Les Hébreux noirs de Dimona se mobilisent contre les expulsions
Les 51 personnes ayant reçu des avis d'expulsion sont venues en Israël depuis les États-Unis en tant que touristes et sont restées dans le pays illégalement
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
La communauté des Hébreux noirs de Dimona, dans le sud d’Israël, lance une campagne incluant un grand gala à Tel Aviv le 20 mai, afin de faire échouer les tentatives du ministère de l’Intérieur d’expulser des dizaines de personnes qui cherchent à obtenir un statut légal pour rester en Israël.
Selon l’Autorité de la population et de l’immigration du ministère, 17 lettres ont été envoyées à 51 personnes, dont beaucoup sont des parents célibataires. Les lettres leur ordonnent de quitter le pays dans les 60 jours. Les destinataires ont le droit de faire appel.
La communauté, dont les membres croient être les descendants d’une ancienne tribu israélite, a commencé à arriver en Israël en 1969, à la suite de Ben Carter, un métallurgiste de Chicago qui s’était rebaptisé Ben Ammi Ben Israel et prétendait être le représentant de Dieu sur terre.
Les 51 personnes ayant reçu des avis d’expulsion sont venues en Israël depuis les États-Unis en tant que touristes et sont restées dans le pays illégalement une fois écoulé leur séjour autorisé de trois mois.
Certains sont des adultes nés en Israël, selon Ashriel Moore, qui coordonne la campagne pour l’arrêt des expulsions. Parmi eux, certains ont eux-mêmes des enfants. Ceux qui ne sont pas éligibles à la citoyenneté américaine ou l’ont abandonnée sont apatrides et n’ont nulle part où aller.
Moore a déclaré qu’il ne voyait aucune explication autre qu’une attitude raciste envers les Noirs, notant que les immigrants non-juifs d’Europe de l’Est avec un grand-parent juif ont obtenu la citoyenneté, même si contrairement aux Hébreux noirs, ils n’observent aucune des lois de la Torah. Cependant, le fait que le gouvernement israélien a transporté par avion plusieurs milliers de Juifs éthiopiens dans les années 1980 et 90, et continue de le faire, quoique beaucoup plus lentement, à ce jour, tend à invalider cette thèse.
« Il n’y a aucune autre communauté qui ait tant donné depuis plus d’un demi-siècle et qui soit encore menacée d’expulsion », a déclaré Moore.
La campagne a reçu le soutien de Benny Biton (Likud), maire de Dimona depuis 2013, et de l’un de ses prédécesseurs, Meir Cohen, désormais député Yesh Atid.
En plus d’envisager une action en justice, la communauté, mieux connue comme les Hébreux noirs, prévoit des galas de solidarité pour élargir ce soutien, dont le premier est prévu le 20 mai, sur la place Rabin de Tel Aviv.
D’après son site Internet, la communauté, qui autorise la polygamie, ne souscrit à aucune religion « parce que les religions n’ont fait que diviser les hommes ». Cependant, elle observe le Shabbat et les jours saints juifs mentionnés dans l’Ancien Testament, circoncise ses enfants mâles huit jours après la naissance et oblige les femmes à observer les lois bibliques de purification.
La communauté n’est pas reconnue comme juive par les autorités religieuses d’Israël.
De nombreux membres de la communauté ont obtenu le statut de résidents permanents en 2003. Depuis 2004, ses jeunes servent dans Tsahal. Ceux qui terminent leur service militaire peuvent demander la citoyenneté et la plupart des demandes sont approuvées.
En 2014, Gideon Saar, alors ministre de l’Intérieur, a annoncé que les résidents permanents pouvaient acquérir la citoyenneté s’ils renonçaient à leur nationalité américaine. (Ceux qui effectuent leur service militaire peuvent demander la citoyenneté sans renoncer à leur passeport américain s’ils en ont un.)
Moore, 30 ans, fils de l’un des fondateurs de la communauté et citoyen israélien grâce à son service dans l’armée israélienne, a déclaré que les membres de la communauté paient leurs impôts et sont pleinement intégrés dans les écoles publiques et dans la vie de Dimona en général.
Il a ajouté que les dirigeants communautaires tentent depuis des années d’obtenir un statut légal pour ceux qui n’en ont pas, et soumettent depuis l’époque de Saar la même liste de 64 noms à chaque nouveau ministre de l’Intérieur. Quatre hommes ont occupé ce poste depuis Saar, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu. Le titulaire actuel est Aryeh Deri du parti Shas.
Prince Immanuel , Holy Council of Dimona African Hebrew Israelites
Interview with Prince Immanuel, of the Holy Council of the African Hebrew Israelite community of Dimona, celebrating their Jubilee 50 years in Israel. This interview Prince Immanuel talks about bringing celebrities like Whitney Houston to Israel and all their work in African nations to help "bring light to the world."
