouverte. Il laisse entendre que parmi différentes formes de représailles, il pourrait s’agir de frapper des « cibles faciles » des États-Unis et d’Israël, à l’intérieur comme à l’extérieur de la région.

Il ajoute toutefois qu’il est possible que l’Iran revienne à la table des négociations – « même si ce serait dans une position encore plus faible » – ou que le pays cherche une issue diplomatique.

Au lendemain des frappes américaines, l’Iran ne semble toutefois guère disposé à faire des concessions.

L’Organisation iranienne de l’énergie atomique a déclaré qu’elle ne permettrait pas que le développement de son « industrie nationale » soit stoppé, et un commentateur de la télévision d’État iranienne a déclaré que tous les citoyens américains ou militaires présents dans la région seraient désormais des cibles légitimes.

Tôt dimanche matin, le ministère iranien des Affaires étrangères a publié une déclaration dans laquelle Téhéran « affirme qu’il est en droit de résister avec toute la force nécessaire à l’agression militaire américaine ».

Karim Sadjadpour, analyste au Carnegie Endowment for International Peace, a écrit sur le réseau social X : « Trump a indiqué que le moment était venu pour faire la paix. Il n’est pas certain que les Iraniens partagent cet avis. Cela pourrait davantage ouvrir un nouveau chapitre de la guerre entre les États-Unis et l’Iran, qui dure depuis 46 ans, que mettre un terme au conflit. »

« Changement de régime »

Certains analystes ont suggéré que Trump, dont l’administration avait auparavant rejeté toute intention de renverser le gouvernement iranien, pourrait être poussé à rechercher un « changement de régime » si Téhéran menait des représailles importantes ou prenait des mesures pour se doter de l’arme nucléaire.

Cela entraînerait alors des risques supplémentaires.

« Il faut se méfier de la dérive des objectifs, qui visent à renverser le régime et à instaurer la démocratie », explique Laura Blumenfeld, analyste spécialiste du Moyen-Orient à la Johns Hopkins School for Advanced International Studies à Washington. « Les sables du Moyen-Orient recèlent les vestiges de nombreuses missions morales américaines qui ont échoué. »

Une femme marchant devant une fresque anti-américaine près de l’ancienne ambassade américaine, à Téhéran, le 11 mai 2025. (Crédit : Atta Kenare/AFP)

Jonathan Panikoff, ancien responsable adjoint des services de renseignement américains pour le Moyen-Orient, indique que les dirigeants iraniens pourraient rapidement se livrer à des « attaques disproportionnées » s’ils estiment que leur survie était menacée.

Mais Téhéran devra également tenir compte des conséquences, fait-il remarquer. Si des mesures telles que la fermeture du détroit d’Ormuz poseraient des problèmes à Trump en raison de la hausse des prix du pétrole et de l’impact inflationniste potentiel aux États-Unis, elles nuiraient également à la Chine, l’un des rares alliés puissants de l’Iran.

Dans le même temps, Trump est déjà confronté à une forte opposition des démocrates du Congrès contre l’attaque contre l’Iran et il devra également faire face à l’opposition de l’aile anti-interventionniste de sa base républicaine MAGA.

Trump, qui n’avait jamais connu de crise internationale majeure au cours de son premier mandat, se retrouve désormais empêtré dans une crise six mois seulement après le début de son second mandat.

Même s’il espère que l’implication militaire américaine sera limitée dans le temps et dans son ampleur, l’histoire de tels conflits a souvent des conséquences imprévues pour les présidents américains.

Le slogan de Trump, « la paix par la force », sera certainement mis à l’épreuve comme jamais auparavant, surtout après l’ouverture d’un nouveau front militaire et l’échec à tenir ses promesses électorales de mettre rapidement fin aux guerres en Ukraine et à Gaza.

« Trump est de retour dans le business de la guerre », note Richard Gowan, directeur de l’International Crisis Group (ICG).

« Je ne suis pas sûr que quiconque à Moscou, Téhéran ou Pékin ait jamais cru à son discours selon lequel il est un artisan de la paix. Cela a toujours davantage ressemblé à une phrase de campagne qu’à une stratégie. »

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