Israël en guerre - Jour 527

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Les Juifs de Diaspora peuvent-ils se rendre en Israël actuellement ?

Après que les non-Israéliens se sont vu interdire l'entrée pendant des mois, les restrictions s'assouplissent, mais ils doivent toujours affronter une lourde bureaucratie

Des agents de bord d'Israir, vêtus d'un équipement de protection complet, à l'embarquement d'un vol entre Tel Aviv et Eilat, le 17 août 2020. (Olivier Fitoussi / Flash90)
Des agents de bord d'Israir, vêtus d'un équipement de protection complet, à l'embarquement d'un vol entre Tel Aviv et Eilat, le 17 août 2020. (Olivier Fitoussi / Flash90)

JTA – Comme beaucoup de Juifs français, Agnès Mimoun prenait sa capacité de voyager librement en Israël pour acquise. Il lui suffisait de réserver un billet en ligne et de prendre un taxi pour l’aéroport Charles de Gaulle pour un vol de 4h30 à destination de Tel Aviv.

Mais depuis un mois, cette mère de trois enfants de l’importante communauté juive de la banlieue parisienne de Sarcelles tente désespérément de convaincre l’ambassade d’Israël à Paris* de la laisser entrer dans le pays afin d’assister au mariage de son fils prévu le mois prochain.

« Ils ne répondent ni par téléphone ni par courrier », se plaint Mimoun. « Sur leur site internet, il est possible de prendre rendez-vous, mais ce n’est qu’en octobre. J’ai l’impression d’essayer de sortir d’Égypte. C’est très stressant de ne pas savoir si je pourrai être là. »

Le cas de Mimoun est loin d’être unique.

En mars, alors que les cas de COVID-19 s’accumulent, Israël a fermé ses portes aux non-citoyens, interdisant de fait l’État juif à la moitié des Juifs du monde pendant l’une des pires crises de santé publique depuis des décennies.

Les Juifs du monde entier étaient déçus. Une importante personnalité médiatique juive française a qualifié l’interdiction de « problème existentiel » dans une interview accordée en avril à Haaretz, affirmant qu’il était sans précédent pour les Israéliens d’interdire les visiteurs afin de se protéger des autres Juifs.

Ces derniers mois, le pays tente d’assouplir certaines restrictions tout en en préservant d’autres, créant un patchwork de politiques qui ont laissé les Juifs du monde entier confus quant à savoir s’ils peuvent visiter Israël et les conditions à remplir pour y arriver.

Une hôtesse de l’air d’Israir Airlines portant un équipement de protection intégrale (EPI) se prépare pour le décollage de l’aéroport international Ben Gurion près de Tel Aviv vers la ville de villégiature d’Eilat, au sud, pendant la pandémie de la COVID-19, le 16 juin 2020. (GIL COHEN-MAGEN / AFP)

Plusieurs cas très médiatisés ont attiré l’attention sur les difficultés des restrictions actuelles. Dans un de ces cas, rapporté d’abord par Reuters, il a fallu des mois à une fillette israélienne de 3 ans, qui était allée rendre visite à sa grand-mère en Ukraine, pour pouvoir rentrer chez elle, parce que sa grand-mère ne pouvait pas l’escorter selon les règles établies par Israël. Dans un autre, les citoyens indiens qui étudient et travaillent en Israël n’ont pas pu retourner au travail et à leurs études en raison de l’interdiction d’entrée des non-citoyens.

Un nombre restreint mais significatif de couples – ceux dont un membre n’est pas israélien, dont les mariages interconfessionnels ou homosexuels ne sont pas reconnus par les autorités rabbiniques israéliennes – ont également été séparés par les restrictions de voyage.

« C’est vraiment un scandale », a déclaré le mois dernier un avocat israélien des droits de l’homme à propos des séparations.

Au fur et à mesure que la réponse israélienne au coronavirus évoluait, le gouvernement a pris des mesures concernant le regroupement familial. Le 13 juillet, l’Autorité de la Population et de l’Immigration a annoncé que des catégories limitées de non-citoyens, principalement des membres de la famille nucléaire, seraient autorisées à entrer dans le pays pour des événements tels que des naissances et des mariages.

