L’héritage de Maïmonide, rabbin, médecin et penseur du XIIe siècle, exposé à New York
"Le chemin d'or : Maïmonide à travers huit siècles", une exposition de la Yeshiva University, montre l'impact considérable de l'un des Sages les plus prolifiques du Moyen Âge

NEW YORK – En 1784, trois ans après la révolution américaine, le cantor new-yorkais Hendla Jochanan van Oettingen avait composé une prière au profit du général George Washington et du gouverneur DeWitt Clinton. Cette prière aurait pu, semble-t-il, se perdre dans l’Histoire si van Oettingen n’avait pas su relier les 13 principes de foi de Maïmonide à la liberté retrouvée des 13 États d’origine.
Ce parchemin est aujourd’hui exposé dans l’exposition « Le chemin d’or : Maïmonide à travers huit siècles », une nouvelle exposition du musée de la Yeshiva University au Centre d’histoire juive. À l’instar des nombreux manuscrits et objets exposés – certains pour la première fois – la prière illustre l’impact et l’influence considérables de l’un des érudits de la Torah les plus prolifiques du Moyen Âge.
Né en 1138 à Cordoue, dans l’actuelle Espagne, Moïse ben Maïmon, ou Maïmonide, était un rabbin, un médecin et un philosophe séfarade. Après l’exil forcé des Juifs de Cordoue en 1148, il avait travaillé et vécu au Maroc et en Égypte, où il avait été le médecin personnel du sultan Saladin. En matière d’érudition juive, de philosophie et de science, Maïmonide était un avant-gardiste. C’est pourquoi – bien que vénérés par beaucoup – ses travaux philosophiques avaient été considérés comme hérétiques par certains rabbins et interdits jusqu’au 19e siècle.
« Il est fascinant de voir la multiplicité de Maïmonide. Il était si prolifique et expansif que chacun peut se reconnaître dans son œuvre », déclare David Sclar, commissaire invité de l’exposition.
En parcourant les trois sections de l’exposition, « Luminaire », « Éclat » et « Prisme », il devient évident que Maïmonide est à la fois un miroir et un objectif pour les générations qui ont suivi sa mort en Égypte en 1204.
« C’était un véritable polymathe. Les gens peuvent relever l’aspect de lui auquel ils s’identifient le plus ; il y a le pouvoir de ses idées, le pouvoir de son identité et le pouvoir de ses mots écrits. On peut prendre une partie de lui et la rendre primordiale », analyse Gabriel Goldstein, directeur associé des expositions et des programmes du musée de la Yeshiva University.

Les amateurs de sciences et les universitaires pourraient être intéressés par la manière dont Sir Isaac Newtown avait consulté les lois sur la nouvelle lune établies par Maïmonide lorsqu’il avait réformé le calendrier julien. Pour les artistes, il y a le portrait de Ben Shahn, réalisé en 1957, de « Science and the Humanities » de Maïmonide, qui avait servi de modèle à la mosaïque murale qui orne aujourd’hui le lycée William E. Grady Career and Technical Education High à Brooklyn.
D’autres pourront s’intéresser à la ménorah dessinée à la main par Maïmonide, dont le design anguleux, plutôt que courbe, a été adopté par le mouvement Habad pour les célébrations publiques de Hanoukka. Et les amateurs de culture pop trouveront un étui pour iPhone et une grenouillère rose, tous deux à l’effigie du Sage.

Parmi les pièces prêtées figurent des manuscrits yéménites du XIIIe siècle et des livres imprimés anciens provenant des archives d’État italiennes. Des textes produits par et pour des publics chrétiens proviennent de la collection Hartman, basée à Chicago, la plus importante collection privée de manuscrits et de livres rares de Maïmonide. Les Bodleian Libraries d’Oxford ont prêté deux manuscrits enluminés, qui portent tous deux sa signature. En outre, des fragments de la Genizah du Caire ont été prêtés par la bibliothèque du Séminaire théologique juif.
Outre les manuscrits, la synagogue Ben Ezra du Caire possède une porte sculptée de l’arche de la Torah datant du XIe siècle. Bien que Maïmonide n’ait pas été membre de cette synagogue, il l’aurait vue lorsqu’il y vivait, a expliqué Goldstein.
Le « Moreh Nevukhim », ou « Guide des Égarés », principal ouvrage philosophique de Maïmonide, est également exposé pour la première fois au public. Achevé en 1349, ce manuscrit richement enluminé est prêté par la Bibliothèque royale de Copenhague.

Aujourd’hui encore, la feuille d’or qui orne les marges n’a pas perdu de son éclat et le paon bleu se détache toujours de la page. Considéré comme l’un des plus beaux exemples des traditions d’enluminure de l’époque, l’état quasi parfait du manuscrit témoigne de la vénération que les gens avaient, et continuent d’avoir, pour les idées de Maïmonide.
« C’est absolument époustouflant », s’exclame Goldstein, ajoutant qu’il ressent un lien personnel avec l’œuvre depuis qu’il l’a vue pour la première fois il y a plusieurs décennies, alors qu’il travaillait comme stagiaire, l’été.
Sclar, qui est également professeur de lycée à la Frisch School dans le New Jersey, note qu’il était important pour lui que l’exposition soit accessible aux collégiens, aux universitaires sérieux et à tous les autres.
« Voir ces pièces de ses propres yeux est important car cela nous permet de voir que Maïmonide était une personne. Mon souhait le plus cher est que les gens regardent ces objets, s’assoient, discutent et apprennent les uns des autres », ajoute Sclar.
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