Posted by Emily Frances, Host "Holy Land Uncovered" on Monday, October 12, 2020
« Chaque fois [chaque nouveau ministre], on nous a demandé pourquoi nous n’avons pas déjà réglé ce problème ? » dit Moore. « Il y a toujours des histoires – nous ne pouvons pas le faire maintenant, ou nous devons vérifier quelque chose. Parfois, ils ne nous répondent même pas. Peu importe ce que nous faisons. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. »
Il a poursuivi : « Lorsque nous nous sommes entretenus avec l’Autorité de la population et de l’immigration du ministère de l’Intérieur l’année dernière, ils ont dit qu’ils voulaient régler les choses une fois pour toutes, tourner une nouvelle page. »
« Nous avions les 64 noms de la liste de l’époque de Gideon Saar, mais certains ont eu des enfants depuis. Il y en a d’autres dont les parents sont venus en 1969 et ont obtenu le statut israélien, mais l’ont ensuite perdu lorsque la Loi du retour a été modifiée en 1970. Ils nous ont dit de rechercher chaque nom et nous avons composé une liste de 135 noms (qui comprend les 64 de la liste originale).
« Mais au lieu d’obtenir leur statut, ces personnes reçoivent des ordres d’expulsion ! Ils nous ont menti ! »
Un de ces arrêtés d’expulsion indique que le destinataire est arrivé avec un visa touriste valide trois mois il y a 23 ans et est resté illégalement dans le pays lorsque ce visa a expiré, et a ensuite donné naissance à sept enfants entre 1998 et 2013.
Dans un autre cas, une femme ayant la citoyenneté israélienne mais se trouve actuellement aux États-Unis, où elle a donné naissance à un enfant, s’est vu interdire de retourner en Israël avec l’enfant, selon Moore. « Ils l’ont envoyée au consulat israélien, qui a déclaré que l’enfant était automatiquement éligible à la citoyenneté israélienne et que le ministère de l’Intérieur devrait s’en occuper », a-t-il affirmé. « Mais en Israël, ils ne la laissent pas entrer. »
Un troisième cas concerne un père dont la famille est arrivée en Israël en 1969 et qui a la citoyenneté israélienne, a poursuivi Moore. « Mais ils ne refusent pas de donner la citoyenneté à la mère ou aux enfants et veulent les expulser. »
Lorsqu’on lui a demandé d’expliquer le choix du timing, Moore a
déclaré : « Nous leur avons enfin fourni la liste complète des personnes sans citoyenneté ni résidence permanente et nous avons fait pression sur eux pour obtenir une réponse. Il y a un chaos politique en ce moment [Israël a connu quatre élections en deux ans et pourrait être confronté à une cinquième] et ils se sont comportés comme des voleurs dans la nuit. »
Moore a déclaré que la communauté s’était opposée au mouvement Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) et aux tentatives des Nations unies d’assimiler le sionisme au racisme.
« En 2014, pendant l’opération Bordure protectrice (quand Israël est entré en guerre contre Gaza), je me suis personnellement engagé avec StandWithUs », une organisation américaine de défense d’Israël qui travaille en étroite collaboration avec le ministère israélien des Affaires étrangères. « J’ai défendu le gouvernement et expliqué pourquoi la guerre était justifiée. »
Au fil du temps, la communauté a été saluée par toutes sortes de hauts responsables politiques israéliens, parmi lesquels le regretté président Shimon Peres, qui a célébré son 85e anniversaire à Dimona par une visite du Village de la paix de la communauté, et Benjamin Netanyahu, qui a écrit en 2012, « Votre intégration ces dernières années dans l’armée israélienne reflète votre statut en tant que partie intégrante de l’aventure israélienne et de ses institutions. »
Yoel Lipovitzky, qui dirige l’Administration de la population au sein de l’Autorité de la population et de l’immigration, a déclaré au Times of Israel que bien que le séjour illégal de quelqu’un remonte aux années 1990, il n’en demeure pas moins illégal. « Certains d’entre eux ont fait des enfants ici, mais en Israël, la naissance ne confère pas la citoyenneté. »
Il a poursuivi : « L’Amérique n’est pas un pays pauvre comme le Soudan. Nous leur demandons de retourner dans leur pays, l’un des plus développés du monde.
« Nous leur avons dit : ‘Vous nous avez apporté les listes en 2003. Ce processus s’est terminé il y a plus de 17 ans et quiconque ne figurait pas sur cette liste n’a pas droit à la résidence permanente’. »
« Mais à intervalles réguliers, ils viennent nous présenter de nouvelles listes, avec de nouvelles personnes, sorties du néant. Ils nous disent qu’ils ont ‘découvert’ davantage de personnes appartenant à la communauté qui, ‘pour une raison quelconque’, n’ont pas de statut, et nous demandent de vérifier la possibilité de leur en fournir un. Nous avons interrogé 17 familles cette année, pour un total de 51 personnes. S’il y en a d’autres, ils ne se sont pas présentés et nous ne savons pas où ils sont. Nous n’avons pas trouvé de bonne raison de les laisser rester. »
« La loi israélienne est limpide sur qui est légal et qui ne l’est pas. C’est la même chose pour les travailleurs étrangers qui sont ici illégalement. Du point de vue de l’État, sommes-nous censés encourager les personnes qui sont ici illégalement à y faire des enfants et à rester illégalement en Israël ? »