Mais naviguer au milieu de la bureaucratie israélienne est difficile, même en temps normal. Avec le pays en crise, beaucoup jugent les nouvelles réglementations extrêmement frustrantes et difficiles.

Toute personne venant pour un événement familial doit remplir un formulaire en ligne, fournir une copie de son passeport et de son billet, et souscrire à une assurance médicale spéciale qui les couvriraient s’ils contractaient la COVID-19 en Israël. Ils doivent également prouver une relation familiale, soumettre les copies des cartes d’identité israélienne des personnes qu’ils viennent visiter, et fournir l’adresse où ils seront en quarantaine pendant deux semaines à leur arrivée.

Les grands-parents qui viennent rencontrer de nouveaux petits-enfants doivent obtenir une note du médecin indiquant la date prévue d’accouchement. Les personnes voyageant pour célébrer un bar ou une bat mitzvah doivent présenter une invitation. Les Israéliens qui souhaitent faire venir leurs conjoints de l’étranger doivent soumettre des documents au ministère de l’Intérieur – et fournir une copie de leur ketouba, ou contrat de mariage juif, que tout le monde n’a pas.

Une Juive française a déclaré à la JTA avoir passé un mois entier à demander une autorisation afin de pouvoir rendre visite à sa fille enceinte en Israël, mais qu’elle s’était heurtée à de multiples obstacles.

« Ils me disent toujours qu’il manque quelque chose », a déclaré la femme à propos des fonctionnaires du consulat israélien. Elle a demandé à être identifiée uniquement sous le nom de Joelle afin de ne pas compromettre ses efforts.

« J’ai soumis tous les documents au moins cinq fois », a-t-elle ajouté.
« C’est très frustrant. Je ne demande pas à venir en vacances pour bronzer sur la plage. Ma fille va bientôt accoucher. »

Israël continue d’autoriser de nouveaux immigrants dans le pays grâce à un processus qui comprend désormais une période de quarantaine. (La plupart des nouveaux immigrants qui sont arrivés ont commencé le processus avant la pandémie, bien qu’un groupe qui aide les Juifs d’Amérique du Nord à faire le pas indique que les demandes ont atteint des niveaux records ces derniers mois. Les demandes des Juifs français ont triplé cette année, selon un rapport de l’AFP.)

La ministre de l’Immigration, Pnina Tamano-Shata (à droite), accueille les nouveaux immigrants de France à l’aéroport Ben Gurion, le 3 août 2020. (Olivier Fitoussi/International Fellowship of Christians and Jews)

Fatiguée d’essayer d’obtenir un permis de visite, Joelle a envisagé de demander la citoyenneté israélienne afin d’arriver à temps pour la naissance de son petit-enfant. Elle n’en est pas arrivée là : après des semaines à se démener avec des documents et des bureaucrates, elle a réussi à naviguer dans les nouvelles règles et est maintenant en quarantaine en Israël.

Le processus pourrait bientôt devenir plus facile pour les grands-parents de bébés nés en Israël depuis le 1er mars. Michal Cotler-Wunsh, membre de la Knesset, a publié mardi un message vidéo sur Facebook annonçant un nouveau processus pour la venue les grands-parents dans le pays.

« Après que des centaines d’entre vous ont contacté mon bureau, et après des semaines de travail acharné, je suis très heureuse d’annoncer que vos parents pourront maintenant venir rencontrer vos nouveaux-nés, et vous pourrez dorénavant obtenir l’amour et le soutien que vous méritez ! » a déclaré Cotler-Wunsh dans un message adressé aux immigrants. Les demandes doivent être déposées avant le 18 septembre, a-t-elle déclaré.

Mais alors même que les législateurs proposent des solutions au cas par cas, une autre législation exacerbe les tensions autour des restrictions de voyage pendant la pandémie en Israël.

En juin, le gouvernement a annoncé que certains étudiants étrangers – principalement des étudiants diplômés impliqués dans des projets de recherche – pourraient commencer à revenir. Après quelques hésitations, le gouvernement a également inclus des étudiants venus étudier dans les yeshivot et les séminaires du pays, aujourd’hui un rite de passage pour la communauté orthodoxe américaine.

