Les organisateurs de l’Eurovision réprimandent un chanteur portant un keffieh
L'UER a dit son "regret" que le chanteur suédo-palestinien Eric Saade ait enfreint les "règles apolitiques" du concours ; La candidate luxembourgeoise d'origine israélienne en finale
Le concours de l’Eurovision qui se déroule cette année à Malmö, en Suède, a officiellement débuté mardi soir avec la première demi-finale retransmise en direct. Elle s’est, pour l’essentiel, déroulée sans accroc si l’on excepte un chanteur de première partie, réprimandé par les organisateurs pour ses prises de positions politiques.
Eric Saade – chanteur suédois et lui-même ex-candidat à l’Eurovision, invité, avec d’autres, à se produire en première partie du spectacle mardi – est monté sur scène avec au poignet un keffieh, symbole palestinien souvent utilisé lors des manifestations pro-palestiniennes et anti-israéliennes.
Saade, dont le père est palestinien, s’était insurgé contre les organisateurs de l’Eurovision, la semaine dernière, suite à l’interdiction des drapeaux et symboles représentant des nations ne participant pas au concours, Palestiniens y compris – une règle en vigueur depuis maintenant des années. Il a écrit sur les réseaux sociaux que c’était une « honte » pour l’Union européenne de radio-télévision (UER), qu’il a par ailleurs accusée de diffuser de la « propagande israélienne ».
En réponse à une demande de commentaires du Times of Israel, l’UER a rappelé que le spectacle avait lieu en direct et que « tous les artistes étaient informés des règles du concours », ajoutant : « Nous regrettons qu’Eric Saade ait choisi de compromettre la nature apolitique de l’événement. »
Saade ne portait pas le keffieh lors des répétitions du spectacle. Dans la mesure où il n’est pas candidat au concours de cette année, on ignore à ce stade s’il est passible de mesures pour infraction aux règlements de l’Eurovision.
Sur ses réseaux sociaux officiels, l’Eurovision a publié des extraits des deux autres premières parties – Eleni Foureira et Chanel – mais pas de Saade.
Les organisateurs de l’Eurovision sont en état d’alerte en raison des risques de perturbations et manifestations, cette semaine. La compétition est aujourd’hui éclipsée par le conflit politique, d’importants rassemblements étant attendus à Malmö contre le principe de la participation d’Israël. La ville a sensiblement renforcé ses effectifs policiers, en faisant venir des renforts du Danemark et de Norvège, et a même vidé les cellules de ses prisons en prévision d’arrestations en nombre.
Le gros des manifestations est à craindre ce jeudi, lorsque l’Israélienne Eden Golan participera à la deuxième demi-finale avec sa chanson « Hurricane ». La police a indiqué qu’aucune manifestation ne serait autorisée à proximité de la salle de spectacle.
Golan est, depuis son arrivée, confinée dans sa chambre d’hôtel, avec un important dispositif de sécurité suite à la réception de plusieurs menaces contre la délégation. De manière pour le moins inhabituelle, le chef du Shin Bet s’est même rendu à Malmö, la semaine dernière, pour s’assurer des mesures de sécurité avant l’événement.
Au terme de la demi-finale de ce mardi, 10 nations se sont qualifiées pour la finale qui aura lieu samedi. C’est notamment le cas de la chanteuse d’origine israélienne représentant le Luxembourg, Tali Golergant, connue sous son nom de scène Tali.
Le Luxembourg est revenu à la compétition cette année après 31 ans d’absence avec la chanson en français et en anglais « Fighter ». Née en Israël et élevée au Chili, en Argentine et au Luxembourg, Tali confiait au Times of Israel, le mois dernier, faire face à une campagne de haine en ligne en raison de ses origines, mais ne pas se laisser affecter par cela.
Les autres pays qualifiés mardi sont l’Irlande, la Croatie, Chypre, l’Ukraine, la Lituanie, la Finlande, la Serbie, le Portugal et la Slovénie.
Lors d’une conférence de presse d’après-compétition, la candidate irlandaise Bambie Thug a déclaré aux journalistes avoir dû retirer un message subliminal appelant à un cessez-le-feu à Gaza après une plainte des organisateurs. Un journaliste suédois a interrogé la chanteuse sur la signification des mots écrits sur son visage et ses jambes en ogham, une ancienne langue irlandaise, qui veulent en fait dire : « Cessez-le-feu » et « liberté pour la Palestine ».
L’artiste a expliqué avoir voulu envoyer ce message parce que « je suis pour la justice et la paix », mais que « malheureusement, j’ai dû le retirer… à la demande de l’UER. »
Vingt-six nations s’affronteront lors de la finale de samedi soir. Les paris sont ouverts et la cote de la Croatie, qui n’a jamais remporté la compétition à ce jour, est au plus haut. Israël a gagné à quatre reprises, la dernière, en 2018.