Aujourd’hui, plus de 17 000 étudiants étrangers affluent dans le pays, alors même que d’autres juifs à l’étranger ne peuvent pas y entrer. Le Dr Ronni Gamzu, un médecin de premier plan nommé fin juillet à la tête de la réponse au coronavirus d’Israël, a exprimé sa préoccupation, mais a déclaré que la décision avait précédé sa nomination. Il affirme que des inspecteurs seront déployés pour s’assurer que les étudiants respectent les réglementations en matière de santé publique, notamment en étudiant uniquement par petits groupes.

Le ministre de l’Intérieur Aryeh Deri a défendu la décision d’autoriser les étudiants des yeshivot, qualifiant Israël de « foyer national de tous les juifs du monde » et le comparant à une mère qui ne peut rejeter ses enfants.

Pourtant, les parents des élèves de yeshiva ne seront pas autorisés venir selon les lois actuelles d’Israël. Même les parents ravis que la pandémie n’ait pas déraillé le projet de leurs enfants d’étudier en Israël, sont déconcertés par ces restrictions de voyage.

« Je suis tellement contente qu’elle y aille », a déclaré Rina Greenwald de Cedarhurst, New York, dont la fille Eliana prévoit de passer sa deuxième année dans un séminaire israélien. « Elle va mûrir comme être humain et dans son amour d’Israël. »

Mais alors qu’elle était heureuse que sa fille puisse rentrer, Greenwald a également déclaré qu’elle trouvait troublant que les voyages en Israël – y compris le sien – soient toujours limités.

« C’est un peu effrayant », a-t-elle déclaré. « Vous voulez être certain qu’Israël sera toujours là pour vous. »


*Dans un droit de réponse du 24 août, l’ambassade d’Israël en France, par l’intermédiaire de son porte-parole, a souhaité apporter les précisions suivantes :

« Depuis le début de la pandémie du Covid 19, tous les Etats du monde ont pris des mesures de protection qui incluent la fermeture des frontières nationales et le renforcement des contrôles sanitaires à l’entrée sur leur territoire.

« Israël n’a pas dérogé à cette pratique, imposant également la fermeture des frontières tout en mettant en place un large éventail de mesures dérogatoires (naissances, bar et bat mitsva, mariages, deuils, situations médicales d’urgence, regroupement familial, étudiants en yeshiva ou en institutions académiques etc…) qui permettent de répondre à des demandes particulières.

« Le consulat d’Israël à Paris travaille d’arrache-pied depuis le début de la crise sanitaire pour tenter d’accompagner les procédures de dérogations qui sont accordées par les autorités compétentes en Israël et non pas par le consulat lui-même.

« Une mise à jour permanente des directives est effectuée sur le site du consulat et sur les réseaux sociaux pour permettre la meilleure information aux demandeurs d’autorisation dérogatoire d’entrée sur le territoire israélien.

« L’équipe du consulat est dévouée, consciente des difficultés imposées par cette situation d’urgence. Elle accompagne chaque cas avec empathie et efficacité.

« Les dirigeants communautaires en sont conscients eux qui interviennent régulièrement pour s’enquérir de tel ou tel dossier en instance. C’est sans doute ce qui a motivé le Grand rabbin de France Haïm Korsia à adresser le 30 juin dernier une lettre personnelle au nouveau ministre des Affaires étrangères israélien Gaby Ashkénazi pour lui exprimer sa gratitude et en son nom et celui de la communauté juive, pour le travail inlassable du consulat d’Israël à Paris pour soutenir les membres de la communauté soulignant le dévouement du Consul et des membres de son équipe.

« Les procédures et les modalités sont en effet contraignantes mais elles permettent lorsqu’elles sont respectées de finaliser positivement des milliers de demandes particulières dans le cadre du respect des règles édictées souverainement par les autorités israéliennes.

« Nous vivons une situation d’urgence. Alors que la plupart des pays ont purement et simplement fermé leurs frontières, Israël a choisi lui une voie médiane, conscient du lien humain très fort qui l’unit aux communautés de la diaspora. C’est pourquoi il convient de rendre hommage aux efforts quotidiens des fonctionnaires israéliens à Paris et ailleurs qui œuvrent à ce que ce lien soit préservé malgré l’épreuve que nous traversons. »

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